Chapitre 29 :
Akujo s’élança alors que Maynard n’avait même pas terminé sa phrase.
-Espèce de misérable petite ordure !
Il balança son poing à une vitesse ahurissante, soulevant un nuage de poussière autours de lui. Maynard l’esquiva au dernier moment et contre-attaqua d’une botte éblouissante de vivacité et de précision.
Le moine Khajiit bondit, beaucoup plus haut que ne l’aurait laissé pensé sa masse, et se rétablit souplement, juste derrière son adversaire. Maynard fit volte-face. La patte d’Akujo fouetta l’air et le cueillit juste en dessous du menton, le projetant dans les airs.
Maynard retomba lourdement au sol et tenta de se redresser en grimaçant. Akujo fit craquer les os de sa nuque.
-Relèves-toi. Je compte en finir avec toi avant que l’Egorgeur n’arrive.
A l’entrée, Roderick avait débandé son arc et rangé sa flèche dans son carquois. Il s’était adossé à un mur et observait le combat. Au fond, il n’avait absolument aucune raison d’intervenir, et il était curieux de voir comment tout cela allait finir.
Maynard se releva et tituba. Le coup de pied l’avait sonné.
Akujo se remit en garde et frappa, à l’estomac. De son moignon. Maynard se plia en deux et vomit un mélange de bile et de sang. Son chignon s’était détaché et ses cheveux tombaient sur ses épaules et sur son visage en une cascade noire.
Le moine Khajiit saisit son adversaire, avec un grognement.
Maynard sentit ses pieds quitter le sol, et vit en une fraction de seconde le plafond et le sol s’inverser. Puis, il heurta le plancher avec une violence qui fit craquer les lattes de bois et voler des morceaux dans tous les sens.
Le moine guerrier toisa son adversaire avec un mélange de dédain et de dégoût.
-Pitoyable. Un homme fragile comme toi qui croyait pouvoir me vaincre.
Il ramassa l’épée de l’Impérial et la contempla un instant.
-Et tu croyais pouvoir me faire mal avec cette aiguille…
-Ne poses pas tes sales pattes sur mon sabre, gémit Maynard, au sol, en se redressant sur un coude.
-Tais-toi. Je vais t’achever avec ta propre lame. La même qui a tué Ulfreith et la bande de Kojas. Quand tu iras rejoindre tes dieux, tu les salueras de ma part.
Le sabre se leva. Maynard grimaça. Akujo inspira. La lame retomba.
Sifflement sec.
L’épée quitta les doigts d’Akujo et retomba au sol. Le moine guerrier gémit et regarda la coupure sur son poignet. Il porta rapidement sa main à sa ceinture pour saisir des étoiles de jet.
Sifflement sec.
Il les lâcha et celles-ci retombèrent toutes au sol avec des tintements métalliques.
Sifflement sec.
Le Khajiit recula, la main sur son visage, une longue ligne rouge le lui barrant maintenant horizontalement, partant d’une oreille et rejoignant la joue opposée.
Sifflement sec.
Une lanière noire s’enroula autours de son cou avant de disparaître, comme si elle n’avait jamais existée. Akujo se plia en deux et mit sa main sur sa gorge où se distinguait maintenant une trace sanglante, tout du long.
Sifflement sec.
La lanière noire réapparut et emporta une oreille du Khajiit.
-Aaaargh !
Le moine guerrier posa un genou à terre et serra les dents, du sang coulant de son oreille arrachée. Roderick s’était remis en garde et avait encoché une flèche, scrutant la pièce devant lui. Maynard s’était relevé et avait récupéré son épée. Il jetait des coups d’œil nerveux autours de lui.
-Qui est là ?
Akujo se remit debout, d’un bond, une lueur de rage dans les yeux.
-Qui a osé ?! Qu’il sorte de sa cachette et vienne m’affronter !
Il y eut un ricanement. Les trois hommes tressaillirent et regardèrent autours d’eux, cherchant sa provenance. Soudain, une silhouette sortit de l’ombre. Le sifflement sec retentit de nouveau, et Akujo fit deux pas en arrière, une fine coupure lui barrant la poitrine.
La lanière de cuir se rétracta et alla s’enrouler autours du bras de l’individu. Celui-ci s’approcha. Un rayon de soleil passant par uns des trous dans le toit révéla son apparence.
Un Elfe, sans doute un Dunmer, mais à la peau pâle et aux yeux d’un rouge vif. Ses longs cheveux noirs étaient attachés en nattes qui se balançaient dans son dos et sur ses épaules au rythme de ses pas.
Il était vêtu très simplement d’une tunique en tissu noir et d’un pantalon de jute.
-Qui a osé ? dit l’individu d’une voix mélodieuse. Qui a osé ? C’est vous qui me demandez cela, à moi, alors que vous vous introduisez dans ma demeure en profitant de mon absence pour la fouiller sans mon autorisation ?
-J’ai donc affaire à Llyan Lamaré, cracha le Khajiit. N’est-ce pas ?
Le vampire caressa le fouet en cuir autours de son bras.
-En personne, messieurs.
-Qu’est-ce qu’on attend pour lui sauter dessus et le massacrer ? lança Maynard.
-Ce n’était pas toi qui voulais l’affronter seul pour empocher la prime ? répondit Akujo.
Le vampire tapa dans ses mains pour attirer l’attention à lui.
-Tout d’abord je me dois de vous féliciter d’être arrivés jusqu’ici. Et d’avoir découvert qui j’étais. Le Nordique vous a néanmoins bien aidé. Ensuite…
-Ensuite ?
-Ensuite je vais vous tuer.
-Excellent, gronda Akujo en s’avançant. J’aime quand les situations sont claires.
