Une pluie de titres issus des licences de Games Workshop s’abat sur le marché du jeu vidéo depuis une décennie. Les éditeurs, conscients du potentiel de Warhammer et de son pendant futuriste, les exploitent énormément et les adaptent à de nombreux genres vidéoludiques. Neocore, studio situé à Budapest en Hongrie, fusionne Hack'n Slash et Warhammer 40K au cours d’une inquisition impériale au nom évocateur : Warhammer 40.000 : Inquisitor - Martyr. Le Bolter de l’inquisiteur hurle son impatience.
Une purification par les flammes
Les forces de l’Imperium portent la sainte parole de l’Empereur aux confins de l’univers avec pour seul bouclier leur foi inébranlable en l’Empereur et pour moteur leur abnégation. Et pourtant, le secteur de Caligari tombe aux mains des hérétiques et les efforts de l’inquisition semblent vains face aux hordes impies du Chaos. Les troupes ayant prêté allégeance au dieu Nurgle ainsi que les autres races ayant succombé au “côté obscur” déferlent sur ces systèmes et les pervertissent. Un inquisiteur est envoyé sur le vaisseau Martyr afin d'enquêter et accessoirement faire le ménage. La purge va débuter.
Le Hack’n Slash n’est pas connu et reconnu pour ses prouesses scénaristiques. Ce genre privilégie davantage l’univers au détriment de la plume et conte ses récits par touches sans rarement en faire des caisses. Et le studio Neocore suit le mode d’emploi du parfait Hack’n Slash à la virgule près. Sympathique sur de nombreux points à commencer par sa fidélité au lore de Warhammer 40K, le scénario est avant tout un prétexte et se traverse la fleur au Bolter. Pourtant Inquisitor - Martyr ne se moque pas des forces de l’Imperium… loin de là… avec ses nombreux dialogues sous-titrés en français et ses cinématiques qui ponctuent une campagne scénarisée simplement plaisante. Mention spéciale tout de même à la bande-originale du jeu qui souligne habilement les actes de bravoure des inquisiteurs avec des pistes inspirées entre autres des péplum.
Warhammer 40,000 : Inquisitor Martyr est une invitation au voyage, un voyage brutal offrant une vision unique de l’univers. Le secteur de Caligari renferme plusieurs systèmes eux-mêmes composés de planètes, de vaisseaux et de stations à purifier. Côté dépaysement, cet Action RPG est une valeur sûre… du moins durant les premières heures de jeu. Les environnements varient d’une destination à l’autre, mais finissent par se ressembler par manque de renouveau. Et les quelques errements techniques rencontrés ne rendent pas justice au travail des artistes. Néanmoins, les décors reposent sur une architecture gothique torturée et une ambiance apocalyptique désabusée, et cela fera plaisir aux fans. La fidélité à la licence est tel que cette adaptation transpire Warhammer 40K par tous les pixels. Certes, ce Hack’n Slash accuse un retard indéniable visuellement parlant, mais égaye l’aventure en l’illuminant d’effets visuels et de gerbes de sang pour un rendu global satisfaisant à défaut d’être saisissant.
La voie de l'Assassin
A vaincre sans péril...
… on triomphe sans gloire. Le Hack’n Slash est un genre codifié à l’extrême. Ses principaux représentants - à commencer par la saga Diablo, Grim Dawn et Path of Exile - s’articulent autour d’une ossature commune. Warhammer 40.000 : Inquisitor Martyr n’a pas pour prétention de réinventer la roue et suit les directives en bon petit soldat de l’inquisition avec sa suite de missions aux objectifs très peu variés et au déroulement on ne peut plus classique. Le jeu de Neocore se permet tout de même de sortir du rang à plusieurs occasions afin de coller à la franchise de Games Workshop. La multiplication des systèmes solaires et l’ajout de missions générées de manière procédurale traduisent l’ampleur du front et son évolution en temps réel. Le Chaos n’abdique jamais, et ce titre témoigne de cette force de caractère.
“Les ennemis de l’Empereur meurent !” sous les tirs nourris des forces de l’Imperium et Inquisitor - Martyr parvient à retranscrire toute cette brutalité lors des affrontements. L’inquisiteur débarrasse le monde de la corruption et abat son courroux sur les mutants, les traites et les ennemis de l’Imperium sans une once de pitié, mais doit être à l’écoute de ses sens. Le stress physique et mental se traduit en combat par une jauge de répression à surveiller de près sous peine de subir des pénalités (ralentissement, recul, KO, entrave…). Ce Diablo-like futuriste se caractérise également par l’utilisation presque systématique d’armes à distance et les développeurs s’appuient sur cette particularité dans le but de rafraîchir la formule en intégrant un système de couverture performant et vital.
