Sorti d'on ne sait trop où mais fort d'une campagne Kickstarter modeste mais réussie en décembre 2013, Hand of Fate promettait dès son arrivée en phase bêta un curieux mélange de construction de deck, d'aventure inspirée de jeu de rôle papier et de combats en 3D. Ce concept intriguant né de l'esprit du studio australien Defiant Development bénéficie aujourd'hui d'une version définitive, l'occasion idéale pour savoir si l'étrange recette se déguste sans déplaisir.

Hand of Fate vous place dans la peau d'un aventurier, vous-même, qui s'assoit à une table en face de laquelle un mystérieux homme voilé vous invite à partir à la découverte de votre destin. La première chose que l'on peut concéder à Hand of Fate, c'est de savoir mettre en œuvre un vrai sens de l'atmosphère, qui plonge immédiatement le joueur dans une sorte d'aura nimbée de mystères. Ajoutez à cela une bande-son discrète mais soignée et un doublage impeccable du maître de jeu et vous poserez les premiers jalons d'un jeu nettement plus prenant qu'il en a l'air.

Un bref tutoriel vous présentant les rudiments du jeu plus tard et vous voilà arrivé en plein cœur de l'aventure, avec pour seule possibilité au départ de jouer le mode Histoire, le mode Infini n'étant débloqué qu'une fois un certain palier de votre partie atteint. Pas de personnalisation de personnage, pas de points de talent à répartir. Si l'on pourrait penser de prime abord que ces absences nuisent à la profondeur du jeu, vous prendrez vite conscience qu'il s'agit simplement pour Hand of Fate de vous proposer de jouer tel que vous joueriez sans avoir à vous retrancher derrière un avatar. Et il faut reconnaître que cela fonctionne très bien.

Une avancée dans l'esprit "Jeu de rôle papier"

Votre aventure commence par la construction de votre deck. Vous avez le choix d'un nombre limité de cartes à embarquer, réparties entre deux catégories différentes. La première d'entre elles concerne l'équipement de votre alter ego : arme, bouclier, casque, talismans, bref tout ce qui constitue le kit du parfait explorateur. La seconde catégorie concerne quant à elle les différentes rencontres et événements que vous pourrez affronter au gré de la volonté du maître de jeu. Une fois votre deck constitué, votre mystérieux guide introduit ses propres cartes et vous invite à commencer votre périple.

Comment se passe donc une partie de Hand of Fate ? D'une manière très simple en réalité. Le mode Histoire est divisé en plusieurs zones et la progression au sein de chacune d'elles se fait par l'intermédiaire du déplacement de votre pion sur des cartes posées face contre table, donnant au plateau un air de carte de donjon rudimentaire. Chaque carte se dévoile une fois votre personnage posé dessus, et son contenu peut autant être issu d'une carte choisie pour votre deck ou les cartes distribuées par le maître de jeu. C'est là le premier élément intéressant de Hand of Fate : les situations sont assez variées, et les cartes de type « rencontres » vous poseront régulièrement face à des petits scénarios contenant des choix aux conséquences parfois désastreuses. L'esprit jeu de rôle papier est assurément bien retranscrit et chaque nouvelle carte s'apparente à une avancée vers l'inconnu assez grisante. Votre but est alors de trouver la sortie du plateau, de franchir « l'étage » supérieur pour finir par terrasser le boss imposé par l'homme aux cartes.

Bien évidemment, qui parle de « boss » ou de « donjon » parle nécessairement de combats et ce ne sont pas eux qui feront défaut à vos parties de Hand of Fate. Les affrontements prennent d'ailleurs une forme inattendue lorsque l'on sait que l'évolution dans le jeu ne s'était jusqu'à présent faite qu'au travers de cartes. Dans de nombreux cas, votre route croisera celle de brigands, d'hommes-rats et autres créatures fantastiques qui seront la plupart du temps belliqueuses. Le maître du jeu tirera alors des cartes aléatoirement, chacun des signes y figurant symbolisant le nombre d'adversaires que vous aurez à affronter. C'est alors que la phase de combat en 3D commence.

Un système de combat emprunté aux Batman Arkham

Vous vous trouvez propulsé dans une arène. Les différentes cartes qui symbolisent votre équipement (arme, bouclier, heaume, etc.) sont modélisées et prennent vie sous vos yeux, à l'instar de vos adversaires. Vous prenez alors le contrôle de votre avatar qui pourra attaquer et parer s'il dispose des objets adéquats, esquiver ou encore utiliser des compétences spéciales s'il est équipé de la carte correspondante. Si nous devions décrire assez simplement le système de combat de Hand of Fate, nous le comparerions les yeux fermés à celui, solide, que l'on connaît dans la saga des Batman Arkham. Ainsi, les affrontements reposent sur un système de contres qu'il faudra lancer au bon moment, lorsqu'un adversaire aura au-dessus de sa tête une icône symbolisant l'imminence de son prochain assaut. Si votre timing est bon, votre combo de coups n'est pas rompu et vous pouvez continuer à avoiner dans la joie les différents ennemis. Si le système a déjà fait ses preuves, ne vous attendez pas néanmoins à retrouver la vélocité de Batou ici. D'une certaine lourdeur et confus faute à une caméra parfois malhabilement placée, les combats de Hand of Fate ne constituent pas les phases de jeu les plus agréables, d'autant qu'ils sont nombreux.