-Attends !
C’était la voix de Roderick qui avait retentit. Il se tourna vers le vampire.
-J’ai quelques questions à te poser. C’est avant tout pour cela que je suis venu.
-Je t’en prie mon garçon. Il n’y a rien de plus frustrant que de mourir avec des interrogations.
-Pourquoi m’as-tu fais passer pour toi, quand je suis arrivé en ville, et comment t’y es-tu pris ? Et surtout, pourquoi as-tu tué une autre personne juste avant qu’on m’exécute, faisant de moi un innocent ?
Le vampire se gratta le menton d’un air perplexe. Puis, il sembla reconnaître Roderick.
-Oh ! Toi ! J’avais complètement oublié cette histoire. Tu t’es trouvé au mauvais endroit, au mauvais moment, voila tout.
-Qu…
-Pour tout te dire, j’avais prévu depuis longtemps de quitter cette ville. Je ne reste jamais bien longtemps au même endroit, et mes précédents meurtres m’avaient amplement satisfait. Et surtout, je ne laisse jamais de trace.
-Qu’est-ce que ça à a voir avec moi ?
-Il me fallait un coupable, quelqu’un qui aurait endossé l’identité de l’Egorgeur à ma place, pour que je puisse quitter la ville tranquillement et recommencer ailleurs, sous un autre nom. Il fallait que l’affaire de l’Egorgeur soit close définitivement avant que je ne m’en aille.
-Mais alors pourquoi avoir tué juste après ?
Le vampire fronça les sourcils.
-Une fâcheuse affaire. J’avais terminé de plier bagages quand j’ai moi-aussi eu vent de cette histoire. Tu peux remercier la personne qui a fait ça, mon garçon, parce qu’elle t’a sauvée la vie.
-Vous voulez dire que… ce n’est pas vous qui…
-Non. J’ai eu beau traquer cette personne qui s’était faites passer pour moi et avait tué de la même façon que moi, ce jour-là, je ne l’ai jamais retrouvée. Ensuite, j’ai entendu parler des avis de recherches qui avaient été distribuées dans la région et de la prime sur ma tête. Je me suis dit que j’allais éventuellement rester encore un peu et que la suite des évènements pourrait être amusante.
-Mais alors qui ? Qui a tué pour me sauver ?
-Eh bien, je…
Le rugissement d’Akujo fit trembler la maison en ruine.
-Tout ça on s’en moque ! Amènes-toi, Llyan Lamaré ! Qu’on en finisse !
Il bondit et fusa vers l’Ancien Vampire. Une boule de muscle et de puissance concentrée, toute en griffes et en crocs, à la course effrénée, plus terrifiante que celle d’un smilodon enragé. Il fondit sur l’Egorgeur, et pendant un instant, on aurait pu croire qu’il allait le déchiqueter.
Mais les mâchoires du moine guerrier claquèrent et se refermèrent sur le vide. Il se retourna. Le fouet alla s’enrouler autours de sa gorge, une seconde fois. Et se resserra. Sous les yeux de Maynard et Roderick, l’immense moine guerrier de plusieurs centaines de kilos, aux poings capables de perforer des murailles, se recroquevilla, suffoquant, toussant et crachant, les yeux exorbités, réduit à l’impuissance en une fraction de seconde par une fine lanière de cuir.
A l’extrémité de celle-ci, l’Egorgeur souriait.
Les pattes du Khajiit furent prises de tremblements furieux. Ses griffes raclèrent le plancher à la recherche d’une aide quelconque. Son corps, secoué de spasmes impressionnants, s’arc-bouta et il ouvrit grand la gueule, comme pour hurler, mais aucun son n’en sortit.
Ses tremblements ralentirent, puis, cessèrent tout à fait. La lanière de cuir, comme dotée d’une vie propre, se desserra lentement du cou du Khajiit et se rétracta pour revenir au bras de son propriétaire.
L’Ancien Vampire tourna la tête vers Roderick et Maynard.
-A nous maintenant.
Chapitre 30 :
Llyan commença à s’approcher. Maynard et Roderick reculèrent. La lanière de cuir, autours du bras du vampire, s’était mise à luire d’une lueur inquiétante et à onduler comme un serpent. Il sourit et se lécha les lèvres.
-Eh bien, où est passé toute votre audace de tout à l’heure ? Ne deviez-vous pas vous jeter sur m… ?
Avant que l’Ancien Vampire n’ait terminé sa phrase, Maynard fondit sur lui. L’éclat de la lame brilla alors que celle-ci fouettait l’air avec un chuintement métallique. Llyan ne broncha pas quand elle s’enfonça, jusqu’à la garde, dans sa poitrine, ni quand quatre flèches, tirées à une vitesse exceptionnelle, virent se ficher tout autours.
Maynard tenta de retirer son sabre mais sans succès. Il fronça les sourcils et essaya de forcer. La main du vampire se referma sur la base de la lame. Un nuage du vapeur jaillit de ses lèvres entrouvertes.
-Recule ! hurla Roderick.
Maynard bondit en arrière avec des réflexes impressionnants. La lanière de cuir s’enroula sur le vide, à l’endroit où se trouvait l’Impérial quelques secondes plus tôt.
Llyan fit une grimace déçue.
Il retira sans ciller l’épée enfoncée dans son torse, et ressortant dans son dos, avant de la jeter par terre. Il fit de même avec les flèches, avant de s’avancer vers ses deux adversaires.
-Ca ne lui a rien fait ? souffla Maynard.
Soudain, le vampire disparut en une volute de fumée ocre. Il réapparut brusquement devant l’Impérial et sa main, aux doigts fins et à la peau grisâtre, se referma sur son visage avant de rougeoyer et de crépiter.
