L'attente fut longue, mais voila le chap. J'espère qu'il vous plaira.
Chapitre 72 :
Bineï bailla bruyamment. Il était encore très tôt et la cité de Gidéon était endormie. Il détestait son boulot, mais il fallait avouer que ça payait bien. L’inconvénient, c’était les horaires. Son chef de patrouille l’obligeait à se lever dès les premières lueurs de l’aube, tous les jours.
Il avait quitté sa campagne depuis déjà deux ans pour s’engager dans l’Ordre des Molosses Noirs, la petite armée privée du seigneur de la ville chargée d’assurer la protection constante du Troisième Cercle, le quartier le plus riche de Gidéon, de la racaille du Deuxième Cercle.
C’était son frère qui l’avait poussé à quitter le village.
« Va t’engager, qu’il avait dit. Va faire quelque chose de ta vie, puisque tu es incapable de travailler aux champs. »
Etait-ce la faute de Bineï s’il n’était habile de ses mains que lorsqu’il était question de manier une hache ou une épée et qu’il était incapable de se servir à peu près correctement d’une bêche ? De nourrir des vers géants ? De semer des graines ou de labourer la terre ?
Non, évidemment. C’était ce dont il essayait de se persuader.
-Eh, Bineï ! Tu dors ou quoi ? Active-toi, un peu ! On doit encore faire quinze tour du quartier avant qu’on vienne nous relayer !
C’était son chef de patrouille, Morvelus. Il était mesquin et hypocrite, mais personne n’osait le défier. Dévêtu, il faisait déjà peur, du haut de son mètre quatre-vingt dix et de ses cent-dix kilos de muscles et d’écailles, mais une fois qu’il enfilait son armure, il avait l’air d’un démon.
Son heaume représentait une tête de chien à la gueule béante, surmontée de deux cornes de buffle. Cornes qu’il avait lui-même ajouté sur son casque après les avoir arrachées de la tête d’un vrai buffle sauvage.
Le Chien Enragé, qu’on l’appelait à la caserne. Bineï le craignait, comme tout le monde. Morvelus était du genre à être impitoyable avec ses ennemis, et encore plus avec ses amis.
Bineï se souviendrait toujours du soir où Morvelus avait surpris uns de ses collègues en train de partager la couche d’une fermière pendant ses heures de gardes. Il avait simplement toqué à la porte, puis fixé les deux amants sans rien dire. Le chevalier, pris sur le fait, avait expliqué qu’elle était sa fiancé et qu’ils s’aimaient en cachette depuis des mois de cela.
« Je suis même prêt à vous défier, par amour pour elle, avait-il di. Si vous m’interdisez de la voir ! »
Morvelus s’était approché et avait posé sa main sur l’épaule de son soldat.
« Tu l’aimes vraiment, hein ?
-Oui, chef. »
Alors il avait fait ligoter le pauvre soldat et l’avait forcé à regarder quand lui, puis tous les soldats de la patrouille, étaient passés sur la pauvre fermière. Morvelus lui avait néanmoins donné une piécette et l’avait enjoint à déguerpir.
Puis il avait fait pendre le chevalier la tête en bas, pieds et mains tranchées, devant la caserne, comme il était de coutume de faire avec les voyous qu’ils attrapaient.
Bineï frissonna et s’apprêta à suivre ses compagnons quand il remarqua qu’ils avaient disparus.
Où étaient-ils donc passés ?
Morvelus était encore là quinze secondes plus tôt, entouré de ses hommes.
Bineï regarda autours de lui. Les rues silencieuses s’étaient d’un seul coup faites menaçantes. Il déglutit et porta instinctivement la main à la poignée de son épée, à sa ceinture, tout en caressant la tête de son cheval pour le calmer.
-Eh ! Les gars ?! Vous êtes où ?!
Soudain, Bineï vit une silhouette, au coin de la rue. Un homme qui s’approchait de lui. Il avait une allure singulière : Une armure de cuir rapiécée, une longue cape sale traînant par terre et surtout, un étrange masque de fer représentant un visage triste.