Malheureusement, le bestiaire finit par tourner en rond et manque de profondeur. Démons du Chaos, rebelles et diverses monstruosités s’empalent sur la foi des inquisiteurs sans conviction. Ce manque de variété dans les ennemis n’est que la pointe émergée de l’iceberg. Warhammer 40.000 : Inquisitor - Martyr souffre d’un mal ancestral touchant particulièrement les Hack’n Slash… la répétitivité. Le titre de Neocore se limite lui-même à un rituel redondant fait de couloirs, de salles et d’arènes à purger du Chaos lors de missions calquées les unes sur les autres. Bon point cependant, la difficulté est au-rendez vous et défie les amateurs du genre, malgré une courbe d’apprentissage parfois retorse
Un Hack'n Slash se juge sur la durée et donc son “End game”, cette course au loot dans le seul but de dénicher l'item ultime. Warhammer 40.000 : Inquisitor - Martyr n'atteint pas la maestria d’un Diablo III, mais s'en sort avec les honneurs. Le tarot d'Uther et la génération procédurale de missions ouvrent ainsi les portes du farming contrôlé et du “theorycraft”, effet secondaire incontournable du genre. Quant aux fonctionnalités en ligne, celles-ci pimentent l'aventure. Cependant, cet Action RPG se démarque de la concurrence par son mode coopératif en ligne et en local (sur consoles uniquement) invitant les joueurs à explorer ensemble le secteur Caligari. En local, le second joueur incarne alors un avatar généré aléatoirement selon la classe choisie. Ne pas pouvoir charger son build via un compte Neocore entache quelque peu cette initiative sans la ruiner pour autant.
La voie du Psyker
Une Sainte Trinité inquisitrice
L’Action RPG se distingue de la concurrence par une gestion poussée à l’extrême du ou des héros. Et à ce petit jeu, Warhammer 40.000 : Inquisitor - Martyr déroule le tapis rouge devant les amateurs de personnalisation sans jamais nuire de près ou de loin à la franchise. Tout commence par la création d’un inquisiteur et par le choix d’une classe parmi les trois disponibles et d’une expertise (trois sous-classes respectives). Sans surprise, Neocore calque celles-ci sur les grands archétypes du genre avec son Croisé (Tank), son Assassin (Rogue) et son Psyker (Mage) sans jamais enchaîner le joueur à un build mal pensé en amont.
Pour ce faire, les designers ont attaché les compétences aux armes et aux équipements, et non à l’avatar lui-même. De plus, l’inquisiteur emporte avec lui deux sets d’armes et alternent à la volée selon les situations… une mécanique assez rare pour être notée et qui autorise les expérimentations. Il en résulte une montée en puissance flexible et accessible du héros. Et si les armes sont centrales, l’amélioration des inquisiteurs passe aussi par un gain d’expérience débloquant de nouvelles aptitudes et attributs via plusieurs arbres de compétences. Un grand classique du genre, aucunement novateur dans le cas présent, mais maîtrisé.
Trois classes, trois gameplay, une destinée commune. Warhammer 40.000 : Inquisitor - Martyr se contente d’un nombre limité de classes au profit d’une évolution moins archétypale de l’avatar et d’une expérience in-game très différente selon le type de héros choisi. Neocore met ici l’accent sur la maîtrise du Croisé, de l’Assassin et du Psyker ainsi que l’imagination des joueurs pour concevoir des inquisiteurs toujours plus puissants et dévastateurs. Le manque de variétés dans les armes et les pouvoirs laisse un léger goût d’inachevé à l’heure de faire les comptes.
La générosité de Warhammer 40.000 : Inquisitor Martyr n’est pas remise en cause. Des centaines d’items classés par niveau de rareté et des milliers de combinaisons étourdiraient les joueurs de Hack’n Slash les plus obstinés. Et pourtant, la gestion de l’inventaire s’avère d’une facilité déconcertante. En effet, Neocore a intégré plusieurs fonctionnalités pour vider les coffres du vaisseau Martyr. Une Forge pour recycler et fabriquer, un marchand pour acheter et revendre… l’Imperium ne lésine pas sur les moyens afin de repousser le Chaos et met à disposition des joueurs ces modules à bord de votre vaisseau.
Points forts
- Une adaptation fidèle de la franchise Warhammer 40.000
- Trois classes aux gameplay différents
- Une formule revisitée du Hack’n Slash
- La création et la personnalisation des Inquisiteurs
- Un mode coopératif online (et en local sur consoles de salon)
- Une aventure sous-titrée en français (VOSTFR)
Points faibles
- Un scénario prétexte
- Une expérience répétitive après une vingtaine d’heures de jeu
- Un retard technique face à la concurrence
Le projet de Neocore faisait saliver les fans de Warhammer 40.000 depuis son annonce. La fusion naturelle entre le Hack’n Slash et la franchise de Games Workshop laissait entrevoir une croisade au nom du loot et de l’inquisition. Et Inquisitor - Martyr remplit parfaitement sa mission, non sans heurts. Cette aventure épique souffre d’une technique en dents-de-scie et d’une répétitivité inhérente au genre. Quand bien même, cette nouvelle adaptation est une offrande faite à l’Empereur et aux joueurs de par sa fidélité au lore et la générosité dont il fait preuve.