Maynard hurla d’un cri de souffrance pure, atteignant des aigues insupportables. Le vampire le lâcha et le sabreur tituba en arrière, la face fumante et atrocement brûlée. Il s’écroula au sol et fut pris de spasmes.
Roderick bondit sans attendre.
En plein vol, il décocha deux flèches avant de retomber au sol, d’exécuter une roulade, de passer sous le bras du monstre et de se redresser vivement, une flèche déjà encochée. Llyan se retourna mais recula, un trait fiché dans la tête et lui ressortant de l’autre côté du crâne.
Sans même y prêter attention, il fit un geste et la lanière se déroula en sifflant. Roderick fit une pirouette et le cuir ne fit qu’emporter un pan de tunique et claquer sur un mur. Le Bréton tira trois flèches de son carquois, avec une fluidité et une vitesse impressionnante, les encocha toutes en même temps, banda son arc et lâcha la corde.
Les trois flèches se plantèrent dans la poitrine du vampire avec une série de bruits mâts. Le pied de Roderick fouetta l’air, dans la même seconde, et percuta violemment la tête de Llyan. Le jeune homme virevolta et frappa de nouveau, du coude cette fois, en plein dans la gorge.
Le vampire fut projeté au sol.
Il se releva tranquillement, sans montré la moindre douleur, et remit sa mâchoire en place avec un craquement sonore.
-Tu m’intrigues, petit. Ce style de combat… Cette façon de bouger… De l’archerie à distance rapprochée. Je n’ai vu ça qu’une seule fois dans ma vie. Mais non, c’est tout bonnement impossible. Quoique… Ce serait une farce bien cruelle du destin. Et fichtrement amusante.
-Je ne comprends pas, répondit Roderick en haletant.
-Dis-moi donc ton nom.
-Roderick Lustwick.
Les yeux du vampire s’agrandirent. Puis, il éclata de rire.
-Ha… Ha, ha… Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Excellent ! Ha ! Ha ! Ha ! Ha !
Il finit par se calmer et s’essuya les yeux tout en retirant une par une les flèches plantées dans son corps.
Il remarqua l’air passablement surpris de Roderick.
-Hum… Comment va ton maître petit ?
-Mon maître est mort. Il…
Roderick se stoppa. Ses genoux se fléchirent. Ses yeux se rétrécirent, ne devenant que deux fentes sombres. Ses dents se serrèrent. Son dos s’arrondit. On aurait dit un fauve. L’ambiance venait radicalement de s’alourdir.
-Comment connais-tu mon maître ?
Le vampire se gratta le menton avec un sourire féroce.
-Ca faisait bien longtemps que je n’avais pas croisé le fer avec un Lustwick. Cette journée a pris un tour intéressant ! Je commence à ne plus regretter d’être resté en ville, finalement !
Et soudain, la porte explosa. Six chaînes argentées fusèrent de tous les côtés et s’enroulèrent autours de l’Ancien Vampire, avant qu’un javelot en métal ne vrombisse et ne percute brutalement le monstre, au milieu du torse, et ne le cloue au mur.
-En formation !
Une dizaine de garde jaillit dans la pièce et entoura le vampire. Ils étaient menés par Lynris qui était revêtu d’une armure en écaille et qui tenait fermement une hallebarde deux fois plus grande qu’elle. Barek était à ses côtés.
Un shaman les accompagnait, vêtu d’un pagne et d’une coiffe à plume. Les prêtres des dieux Argoniens n’étaient pas rares en ville.
Le capitaine de la garde ne se tourna pas vers Roderick, mais ce fut à lui qu’il s’adressa.
-Beau boulot. Merci de nous avoir menés jusqu’à lui.
Roderick resta abasourdi un instant avant de secouer la tête.
-Ne vous mêlez pas de ça, vous tous ! Il est pour moi ! Il a des réponses à me donner !
-Hors de question. Nous le tenons maintenant.
-Les armes conventionnelles sont inutiles face à lui ! Ne restez pas là !
-Qui te dit que nous utilisons des armes conventionnelles, peau lisse ? dit Lynris. Nous n’allions pas partir à la chasse au vampire sans préparation. S’il est vrai que les armes d’un matériau supérieur au mithril sont efficaces contre eux, les armes bénies le sont davantage.
Le vampire montra les dents et feula comme un chat. Ses oreilles s’allongèrent, ses canines grandirent, ses épaules s’élargirent et ses cheveux se mirent à onduler comme une myriade de serpent. Sous le coup de la colère, il avait abandonné ses traits humains et arborait son véritable visage.
-Des armes bénites ? cracha-t-il.
-C’est finis Llyan, dit Barek. Tout est finit.
Le shaman, les yeux mis clos, entama une prière lourde et monotone, à voix basse.
Les chaînes commencèrent à fumer. Le vampire s’agita et siffla comme un serpent, tentant tant bien que mal de s’arracher du mur sur lequel il était cloué par la lance. Une odeur de chaire brûlée envahit la pièce.
-Non ! NON !
La fumée devint de plus en plus épaisse. Les chaînes devinrent blanches, et des étincelles dont la couleur ne laissait aucun doute quant à l’origine magique, jaillirent de toutes parts. Le prêtre continua à psalmodier d’un ton grave et vibrant.
-Nooooooooon ! hurla le vampire. Aaaaaaaaaaaaaah !
L’odeur devint atroce et les gardes durent batailler pour garder les chaînes entre leurs mains, tant le monstre se démenait pour leur faire lâcher prise.
-Aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaahaaaaaahaaaaahahahaha, ha, ha, ha, ha, ha, ha… ha ! Ha ! Ha ! Ha !