Une voix métallique s’éleva de sous le masque.
-Pouvez-vous m’indiquer la demeure des Biz-Khil ?
-O… Oui. Là-bas.
L’homme hocha la tête et poursuivit sa route. Bineï l’arrêta.
-Excusez-moi, vous n’auriez pas vu une patrouille dans le coin ? Ils étaient là il y a quelques secondes.
-Si, je les ai croisés, et je leur ai demandé mon chemin, mais ils n’ont pas voulus me répondre.
Sur ces paroles, il se détourna et reprit sa marche. Bineï fronça les sourcils et s’engagea dans la rue d’où venait l’étrange individu. Aussitôt, une odeur pestilentielle l’accueillit et lui envahit les narines. L’odeur de la mort.
Il porta la main à sa bouche pour ne pas vomir.
Son regard était posé sur ses collègues et sur son chef, Morvelus. Ou du moins ce qu’il en restait.
Sur le sol et… sur les murs.
Bordeciel, quais de Vendaume…
Les Claque-Marées étaient pêcheurs de père en fils, depuis plus de trente générations. Edrik Claque-Marée n’y faisait pas exception. Tous les matins, il se levait, et partait en mer sur son petit bateau, pour ne revenir que le soir, les filets pleins de poissons.
Demain, il n’irait pas pêcher.
Le Nordique leva la tête et contempla le ciel nocturne. Le vent glacé lui fouetta le visage.
Les alentours de Vendaume n’étaient pas réputés pour être très chaleureux, et le pêcheur frissonna, malgré les multiples couches de fourrure qu’il portait sur le dos. Il se demandait comment les Argoniens faisaient pour vivre toute l’année dehors, vêtus de haillons, interdits de poser le pied à l’intérieur de la cité.
Edrik regarda les pièces luisantes dans sa main. Avec une somme pareille, il aurait pu partir aussitôt, quitter le pays et aller mener une vie de roi dans des contrées lointaines, avec sa famille. Mais il ne pouvait se résoudre à abandonner les affaires familiales. Il se servirait de cet argent pour se racheter un navire, plus grand, plus beau, qui lui rapporterait plus de poissons.
Le Nordique n’en avait pas cru ses yeux quand un Elfe était venu l’aborder, deux jours plus tôt, et lui avait glissé l’or dans les mains, avec un sourire.
Il se souvint de la discussion qu’ils avaient eue.
-Me louer mon bateau ? s’était exclamé Edrik.
-L’acheter, plutôt. Vous ne risquez pas de le revoir.
-Mais… Mais pour qui ? Et pour aller où ?
-Sa destination ne vous concerne nullement. Son passager est un agent à nous. On le nomme le Serpent, et il viendra vous voir dans deux jours pour prendre votre navire. Vous ne lui poserez pas de question. Vous ne le regarderez pas. Vous mettrais simplement votre navire à l’eau et vous oublierez cette affaire. D’accord ?
-D’accord.
-Je compte sur votre… discrétion. Nous avons de toute façon les moyens de vous faire taire, si vous devenez dangereux.
-J… Je ne dirais rien.
L’Elfe avait alors sourit et fait un geste de la main. Puis, il s’était évaporé. Purement et simplement, laissant derrière lui des relents âcres de magie. Edrik était resté tétanisé, les bras ballants, au milieu des quais.
Comme promis, deux jours plus tard, un homme était venu le trouver, de nuit, à la lueur d’une torche.
Il était emmitouflé dans une cape de tissu noir, et une capuche lui masquait le visage, mais en arrivant au niveau du pêcheur, il l’ôta d’un coup sec, révélant un visage monstrueux, parsemé de veines bleuâtres et de boursouflures douloureuses, sûrement dues à une maladie ancienne ou à un accident.
Ses lèvres grises s’étaient étirées en un semblant de sourire et Edrik avait bien cru qu’il allait mouiller ses chausses.
-Je vous fais peur ? avait demandé celui qui se surnommait le Serpent.