Rationnement obligatoire

Ls arènes étant certes relativement différentes, les techniques de combat varieront sensiblement puisqu'il sera parfois intéressant d'exploiter les différents pièges qui jalonnent la zone pour pouvoir grignoter des points de vie à l'ennemi. Toutefois, la facilité relative des affrontements et leur courte durée permet de passer outre les lourdeurs et de se concentrer sur le reste. Une fois sorti victorieux de votre combat, et selon les situations, le maître de jeu tirera parfois pour vous des cartes bonus, vous donnant des équipements issus de votre deck mais également des cartes de nourriture, élément déterminant de la bonne tenue de votre aventure. En effet, à chaque déplacement, votre avatar consomme une portion de nourriture et est soigné entre 5 et 10 points de vie. Toutefois, si vos denrées arrivent à 0, vos prochains mouvements vous coûteront pas moins de 10 points de vie, élément cruel et excitant pouvant tout simplement vous coûter la vie, la mort étant synonyme de retour à la case départ de votre aventurier.

Pour vous réapprovisionner, vous pouvez compter sur quelques marchands ambulants que vous aurez parfois la chance de croiser sur votre chemin. En échange de quelques pièces d'or (gagnées en combat ou suite à quelques éléments de scénario), vous pourrez acheter les précieux sésames, vous soigner ou encore acheter de l'équipement supplémentaire. Il en ira ainsi jusqu'à la fin du jeu, chaque palier étant marqué par un boss final. Heureusement, à chaque boss vaincu, votre héros gagne des améliorations permanentes, qui affectent par exemple la vitesse de ses déplacements ou la capacité de ses attaques. Cela ne sera pas de trop, compte tenu du fait que la difficulté s'accroît nettement en fin d'aventure.

Par ailleurs, une fois le boss de niveau terrassé, le maître de jeu reviendra sur vos faits d'armes ainsi que sur les différentes décisions prises au cours de votre progression, et vous distribuera de nouvelles cartes qu'il sera alors possible d'intégrer dans la construction du deck utilisé dans le niveau suivant. L'intérêt de Hand of Fate se renforce alors puisque vous ne connaîtrez les effets des nouvelles cartes que si vous choisissez de les intégrer dans votre deck d'une part, et si vous avez la chance de tomber dessus au cours de votre progression d'autre part. C'est à ce moment que la capacité d'addiction de Hand of Fate se veut plus prononcée, puisqu'on a rapidement qu'une hâte : débloquer de nouvelles armes et dévoiler les événements qui se cachent derrière les nouvelles cartes « rencontres ».

Ces cartes sont effectivement souvent prétexte à vous confronter à certaines situations qu'il vous faudra gérer différemment selon vos envies, votre audace et vos besoins. Allez-vous choisir d'explorer cette grotte dans laquelle vous avez vu un objet briller ? Allez-vous passer votre chemin lorsqu'un homme vous demande de la nourriture ? La plupart des choix que vous prendrez auront des conséquences directes : ils pourront vous mener à l'affrontement, au gain de certaines cartes et à bien d'autres situations de bonus / malus à la diversité assez conséquente. De plus, certaines cartes sont assorties d'un petit pictogramme. Celui-ci indique qu'en fonction de la manière avec laquelle vous traiterez la situation, un bonus en fin de partie pourra ou non vous être octroyé. Cela peut ainsi vous conduire à prendre des risques si votre jauge de vie est par exemple un peu faiblarde. En somme, vous serez confronté à des configurations de parties systématiquement différentes et c'est aussi là que se crée l'envie de continuer encore et toujours Hand of Fate.

Un jeu plaisant manquant de profondeur

Alors finalement, qu'est-ce qui empêche Hand of Fate de passer du rang de petit jeu sympathique à celui d'excellent jeu ? Plusieurs éléments en réalité. Tout d'abord, nous l'avons évoqué plus haut, le jeu souffre de quelques soucis de caméra et d'une maniabilité nettement trop rigide pour le système de combat qu'il adopte. Les affrontements sont très nombreux et il arrivera au bout d'un certain temps de pester lorsque vous constaterez que votre prochain mouvement consistera en un combat contre une dizaine d'adversaires voire davantage. En outre, si globalement l'interface est réussie, la navigation entre les cartes est assez imprécise si vous avez le malheur de jouer au clavier, l'utilisation du pad est donc fortement recommandée.

L'aventure de Hand of Fate s'apprécie davantage par petites sessions de jeu

Mais davantage que ces menus défauts, c'est dans son absence globale de tactique que Hand of Fate commet sa principale erreur. En effet, qu'il s'agisse d'affrontements ou de progression dans l'aventure, l'avancée dans l'histoire de Hand of Fate finit par se faire en mode automatique, la construction de deck ne consistant plus qu'à tenter de découvrir toutes les cartes sans qu'il soit vraiment nécessaire de se pencher sérieusement sur une stratégie particulière. Les combats reflètent plutôt bien ce point puisqu'ils sont tout de même diablement bourrins, en dépit des quelques petites variantes introduites par les pièges dans les arènes. De ces éléments découle une grande répétitivité passé les premières heures de jeu et ce n'est pas le mode Infini, qui vous permet de jouer en boucle sur différents plateaux, qui viendra rectifier le tir, bien au contraire.