Les gardes se regardèrent. Le shaman cessa sa prière. Tous reculèrent d’un pas. Le vampire avait la tête baissée et ses cheveux noirs retombaient en cascade sur son visage, mais ses yeux brillaient d’une lueur intense.
Une voix gutturale qui n’avait rien de celle qu’il avait quelques secondes plus tôt retentit.
-Petits hommes… Mortels misérables… Larves…
Les chaînes gémirent en se distordant. Le vampire s’avança doucement, faisant grincer le javelot qui se tordait à mesure que le monstre bougeait.
-Je suis Llyan A’rakshur Deïtara Lamaréum, le Démon Vengeur, le Fléau des Dieux, le Sacrilège en Marche… J’ai mille huit cent soixante ans… J’ai vu des cités se dresser, d’autres s’effondrer, au fil des âges… Des rois sont morts par ma main, des peuples ont été décimés, des villes saccagées, des temples souillés… Les daedras et les aedras me craignent… Je n’ai nul rival en ce monde, comme dans les autres… J’ai parcouru Nirn et mes pieds on foulés des terres que vous ne pourriez atteindre même dans vos rêves… La simple évocation de mon nom est un blasphème et une impureté sans nom… Vous… Vos chaînes… Et vos prières… Vous pensez être capable de me vaincre moi… Ha ! Ha ! Ha !
Au fur et à mesure de son discours, il avait continué à avancer. Le javelot s’était détaché du mur et gisait au sol. Les gardes grimaçaient en essayant de retenir le monstre mais les chaînes étaient tendues à l’extrême et menaçaient de céder.
Les vêtements de Llyan se mirent à craquer, dans son dos, alors que deux excroissances immondes poussaient sur ses épaules. Ses bras s’allongèrent et s’épaissirent. Ses cheveux grandirent jusqu’à presque toucher le sol.
Les chaînes, finalement, explosèrent unes à unes sous la pression.
Les excroissances se transformèrent en ailes grisâtres. Le vampire dépassait maintenant toutes les personnes présentes dans la pièce d’au moins trois têtes. Son faciès était une abomination, une insulte à la nature. Un mélange atroce entre une chauve-souris, un Elfe et un chat, et des crocs de smilodons.
Barek, pâle, tremblait de tous ses membres. Lynris proférait des injures à voix basse, les yeux exorbités de terreur, le visage dégoulinant de sueur. Le shaman s’était agenouillé et remis à prier ses dieux, le visage crispé.
Roderick vit Maynard, à terre, sangloter. A ses côtés, un garde couina, et un cercle humide s’élargit sur son pantalon de toile.
-On est mort, murmura-t-il. On est mort.
Roderick n’était pas loin de partager son avis.
Et tous seraient alors peut-être morts si un homme n’était alors pas entré dans la maison en ruine.
Vêtu d’une armure de cuir rapiécée et usée, et d’une longue cape traînant sur le sol, il arborait un masque en acier représentant un visage triste. Et, quand Roderick tourna la tête vers lui, il ne trouva alors plus du tout le vampire effrayant.
La voix métallique sortant de sous le masque était encore moins humaine que celle de Llyan.
-Roderick Lustwick est pour moi, fit le Rôdeur. Alors hors de mon chemin, vampire.
Omg ce casting de fou dans la maison en ruine ,quand les expendables versipn mechant rencobtres skyrim
Non, sans blague douteuse, ça reste toujours aussi bon tu fais toujours des cliffhangers tres reussis hâte de voir la suite =)
génial cette fic a quand la suite ?
Dommage pour Akujo, je l'aimais bien
génial
bon j'suis au chapitre 3
je referait surface quand je serait au dernier chapitre sortie
Okay, prend tout ton temps
Prendre tout son temps pour la lecture; ok.
Mais il faut la sweet aussi
~Non ceci n'est pas une demande/reclamation~
c'était genial!! vivement la suite!! notre heros est mal barré!! si il est bien le heros?
Chapitre 31 :
Le silence se fit, dans la pièce. Tous les regards s’étaient tournés vers le nouvel arrivant. Le seigneur vampire semblait ne pas y croire. Qu’on ait osé lui couper la parole. A lui.
-Je suis Llyan A’rakshur Deïtara Lamaréum, répéta-t-il d’un air éberlué. Je…
-Je me fiche bien de qui tu peux êtres et de ce que tu as pu faire. Hors de mon chemin.
Le feulement de rage qui s’échappa de la gorge du vampire à cet instant aurait paralysé sur place un braillard des falaises. L’aurait tétanisé. L’aurait réduit à l’état d’un chiot tremblotant et couinant, la queue entre les jambes.
Le Rôdeur continua simplement d’avancer.
Le Seigneur Vampire tendit sa main griffue et fondit sur sa proie. Le Rôdeur fut projeté en arrière et traversa littéralement un mur avant d’aller s’écraser sur le sol, dehors, au milieu d’une flaque d’eau boueuse. Le vampire gronda. Ses ailes battirent l’air en soulevant un nuage de poussière.
-Sauvez-vous ! hurla Barek à ses hommes en dégainant son sabre. L’ennemi est trop fort !
-Qu’est-ce que tu fais ? lança Lynris.
-Je fais ce que je dois faire Lynris. Ce que j’ai toujours fait. Rentre à Helstrom et préviens les autres. Et ne meurs pas, capitaine.
-Ca… Capitaine ?
-Capitaine de la garde. Il faut bien que quelqu’un prenne le relais après moi, non ?
Et il s’élança vers le vampire.
-Non ! fit Roderick.