-M… Messire, sans v… vouloir vous manquer de respect… Oui.
-Dans ce cas…
Le Serpent avait rapidement passé sa main devant son visage et, en l’écartant, ses traits avaient changés. Ils étaient devenus fins, et ses cheveux avaient poussés pour devenir une toison de cheveux blonds lui retombant sur les épaules. Sa peau elle-même avait pâlit, et ses yeux s’étaient agrandis.
Edrik avait alors eu devant lui un Bosmer séduisant. Il en avait eu le souffle coupé.
-Ainsi, avait lâché le Serpent, je vous effraierais moins.
Sur ces paroles, il s’était éloigné et avait sauté dans la petite barque qui faisait office de bateau de pêche à Edrik. Il avait déployé la voile d’un geste d’expert et le rafiot s’était éloigné dans les eaux noires de la rivière longeant Vendaume, en direction de la Mer des Fantômes.
Maintenant, Edrik commençait à regretter.
Il entendit des bruits de pas derrière lui et se retourna pour faire face à son fils aîné, un solide gaillard promis à un brillant avenir. C’était également son assistant, et il partait régulièrement en mer avec lui pour pêcher.
-Tu vas bien, papa ?
-Oui Greyk. Ca… Ca va.
-Tu as prêté le bateau à quelqu’un ?
Edrik renifla.
-Oui.
Greyk s’avança vers son père et scruta l’horizon, où des nuages sombres s’amassaient déjà et où le ciel était zébré d’éclairs. Une tempête, et pas des moindres, se préparait. Unes de ces tempêtes qui faisait frissonner les capitaines des plus grands et solide galions du monde, unes de celles qui réveillait les monstres abyssaux des fonds marins de leurs sommeils, unes de celle qui soulageait Edrik d’être chez lui, sur la terre ferme, et pas là-bas.
Greyk lui posa une main sur l’épaule.
-Alors j’espère pour lui qu’il n’a pas eu l’idée de prendre la mer par ce temps. J’espère de tout cœur.
Edrik ne sut que répondre.
Gidéon…
Le Rôdeur sortit de la demeure des Biz-Khil. Derrière lui, les gigantesques flammes qui dévoraient le manoir s’élevaient dans le ciel. Des gens terrorisés commençaient déjà à s’amasser aux alentours pour observer la scène.
Le Rôdeur s’éloigna d’un pas tranquille.
Arrivé dans une ruelle étroite, il se stoppa et jeta un regard en arrière. Personne. Il se retourna pour reprendre son chemin quand il lui sembla voir une ombre passer furtivement à quelques mètres de lui, dans un bruissement sourd.
Le Rôdeur se plaça dos au mur, sans un mot, de façon à ne pouvoir être attaqué par aucun angle mort, et claqua des doigts.
Une lumière, sans source apparente, se matérialisa autours de sa main, et éclairé la ruelle.
Rien. Ni trace de pas, ni odeur, ni objet renversé, comme s’il ne s’était rien passé.
-Montre-toi, lança le Rôdeur d’une voix sombre.
-Mais je ne me cache pas. Lève la tête.
Le Rôdeur obéit et soupira. Un homme se tenait accroupi sur le rebord d’un toit, juste au-dessus de lui. Il se laissa tomber avec l’agilité d’un chat et se réceptionna souplement dix mètres plus bas, sans soulever un grain de poussière dans sa chute.
Il se releva et le Rôdeur le détailla.
C’était un Bréton à la peau d’une pâleur extrême. Ses yeux étaient entourés de cernes noirs, comme si l’individu n’avait pas dormi depuis des siècles. Il avait les cheveux bouclés, d’un noir encore plus profond.
Le manteau qu’il portait sur le dos était pour le moins étrange puisqu’il était constitué de plumes, là encore, noires, et qui lui descendaient jusqu’aux genoux.
Mais le pire était ses mains. Ses doigts, crochus, étaient terminés par de longues griffes courbes, les faisant ressembler à des serres d’oiseau.