Llyan fit volte-face et la lame du sabre s’enfonça dans ses côtes avec un bruit mou, sans rencontrer de résistance. L’Argonien borgne serra les dents en sentant la main osseuse du monstre se refermer sur sa gorge et se mettre à rougeoyer et à laisser échapper des étincelles.
Il hurla de douleur. L’air crépitait autours de lui.
Finalement, le vampire le lâcha et le capitaine retomba, sans vie, la gorge calcinée.
La plupart de ses gardes s’enfuit à ce moment précis. En hurlant et en se bousculant. Ils se précipitèrent jusqu’à la porte et se poussèrent mutuellement pour sortir. Le vampire les regarda faire avec un air de dédain.
Il retira lentement l’épée de son corps avant de la jeter au loin, en faisant une grimace. La plaie se referma, comme si elle n’avait jamais existée.
Lynris s’approcha de Barek et le contempla. On aurait dit qu’il dormait.
-Idiot.
Elle lui donna un coup de pied.
-Tu meurs et tu me refiles ton sale boulot, hein ?
Elle renifla.
-Merde… Ca ne devait pas se passer comme ça…
Elle tourna la tête vers Roderick. Ses yeux étaient embués de larmes. Puis, elle s’enfuit à son tour. Roderick soupira. De soulagement.
Seul un garde était resté. Le plus courageux, ou le plus suicidaire. Ou celui qui n’avait rien à perdre. Roderick avait-il quelque chose à perdre, lui ? Il n’y avait jamais pensé. Et ce n’était de toute façon pas vraiment le moment. Les évènements avaient pris une tournure inattendue.
Le vampire se tourna vers eux et commença à s’approcher d’un pas lourd.
-Mon gars, fit Roderick en encochant une flèche, j’espère que tu as honoré ta femme avant de partir. Parce que c’est sûrement le dernier souvenir que tu lui auras laissé.
-Je n’ai pas de femme, répondit-il. Si j’ai honoré ma main, ça compte ?
Il s’esclaffa.
-Tu as l’air détendu.
-On doit tous faire face à la mort un jour ou l’autre. J’aurais du mourir il y a bien longtemps. Le destin nous rattrape toujours à un moment où à un autre.
-Ton nom ?
-Lasar. Et toi ?
-Roderick.
Le vampire s’approcha. Une flèche fusa. Llyan l’écarta d’un revers de la main avec un grognement agacé. Ses pieds, en s’enfonçant dans le plancher, y laissaient des marques rougies et fumantes, brûlant le bois jusqu’à en faire de la poussière.
De la vapeur sortait de ses naseaux.
Lasar tira son épée de sa ceinture et se mit en garde. Il déglutit, ne parvenant pas à cacher sa nervosité. Roderick encocha une autre flèche, parfaitement conscient de son inutilité face au monstre qui leur faisait face.
Il avait toujours été prêt à mourir. La mort, il la côtoyait depuis sa naissance. Elle était devenue une amie, presque une complice, l’accompagnant où qu’il aille, et il avait beau la fuir, elle le rattrapait toujours.
Mais pas comme ça. Pas maintenant. Son voyage ne pouvait pas se terminer de cette façon. Il avait encore tant de choses à voir, à faire. Il…
Le vampire se stoppa net en voyant le javelot argenté sortir de sa poitrine, maculé de sang. Dans son dos, Maynard enfonça plus profondément la perche bénite dans le corps du monstre. Son visage était atrocement brûlé mais son regard brillait d’une haine intense.
-Crève, fils de…
Le vampire se retourna et saisit l’Impérial par le col avant de le soulever au-dessus du sol et d’attraper uns de ses pieds de sa main libre. Maynard tenta de se débattre et de frapper son adversaire, mais la prise était trop solide.
Le vampire écarta brusquement les bras. L’Impérial n’hurla même pas. La chaire se déchira avec un gargouillement immonde et un bruit de sussions.
Roderick ferma les yeux et détourna la tête mais il sentit un liquide chaud l’éclabousser.
-Oh, bordel, gémit Lasar avec une voix chevrotante.
Le vampire jeta les deux morceaux de cadavre sanguinolent derrière lui et se remit en marche. Il retira le javelot de son dos et le sectionna d’un coup de dent avant de lancer les débris au loin. Enfin, il arriva au niveau des deux hommes, tétanisés.
Roderick tira une flèche. Le vampire ne l’esquiva même pas et elle alla s’enfoncer dans son œil sans que cela ne semble le peiner.
Il sourit de toutes ses dents.
-J’ai connu des Lustwick qui avaient plus de répondant.
Lasar émit un cri de guerre et s’élança sur le monstre. D’un geste nonchalant, le vampire lui ôta son sabre des mains. D’un autre, il attrapa Lasar par le bras et le balança à l’autre bout de la pièce, à la vitesse d’un boulet de canon. L’Argonien heurta un mur et s’écroula au sol, la nuque tordue dans un angle impossible.
L’attention du vampire revint sur Lustwick.
-J’ai beau avoir affronté quelques uns de tes ancêtres, fit-il comme si rien ne s’était passé, je n’ai jamais eu l’occasion d’en tuer un seul.
-Et tu ne le feras pas aujourd’hui. C’est ma proie.
La voix était glaciale. Comme une promesse de mort.
Le vampire se retourna. L’homme masqué s’était relevé.
-Toi, siffla le vampire en retroussant ses babines. Qui es-tu ?
Il ne répondit pas et se contenta de pointer son doigt vers le vampire. Celui-ci quitta brutalement le plancher et fusa à travers la pièce avant de fracasser une étagère et de rouler au sol en soulevant un nuage de poussière.
« Un magicien, pensa Roderick. Et un puissant. »
Et soudain, il comprit. Cette silhouette. Cette stature. Identique en tous points à celle qu’il avait aperçue dans la brume, aux alentours d’Helstrom. Celui qui l’avait poursuivit à travers les marais. Celui qui avait tué Itan, Zwee-Toï, Ri-Saar et Okaw.
Il recula d’un pas. Le Rôdeur s’approcha.
« Fuis, lui cria une voix dans sa tête. Fuis le plus loin possible, et ne te retourne pas. »
Et cette voix était celle de son maître.
Le Rôdeur leva la main quand le vampire apparut derrière lui et l’enserra de ses bras avec un feulement de haine pure. Ses yeux brillaient d’un éclat brûlant, et ses dents jaillissaient littéralement de sa gueule.
Le Rôdeur leva la tête. Les crocs se refermèrent sur sa gorge avec un claquement sec. Un homme normal aurait du être décapité sur le coup. Sa tête à lui resta parfaitement en place. Néanmoins, un gémissement résonna, sous le masque d’acier.
Ce fut ce moment là que Roderick choisit pour tourner les talons.
Il passa la porte, sauta à pied joint, retomba dans une flaque d’eau boueuse, s’élança en avant. Il bondit par-dessus une racine noueuse, roula sous un tronc d’arbre écroulé, enjamba un rocher, courut, comme il n’avait jamais couru.
Le vent lui fouettait le visage, et il s’enfonçait inlassablement dans les marais.
Le souffle court, il finit par s’arrêter, et s’écroula par terre. La lune était haute, dans le ciel.
de mieux en mieux vivement la suite
Elle arrivera sans doute ce soir ou demain.
Sûrement ce soir en fait.
Powa !
J'ai rien a dire d'autre
Chapitre 32 :
Les flammes s’élevaient dans la nuit. Les étincelles qui jaillissaient de l’incendie et qui voletaient dans le ciel ressemblaient à des milliers de lucioles. La chaleur, insupportable, faisait trembler l’air. C’était une véritable fournaise.
Roderick vit le toit s’écrouler lentement sur lui-même. Les planches de bois craquaient et se consumaient.
Son maître s’approche de lui, par derrière, et lui posa une main sur l’épaule.
L’enfant fit volte-face, le visage baigné de larme.
-Je ne veux pas te quitter, maître.
-Il le faut, répondit la femme.
-Non…
Elle se pencha et l’enlaça.
-Les années que j’ai passé avec toi ont été les plus belles de ma vie. Mais nos chemins vont devoir se séparer, Roderick. Je t’y ai préparé n’est-ce pas ?
-Tu as encore tant de choses à m’apprendre…
-Non. Ce que j’avais à t’apprendre, je te l’ai appris. Le reste, c’est toi qui l’apprendra et le découvrira par toi-même.
-Est-ce que… Est-ce qu’on va se revoir ?
La femme sourit.
-Certains te diraient que la mort est définitive. Qu’elle signifie une brusque coupure avec le monde. Une fin. Et que, par conséquent, nos chemins se sépareront pour toujours.
-Et toi ?
Elle posa son doigt sur la poitrine du garçon.
-Moi je te répondrais de ne pas les écouter. Parce que je ne quitterais jamais, Roderick. Je serais toujours là. Avec toi. Dans ton cœur.
Elle se redressa et vérifia que la corde de son arc était bien tendue. Dans les flammes se dessina une silhouette. Un homme. Et un masque d’acier au visage triste. Roderick renifla et essuya ses larmes. Son maître lui tendit un arc de bois. Son arc. Son tout premier.
-Quand tu le tiendras, tu penseras à moi. Et c’est par le biais de cet arc que je veillerais toujours sur toi. Toujours. Je ne t’abandonnerai jamais.
L’homme sortit de la fournaise. Les flammes semblaient s’écarter devant lui, et lui faire une haie d’honneur funeste, comme si elles s’inclinaient devant leur seigneur.
-A nous deux, Rôdeur, murmura la femme en s’avançant à son tour. Finissons-en.
Elle jeta un dernier coup d’œil derrière elle et Roderick se rendit compte qu’elle pleurait.
-Fuis, lança-t-elle. Fuis le plus loin possible, et ne te retourne pas.
Roderick tourna les talons et s’enfuit.
« Fuis ».
Roderick se réveilla en sursaut, le cœur battant. Il porta instinctivement la main à son arc, et soupira en sentant sa réconfortante présence, dans l’herbe humide. Le ciel était encore noir. Le soleil ne se lèverait pas avant longtemps.
Roderick avait courut, jusqu’à ne plus sentir ses jambes se mouvoir. Il avait du s’évanouir et dormir pendant une ou deux heures.
Il se redressa sur un coude et passa sa main sur son front. Il la retira, luisante de sueur.
Puis, il se souvint de tout ce qui s’était passé. Le vampire. L’homme masqué. Barek. Etait-il poursuivit ?
Un bruissement le fit se relever instantanément, l’arc entre ses mains, la corde tendue, une flèche déjà encochée.
-Montre-toi !
-C’est moi ! C’est moi !
Un individu sortit des buissons. Il était vêtu d’une cape enroulée autours de lui, et d’une capuche. L’obscurité empêchait discerner son visage. Qu’importe. Roderick avait tout de suite reconnu cette voix. Lynris.
Roderick regarda le feu brûler, au milieu de la clairière. Adossée à un tronc d’arbre, assise à même le sol, la Dunmer dévorait une cuisse de lapin grillée. Elle avait les yeux encore rougis par les larmes qu’elle avait du verser pour l’ancien capitaine de la garde.
-Pourquoi tu m’a suivit ? demanda le Bréton d’un air méfiant.