-Je savais que c’était toi, Corbeau, fit le Rôdeur sous son masque. Il n’y a que toi qui est capable de me suivre sans que je puisse te repérer. Depuis combien de temps es-tu derrière moi ?
-Une semaine.
Le Rôdeur se tut, lui-même stupéfait.
-Une semaine ? Je n’ai l’impression d’être suivit que depuis une heure.
-Parce que je l’ai voulu.
-Pourquoi me suis-tu ?
-Pour t’observer et te tester. Notre Maîtresse est étonnée que tu n’ais toujours pas tué la Flèche Blanche. Elle voulait s’assurer que tu étais encore fidèle à notre cause. Elle m’a chargé de m’en assurer et de te transmettre un message dans le cas contraire.
-Quel genre de message ?
-La mort.
Le Rôdeur émit un ricanement métallique.
-Et ta conclusion ?
-Tu fais toujours parti des Quatre.
Le Corbeau fit un signe de tête vers la demeure en flamme des Biz-Khil.
-Tu n’as laissé aucune trace j’espère ?
-Non, ils sont tous morts. Mais ils ne m’ont rien révélés sur l’endroit où s’est rendu le Lustwick. Je commence à trouver cette traque amusante. Son maître m’avait donné bien moins de mal.
-Ne te prend tout de même pas trop au jeu.
-Je sais.
Les deux hommes se fixèrent un moment. Le Rôdeur reprit la parole.
-Tu es juste venu pour me dire ça ?
-Non, j’ai bien autre chose à te transmettre. Notamment ça.
Le Corbeau tira une enveloppe cachetée de son manteau et la tendit au Rôdeur. Celui-ci la saisit et l’examina.
-Ce sceau… Le Domaine Aldmeri ?
-La lettre est signée de la main de notre Maîtresse. Je ne l’ai pas lu. Ce sont tes ordres. Pour une mission de grande envergure. De très grande envergure. A laquelle tu dois donner priorité. Tu tueras la Flèche Blanche une fois ceci terminé.
-Tu en as reçus également ?
-Chacun des Quatre a reçu ses propres ordres, connus de lui-seul et de notre Maîtresse. Bien sûr, une fois que tu auras lu la lettre, brûle-là.
-Bien entendu.
Le Corbeau s’éloigna d’un pas.
-La seule chose que je sais, c’est que nos ordres ont tous une chose en commun.
-Et quelle est cette chose ?
-Notre destination.
Le Corbeau écarta en grand ses bras et les plumes de son manteau semblèrent frémir. Puis, elles se détachèrent et se mirent à tourbillonner autours de lui, le noyant dans une tornade de plumes noires.
-Elsweyr.
Quand le tourbillon se désagrégea, le Corbeau avait disparu.
et un des sur homme en plus cela fait donc le rodeur un mage surpuissant, le serpent un maître empoisoneur et le corbeau un roi de la furtivité je parierait que le dernier est un bon vieux berzek
mec tu devrais ecrire un livre et l'envoyé a une maison d'edition et pour que les gens comprenne l'univers de l'histoire et a quoi ressemble les gens comme par exemple les argonient tu rajoute des chapitre je suis sur que sa posera pas de probleme
entièrement d'accord avec JNG, ca pourrait faire un gros carton
Plus je lis ta fic et plus je la trouve
Encore bravo pour ton exellent travail
Une petite suite pour ce w-e ?
Ce serai bien ouai...
J'suis en manque
top merci vite la suite
au fait le morvelus tu t'es inspiré de sandore cleganne non? ;)
la suite ce week-end ?
La suite ce week end, oui.
j'attend le suite avec impatience en tout cas sa semble mal partit pour roderick si les 4 sur-hommes se rendent à Elsweyr
Chapitre 73 :
Roderick, accoudé au bastingage, observait la côte s’éloigner. Les bâtiments d’Havrelâme n’étaient déjà plus que des points minuscules à l’horizon. Le jeune homme leva la tête et inspira un grand coup l’air marin à la douce odeur iodée.