-Je… Je…
Lynris baissa les yeux.
-Suis-je obligée de répondre à cette question ?
-Pas forcément. Mais Barek ne t’avait-il pas désignée comme nouvelle capitaine de la garde ? Tu abandonnes tes fonctions, comme ça ?
-Je… Non… Je ne me sens pas prête à reprendre le flambeau. Je n’ai pas l’expérience… Et je suis une Dunmer.
-Dis-le franchement. On t’a chassé.
Lynris resta silencieuse. Puis elle répondit.
-Oui.
-Parce que tu n’es pas Argonienne.
-Oui.
-Tu m’avais pourtant dit que tu t’entendais bien avec tout le monde, non ? Que les habitants de cette ville étaient ta famille ? Ah… Je me disais bien que c’était une réalité un peu trop rose pour être… la réalité. Tu ne veux pas non plus m’en parler j’imagine.
-Effectivement.
-Bon… Tu sais où je vais ?
-Non.
-A Gidéon.
-Que vas-tu donc y faire ?
-Entrer au service des Biz-Khil.
A ces mots, les yeux de l’Elfe s’agrandirent.
-Tu es complètement fou !
-On me l’a fait comprendre, oui.
-Tu ne sais donc pas ce qui se dit sur les Biz-Khil ? Sur les mercenaires qui s’engagent chez eux ? Qu’on ne… les revoit plus jamais ?
-Je suis au courant de ces rumeurs.
-Mais alors…
-Des rumeurs, Lynris. Des rumeurs. Néanmoins… Le voyage que je compte entreprendre sera dangereux. Tu devras te faire à l’idée de risquer ta vie à tout instant. Si ce que tu as vu là-bas t’as effrayé, il vaut mieux que tu abandonnes l’idée de me suivre. Je côtoie la mort et je la donne. Alors je te pose la question : Tu veux toujours m’accompagner ?
La Dunmer lança un regard nostalgique derrière elle, comme si elle pouvait apercevoir Helstrom. Elle finit par hocher lentement la tête.
-Oui. Plus que jamais. Je ne retournerais pas là-bas.
Roderick se leva et éteignit le feu avec son pied.
-Alors en route. Nous sommes peut-être poursuivis, et je ne souhaite pas m’attarder ici. Plus vite nous aurons rejoins Gidéon, mieux ce sera.
Le matin se levait et le soleil jetait ses premiers rayons sur la maison en ruine, au milieu des marais. Les oiseaux gazouillaient, les grenouilles faisaient des clapotis légers en sautant sur leurs nénuphars, et la brise qui soufflait faisait s’agiter les feuilles dans les arbres.
Un tas de cendre, qui avait jadis été Llyan A’rakshur Deïtara Lamaréum, l’uns des vampires les plus puissants et les plus dangereux de Tamriel durant deux millénaires, gisait là et s’éparpillait au gré du vent.
Les décombres remuèrent.
Une main gantée jaillit des gravats en soulevant un nuage de poussière.
Autours, les oiseaux prirent leurs envols, et les grenouilles plongèrent toutes dans l’eau.
Le Rôdeur sortit des ruines et épousseta ses épaules. Puis, il se remit en marche. La traque ne faisait que commencer.
J'adore le Rôdeur
Sweet
la suite
je viens de finir le chapitre 20
Chapitre 33 :
Bordeciel, camp Impérial…
Le général Bacchus se pencha sur la carte étalée sur la table devant lui. Il était entouré de sept officiers. L’intérieur de la tente était glacial, et tous portaient des capes et des manteaux de fourrures par-dessus leurs armures.
-Nous pensons contourner la forteresse de nuit, fit le général. Nous lancerons l’assaut depuis les collines, par derrière. Nous posterons préalablement des archers ici, ici, et là. Le signal sera donné vers trois heures du matin.
-Mon général, ne pensez-vous pas qu’il serait plus judicieux de tenter une attaque frontale massive, plutôt que de risquer d’être repéré par des éclaireurs, sur la route, et de se faire surprendre par les rebelles qui occupent le Fort au moment de le contourner ?
-Je suis d’accord avec Marius, dit un autre officier en mâchouillant un brin d’herbe.
Celui qui avait parlé était un énorme Impérial à la peau pâle et au visage couturé de cicatrices. Un vétéran qui avait combattu lors du sac de la Cité Impériale par le Thalmor. Hector Bakmarck.
-Vous êtes cinglé, répliqua un petit homme dont le bouclier semblait trop lourd pour lui. Un choc frontal serait le meilleur moyen de perdre des hommes. Nous avons beau être en supériorité numérique, la première vague qui serait envoyé serait fauchée par les archers en haut des enceintes !
Un autre officier aux cheveux longs et à la barbe sale hocha la tête avec nervosité.
-Dois-je vous rappeler, capitaine Bakmarck, que nous avons besoins du plus d’effectif possible pour défendre Solitude quand les troupes d’Ulfric marcheront vers Solitude ? Nous espions sont très clairs : Il lancera l’attaque d’ici peu. Si pour l’instant il se terre encore aux environs de Blancherive, c’est simplement pour prendre le temps de réunir ses hommes.
Blancherive. La défaite la plus cuisante de l’Empire depuis le début de la guerre civile de Bordeciel. Ulfric avait promené la tête de Balgruuf sur un pieu en bois, dans tout le quartier des Nuées, ainsi que la tête des trois généraux Impériaux présents à Fort-Dragon.
La cité était tombée en moins d’une heure. Cela avait été un carnage, et peu de Légionnaires en étaient sortis vivants. La barbarie d’Ulfric n’avait eu aucune limite. On disait qu’il avait violé la femme du jarl alors qu’il avait encore le visage maculé du sang de ses enfants, qu’il avait sauvagement assassinés.