Des mouettes volaient en rond au-dessus du navire en criant. Le bateau fendait les vagues, toutes voiles déployées, pour profiter au maximum du grand vent qui s’était levé dans la matinée.
Sur le pont, les marins se détendaient, après la brève agitation du départ. Certains discutaient, d’autre vagabondaient en vérifiant les nœuds, les provisions, etc… D’autres encore, assis à même le sol, jouaient aux dés ou aux cartes.
Roderick était entouré de ses compagnons, qui s’étaient rassemblés après être montés.
Ils virent Marko, le second, s’approcher d’eux en carrant les épaules.
-Hep ! Le capitaine veut vous voir.
L’Impérial passa un œil sur la petite troupe et cracha par terre.
-Vous pouvez pas tous v’nir. La cabine est pas assez grande pour c’beau monde. Désignez trois personnes.
Tous se regardèrent. Finalement, ce furent Anor, Shuzug et Roderick qui furent désignés pour rencontrer celui que tous les matelots nommaient « le vieux Flint ». Un sacré loup de mer, d’après ce qu’avait entendu le Bréton.
Ancien contrebandier, et ayant souvent frayé avec les pirates des îles alentours, il s’était reconverti en marchand mais son équipage, presque tous d’anciens hommes à lui du temps où il était un criminel, avait conservé des manières de malfrats.
Marko mena les trois représentants de la troupe à travers le pont jusqu’à arriver devant la porte de la cabine. Il toqua en baillant.
-Capt’aine ? Les passagers clandestins sont là.
-Clandestins ? souffla Shuzug. On a quand même payés.
-Fais les entrer ! beugla une voix grave à l’intérieur. Et dégage-moi d’là !
L’Impérial haussa les épaules, poussa la porte du bout du pied et s’éloigna. Roderick pénétra à l’intérieur, suivit d’Anor et de Shuzug. L’Orque du baisser la tête pour passer la porte et entrer dans la pièce.
Roderick regarda autours de lui. C’était une petite cabine austère, ne contenant qu’un lit, dans le fond, une petite fenêtre, deux étagères remplies à craquer de livres, de cartes maritimes et d’outils de navigation, et un bureau sur lequel était étalé un plan de la Baie.
Assis dans un fauteuil en cuir, derrière la table, un vieil homme était occupé à engloutir le contenu d’une bouteille de rhum. Il était la caricature même du pirate. La mâchoire carrée, une barbe drue lui tombant sur la poitrine, un nez cabossé, et un visage tanné par la vie, parsemé de petites cicatrices.
Pour compléter le tout, il avait même un cache-œil. Il ne lui manquait plus qu’une jambe de bois et un perroquet sur l’épaule.
Flint se leva et toisa les nouveaux arrivants.
-Alors c’est vous qu’mon second a fait monter ? Sans m’demander la permission, le corniaud ! Une bande de joyeux lurons à c’qu’il parait. La Flèche Blanche, le fameux Anor Kingsming et Shuzug Gro-Yargol. C’t’un honneur pour moi d’vous accueillir sur mon modeste navire, messeigneurs.
Le vieil homme éclata de rire et s’affala dans son fauteuil. Les trois hommes se regardèrent. Visiblement, il avait été bien informé.
-Comment me connaissez-vous ? demanda Shuzug.
-Du temps de la Grande Guerre, je bossais pour l’Empire, mon gars. J’faisais passer des caisses d’armes et des médicaments clandestinement, aux troupes de la Légion en stationnement sur la côte. Et de temps en temps, j’en faisais monter à bord et traverser les lignes ennemies. Tu t’souviens p’têt pas de ma trogne mais j’me souviens d’la tienne, garnement. Général Gro-Yargol, qui t’appelait. Moi j’t’appelais Gueule-Verte.
Shuzug écarquilla les yeux.
-E… Eron ? Eron la Canaille ? C’est toi ?
-Pour sûr que c’est moi ! Uns de mes noms d’emprunts, du moins. La barbe me change tant qu’ça ?