En vérité, cette défaite était surtout due à une grossière erreur stratégique de la Légion qui n’avait pas imaginée un seul instant que les rebelles attaqueraient aussi vite Blancherive.
Hector Bakmarck cracha par terre.
-Je n’aime pas faire les choses à moitié, c’est tout. Nous devons nous montrer aussi cruels que nos ennemis. C’est aussi une guerre psychologique. Les flammes doivent s’élever assez haut pour qu’Ulfric puissent les voir briller depuis son palais.
Le général Bacchus n’avait pas dit mot. Les sourcils froncés, il semblait réfléchir intensément au meilleur choix à prendre.
En l’absence du général Tullius, il n’y avait plus que lui pour diriger la suite des opérations. Tullius était allé rejoindre Solitude pour prêter main forte à la garde de la cité. Bacchus savait que sa place était également là-bas. Il voulait mourir devant la porte du palais bleu, l’épée à la main, et protéger Elisif de son propre corps, jusqu’à la fin.
Mais Fort Sungard était prioritaire. Bacchus devait s’en emparer. Et ensuite, il n’irait pas à Solitude. Il se dirigerait directement vers Vendaume. Les ordres venaient de très haut. Il était temps de tirer Ulfric de son trône.
Le général leva la tête et passa son regard sur ses hommes qui se disputaient.
Tous participeraient à l’assaut final sur la capitale rebelle.
Le groupe semblait scindé en deux, avec à droite, les officiers qui feraient partis de la première ligne. Hector Bakmarck, Marius Oresin, Titus Sameros et Sorian G’Malikr. A gauche, les officiers qui resteraient à l’arrière, à donner des ordres, dont Fallius Heponimus, Tarlor de Bruma, et Olaf Barbefilante.
Paradoxalement, ceux qui mèneraient l’attaque étaient les plus détendus. Le capitaine Bakmarck mâchonnait son brin d’herbe, Marius Oresin jouait avec un poignard, Titus Sameros observait la scène avec un air amusé et Sorian G’Malikr, assis dans un coin, semblait accorder plus d’attention à ses ongles qu’à la discussion.
Fallius Heponimus, lui, faisait les cent pas en vociférant et en maudissant Ulfric. Tarlor de Bruma trépignait et tentait d’attirer l’attention du général en pointant énergiquement différents points de la carte. Olaf Barbefilante se grattait la barbe d’une main et essuyait son front couvert de sueur de l’autre.
Ah, si seulement Shuzug Gro-Yargol était là… Mais il était porté disparu depuis plusieurs mois. Certains le qualifiaient de déserteur. Bacchus, lui, savait très bien que c’était faux. Shuzug n’abandonnerait jamais ses hommes. Jamais. Sauf si une affaire plus importante l’appelait… Mais par les Neuf, quelle affaire pouvait justifier qu’il déserte Bordeciel, sans prévenir, en pleine guerre ?
-Vous avez une idée, mon général ? demanda doucement Marius en se penchant vers son chef.
-Oui, j’ai pris ma décision. Nous allons…
Un messager le coupa.
Il arriva en trombe dans la tente, haletant, et tomba à genoux devant Bacchus. Ses cheveux étaient en batailles et son armure cabossée. Visiblement, il venait de loin, et il avait rencontré quelques problèmes sur sa route.
-Reprend ton souffle, soldat, ordonna Olaf Barbefilante en dégainant à moitié son glaive. Et surveilles tes mots. Tu es en présence de ton général !
-Il suffit, Olaf.
Bacchus lui lança un regard, un seul, et Olaf recula en baissa les yeux. Le général reporta son attention sur le messager. Un jeune Impérial de quinze ans. La Légion les enrôlait si jeune, aujourd’hui… Il n’avait sans doute jamais connu la chaleur d’une femme. Et il maniait déjà une lame. Le monde était tombé bien bas.
-Parle, mon garçon.
-J’ai… J’ai tué trois chevaux pour arriver au plus vite ! J… J’arrive du Nord !
-Que s’est-il passé ?
-Solitude est tombée, mon général ! Solitude est tombée !
Sa voix se brisa. Hector ouvrit la bouche, les yeux exorbités, et le brin d’herbe tomba au sol. Marius cessa instantanément de jouer avec sa dague. Tarlor étouffa un glapissement. Le vent souffla, dehors. Le silence s’était fait dans la tente.
Le général Bacchus se redressa lentement. Ses dents s’étaient serrées. Ses yeux semblaient deux puits noirs, sans fond. Son visage semblait fait de pierre.
-Ais-je bien entendu, soldat ?
Le messager hocha la tête en déglutissant.
-Oui mon général, vous avez bien entendu !
On aurait dit qu’il allait pleurer, quand il reprit.
-Ulfric a pris Solitude, mon général. Les Sombrages ont vaincus !
Bacchus se tourna vers ses hommes. Comment Ulfric avait pu prendre Solitude alors que d’après les dernières informations qu’il avait reçues, il se trouvait encore à Blancherive ? Pourquoi aucun message d’aide n’était parvenu au camp ? Comment les Sombrages avaient-ils pu vaincre aussi rapidement ?
Bacchus aurait du se taire. Respecter les ordres. Mais sa décision était prise depuis longtemps, en vérité. Et le dire à voix haute fut comme un soulagement. Soulagement qui redoubla quand il vit la lueur dans les yeux de ses officiers.
-Levez le camp, prévenez les hommes, rassemblez les armes, et envoyez un message à toutes les troupes des environs. Nous nous mettons en route pour Vendaume.