Flint se leva et Shuzug et lui se firent une forte accolade, comme deux amis qui ne se seraient pas vu depuis des années et qui se retrouveraient enfin par le hasard des choses. Roderick et Anor se regardèrent, perplexes.
-Euh, fit le jeune homme, vous vous connaissez ?
Shuzug se tourna vers lui.
-Lors d’une opération de ravitaillement, il y a des années, j’ai rencontré Eron… Enfin, Flint, comme il se fait visiblement appeler aujourd’hui. Moi et mes gars, nous étions en plein territoire ennemi et nous étions poursuivis, après une embuscade qui avait mal tournée. Eron a accepté de nous prendre à bord et de nous cacher dans des caisses qu’il faisait passer à la milice Altmer pour une simple cargaison d’épices. Il nous a ensuite ramener en Cyrodil. Sans lui, nous aurions été capturés, torturés et exécutés. Je lui dois la vie.
-Si j’m’étais attendu à t’revoir… Bah, pour la peine, le voyage est gratuit pour vous ! C’est une fleur que j’vous fais au nom du bon vieux temps.
-Nous vous en remercions infiniment, fit Anor en s’inclinant légèrement.
Flint cracha par terre.
-En revanche, il va falloir bosser, c’est moi qui vous l’dis. Si certains d’entre vous ont des connaissances en navigation, ils iront prêter main forte à mes gars. Les autres éplucheront des patates pour aider le coq, durant la traversée.
-Aucun problème, dit Shuzug. Nous n’avions pas l’intention de nous tourner les pouces de toute façon.
Et ainsi fut fait. Roderick, qui avait passé beaucoup de temps en mer avec son maître, possédait des bases qui lui permirent d’aller travailler avec l’équipage. Fenrir, de part son agilité et son aisance dans les airs, se vit proposer de rejoindre la vigie en haut du mât. Quant aux autres, ils vaquèrent à diverses occupations.
Ainsi, les premiers jours se déroulèrent sans problèmes. Leandrey passait ses journées à vagabonder sur le pont en grattant les cordes de son luth, afin de donner de l’entrain aux marins. Il n’hésitait pas à entonner des chansons paillardes, et l’équipage l’accompagnait de bon cœur.
Zemir, lui, avait décidé de continuer l’entraînement de Lynris.
Le Rougegarde et la Dunmer se réunissaient donc tous les jours, sous les yeux de Roderick, au centre du navire. Les marins, voyant cela comme un divertissement, formaient un cercle autours d’eux pour encourager Lynris.
-Allez petite !
-Ne lâche rien !
-Tu vas réussir à le toucher !
Lynris balança son poing en avant en haletant. Zemir lui saisit le poignet à la volée exécuta une brusque torsion de l’articulation avant de la faucher au niveau des genoux. La Dunmer vit le ciel et la terre s’inverser avant de s’écrouler violemment sur le sol.
Les marins éclatèrent de rire.
-Pour la technique, dit Zemir, tu progresses vite. Tu es vive, agile, et tu possèdes de bon réflexes, et tu as l’avantage d’avoir déjà reçu une formation au maniement des armes, à Helstrom. Cependant, tu manques encore de muscles. Il va nous falloir travailler cela.
Lynris grogna et se redressa d’un bond. Elle pivota sur elle-même et son pied fusa vers la gorge du Rougegarde. Celui-ci se décala légèrement sur le côté et esquiva l’attaque aussi facilement qu’il aurait évité un jouet lancé par un bambin.
Il répliqua d’un coup du plat de la main qui cueillit Lynris à la poitrine et la cloua au sol pour la deuxième fois en cinq secondes. Il n’y avait pourtant pas mis de force. Simplement… La frappe était parfaite.
Lynris se plia en deux et toussa, peinant à reprendre son souffle.
-Relève-toi. Sur un champ de bataille, on ne te laissera pas récupérer.
La Dunmer serra les dents et se releva avec difficulté. Les marins l’applaudirent. Elle s’élança, se remémorant les enchaînements les plus complexes que lui avait enseigné Zemir. Et les plus meurtriers. Avec lui, elle n’avait pas besoin de retenir ses coups, bien au contraire. Il lui avait lui-même ordonné de le frapper avec l’intention de le tuer.
« Coup de pied sauté à la tempe, atémis à la nuque, feinte sur la gauche, crochet du droit à la mâchoire, coup de genou au foie, pas chassé vers l’avant et direct à la gorge. »
Zemir para son coup de pied avec une facilité déconcertante. Il déplia sa jambe et son pied, tel un boulet de canon, partit vers son ventre. Lynris hoqueta sous le choc et posa un genou à terre, un filet de salive lui coulant le long des lèvres.
Le Rougegarde frappa dans ses mains.
-Allez, on se redresse ! Ce n’était qu’un coup de pied, d’une faiblesse ridicule, qui plus est. Tu aurais du pouvoir l’encaisser sans problème et répliquer.
-Je… Tu m’as cassé une côte !
-Baliverne. J’ai contrôlé ma force. Je sais faire mal sans faire de dégâts graves.
-Mais…
-Et même si tu avais une côte cassée, ce n’est qu’une blessure. Tant que tu n’es pas morte, tu peux te battre.
Lynris se releva, ruisselante de sueur. Zemir se remit en garde. Elle se força à inspirer profondément et à analyser la situation. D’un air calme, elle observa la position du Rougegarde dans l’espoir d’y trouver une quelconque faille.
Non, la garde de Zemir était parfaite. A moins que… Son genou était légèrement décalé, par rapport à son centre de gravité. Il ne rentrait pas dans son « cercle ».
« Si je frappe assez vite et assez fort, je peux lui briser la rotule. »
Les erreurs arrivaient même aux meilleurs.
La Dunmer bondit en avant, le bras en arrière et le poing fermé, comme si elle allait le frapper au visage, mais au lieu de cela, elle pivota au dernier moment et détendit sa jambe, son talon en avant. Un coup qu’elle avait répété des dizaines et des dizaines de fois.
Elle comprit une demi-seconde avant que le Rougegarde ne se mette en mouvement.
Sa garde était bel et bien parfaite. Son genou n’était qu’un appât. Il était dans son « cercle ». Un piège.
Avec une vitesse ébahissante, Zemir releva sa jambe, laissant le pied de Lynris passer en dessous et cogner le sol. Il fit volte-face et son poing sembla disparaître. Avec un bruit sourd, il percuta le menton de Lynris et la Dunmer recula en portant ses deux mains à sa bouche, un filet de sang coulant d’entre ses doigts.
Elle voyait flou et le monde semblait tourner autours d’elle.
Zemir se mit à la matraquer de coups, sans aucune pitié. De façon méthodique et précise, ne frappant qu’à des endroits spécifiques qui ne laisseraient pas de séquelles graves, et contrôlant sa force pour délivrer assez de douleur sans toutefois pousser son élève à s’évanouir.
-Relève ta garde. Esquive. Ton jeu de jambe, Lynris, ton jeu de jambe. Voila. Plus haute la garde. Pas comme ça ! Allez, réplique, ne laisse pas de temps mort. Bien. Esquive, je te dis ! Et surveille ton équilibre. Esquiver ne veut pas dire : Baisser sa garde, bon sang !
La leçon se poursuivit pendant trois heures, les trois plus longues de la vie de la Dunmer. Elle se laissa tomber au sol quand le Rougegarde annonça une petite pause, et qu’ils reprendraient leurs exercices en fin de journée.
Il s’éloigna. Elle resta étendue au sol, haletante, couverte de sueur et d’hématomes. Chacune de ses articulations la faisait souffrir le martyr, et ses muscles étaient en feu. Elle avait l’impression d’avoir toutes les côtes brisées et plusieurs dents cassées, mais elle savait très bien que Zemir avait veillé à ce qu’elle n’en est que l’impression, et uniquement l’impression.
Voyant que le divertissement était terminé, les marins s’éparpillèrent, non sans avoir félicité Lynris, et repartir vaquer à leurs tâches.
La Dunmer se redressa sur un coude et fit une grimace. Une ombre la recouvrit soudain. Elle leva la tête vers Anor qui la fixait avec un sourire.
-Alors jeune fille, tu progresses ?
-J… Aïe… J’espère. Sinon, cela voudrait dire que… Hm ! Que tout cela n’aurait servit à rien. Dis… Tu ne voudrais pas me soigner ? Un simple sort qui apaiserait mes courbatures ?
-Zemir est venu me voir, tout à l’heure, et m’a demandé que je n’en fasse rien. La douleur est une expérience à laquelle tous les apprentis du monde doivent goûter. Tu n’auras pas de traitement de faveur de ma part.
-Aïe… Je m’en doutais.
-Je comprends ce que tu ressens.
Lynris éclata de rire.
-Tu es un mage, Anor ! Et tu as étudié chez les Psijiques, non ? Je ne doute pas que ton cerveau ait été mis à rude épreuve pendant ta jeunesse mais tes muscles…
-Tu sais bien peu de choses sur moi, jeune fille. Bien peu de choses.
Il lui fit un clin d’œil et s’éloigna. La Dunmer sursauta quand Roderick lui posa la main sur l’épaule.
-Je t’ai fait peur ?
-Non.
-Qu’est-ce qu’Anor te voulait ?
-Pourquoi ça t’intéresse ?
Une sorte de distance s’était créée entre Roderick et elle depuis les récents évènements qu’ils avaient vécus. Il y avait toujours une certaine froideur dans sa voix quand elle s’adressait à lui, mais le Bréton ne sembla pas s’en rendre compte.
Il s’agenouilla à ses côtés et lança un regard méfiant vers le mage, à l’autre bout du pont.
-Tu ne devrais pas trop familiariser avec eux.
-Eux ? Qu’est-ce que tu veux dire ?
-Marang, Zemir, Leandrey… Anor.
-Et pourquoi, je te prie ?
-Parce que trop d’amitié entre vous rendra la séparation plus difficile.
-Hein ? De quelle séparation tu parles ?
Roderick fronça les sourcils.
-J’espère que tu n’as pas oublié que nos chemins se séparaient dès notre arrivée à Elsweyr. Bon sang, Lynris, je t’ai déjà dit que nos deux groupes partiraient chacun de leur côté. Je te rappelle que nous, nous devons contacter les Jikharys.
-Et eux ?
-Apparemment, combattre. Qui ? Ils ont été vagues à ce sujet. Mais tâche de garder à l’esprit que nous les quitterons dès que nous aurons posés un pied à terre.
-Ils pourraient nous accompagner.
-Non.
Roderick avait parlé d’un ton sec. Lynris le dévisagea.
-Ils ne nous gêneraient pas. Les sortilèges d’Anor sont très utiles, tout comme l’habilité au combat de Marang et Zemir. Et puis je commence tout juste à m’améliorer. Les leçons de Zemir vont bientôt porter leurs fruits, je…
-Dans ce cas, profite bien des dernières qu’il te reste. Le vieux Flint prévoit notre arrivée pour dans deux semaines.
Et sur ce, le Bréton se leva et s’éloigna à son tour. Lynris se redressa et grimaça à cause d’une douleur dans l’épaule. Soudain, le cri de la vigie retentit.
-Navire en vue !
génial comme d'hab et peut etre un combat de navire nous attend
Decidément tu n'arrive pas a faire de mauvais chapitre.Continue comme ca.
L'écriture est toujours aussi excellente (peut-être même mieux, moins de fautes qu'avant, toussa ). Pour les nouveautés du scénario, les compagnons du Rôdeur m'intriguent beaucoup...
Et une question, on reverra Adam et son compagnon argonien ?
Alors, quelque chose m'intrigue... C'est toujours aussi bon, un plaisir à lire, tout ça... Mais j'ai une question : le personnage de Corbeau me rappelle un autre perso, apparut dans une autre fic récemment (dont je tairais le nom). Ai-je raison de faire ce rapprochement ?
Si ça te gênes de répondre, ignore ce msg xD