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News jeu Quand les personnalités du jeu vidéo se lancent dans Kickstarter
Profil de K-miye,  Jeuxvideo.com
K-miye - Journaliste jeuxvideo.com

Ces dernières années, bon nombre de projets de jeux vidéo ont commencé sur des plateformes de financement participatif. Mais certains se font plus remarquer que d’autres, notamment quand l’initiative provient d’une tête connue de l’industrie. Tim Schafer, Peter Molyneux, Koji Igarashi… ils se sont lancés dans des campagnes sur Kickstarter, pour le meilleur, comme pour le pire.

Quand les personnalités du jeu vidéo se lancent dans Kickstarter

Nous faire revivre un grand moment du jeu vidéo

Quand les personnalités du jeu vidéo se lancent dans Kickstarter

Cela ne vous a sans doute pas échappé, un alléchant projet de J-RPG du nom de Eiyuden Chronicle : Hundred Heroes a vu le jour sur Kickstarter le 27 juillet. Outre ses visuels qui semblent indiquer le bon avancement de son développement, il sort aussi du lot grâce à son équipe composée notamment de certains des créateurs de la mythique saga des Suikoden, ou d’autres grands RPG de l’époque PlayStation 1 et 2. Pour ce nouveau titre, Yoshitaka Murayama ( le créateur de Suikoden, II et III s'occupe de la partie scénaristique, le chara design est confié à Junko Kawano (Suikoden, Suikoden IV, Arca Last), le directeur concepteur est Osamu Komuta (Suikoden Tierkreis , Suikoden Tactics , Arca Last), le directeur artistique Junichi Murakami (Castlevania : Aria of Sorrow , OZ) et les compositeurs Michiko Naruke (Wild Arms ) et Motoi Sakuraba (Tales of ). Ce beau casting a déjà permis au projet d’empocher 2,3 million d’euros depuis plus d'une semaine, dépassant ainsi l’objectif de financement initial fixé à 434 679 euros.

Quand les personnalités du jeu vidéo se lancent dans Kickstarter

Mais étions-nous inquiets ? Pas le moins du monde. Généralement, quand d’anciens créateurs de jeux mémorables reviennent sur le devant de la scène en proposant un nouveau titre par le biais de plateformes de crowdfunding, les passionnés se montrent prêts à soutenir un tel projet. Et encore plus si la promesse se présente comme la suite spirituelle d’un grand jeu. Suikoden aura donc, nous l’espérons, son hommage tout comme Castlevania l’a eu avec Bloodstained : Ritual of the Night . En effet, la campagne participative de ce dernier, démarrée en 2015, a atteint 5,5 millions de dollars. Le projet a réussi à attirer les foules grâce à un nom : Koji Igarashi. Le CV de l’homme a de quoi impressionner : assistant-réalisateur sur Castlevania : Symphony of the Night et producteur de tous les épisodes de cette série depuis Castlevania : Harmony of Dissonance jusqu’à Castlevania : Harmony of Despair en 2010. Résultat, les fans n'ont pas été déçu puisque Ritual of the Night est un bon metroidvania, très imprégné de Symphony of the Night et généreux en fan service. Le seul petit bémol se trouve du côté des graphismes et des animations qui n’arrivent pas à la cheville de ses inspirations, mais rien qui n'entâche dramatiquement l'expérience de jeu.

Quand les personnalités du jeu vidéo se lancent dans Kickstarter

Pour citer un autre exemple de réussite, Thimbleweed Park a rapidement lui aussi réuni une importante somme sur Kickstarter en 2015. La campagne rapporte 629 250 dollars sur les 375 000 demandés. Le succès s'explique par la présence de Ron Gilbert, connu pour avoir écrit les incontournables Maniac Mansion , The Secret of Monkey Island et Monkey Island 2 : LeChuck’s Revenge . Thimbleweek Park nous promet un point and click à l’ancienne, ni plus ni moins. Sorti sur de nombreuses plateformes en 2017, le titre répond aux attentes : bien écrit et drôle, il va même plus loin que le simple hommage, en nous faisant nous interroger sur la place de l’auteur dans un jeu vidéo.

Quand avoir un nom ne suffit pas

Quand les personnalités du jeu vidéo se lancent dans Kickstarter

Cependant, avoir un bel historique derrière soi ne suffit pas toujours pour produire un titre exceptionnel. Parfois, les créateurs s’emballent et déçoivent. Prenons l’exemple de Keiji Inafune. Il s’est fait connaître chez Capcom en travaillant sur de célèbres licences comme Mega Man . Ces références rassurantes convainquent le public. En 2013, le Kickstarter de son jeu Mighty N°9 atteint rapidement ses objectifs en l’espace de quelques jours. Le futur titre se présente comme une suite spirituelle des aventures du Blue Bomber. Toutefois, en 2015, les joueurs commencent à s'inquiéter : Keiji Inafune démarre deux nouveaux projets sur Kickstarter liés à une nouvelle licence nommée Red Ash, alors que Mighty N°9 ne cesse d'être repoussé. Les joueurs ont l'impression d'avoir été dupé et n'ont plus confiance en Inafune : ils n'ont plus envie de réinvestir dans un autre de ses projets et les campagnes pour Red Ash se soldent par des échecs cuisants. En 2016, Mighty N°9 sort et sa réception est mitigée : oui, il ressemble à Mega Man, mais nous ne retrouvons pas tout le génie d’un bon level design, qui a fait le succès de cette série culte. Preuve en est qu'il ne suffit pas d’avoir un nom pour réussir.

Les développeurs à découvert

Quand les personnalités du jeu vidéo se lancent dans Kickstarter

Avoir un nom connu est une bonne publicité pour se lancer dans une première campagne de crowndfunding. Néanmoins, cela expose aussi les équipes de développement. Tim Schafer en sait quelque chose. Connu pour son travail chez LucasArts dans les années 90, il prospère grâce à son studio Double Fine avec des titres totalement loufoques tels que Psychonauts ou Brütal Legend . En 2012, il lance sur Kickstarter « Double Fine Adventure », un jeu qui promet d'être dans la même veine que Monkey Island. Les fonds dépassent leurs espérances : le Kickstarter ferme le 13 mars 2012 avec plus de 3,3 millions de dollars. La petite équipe estime que le développement s’effectuera entre six et huit mois. Malheureusement, rien ne se passe comme prévu et Double Fine Adventure, devenu entre temps Broken Age , prend du retard. Contre toute attente, le format épisodique est choisi et une version bêta fermée de la première partie de l’œuvre débarque d’abord sur Steam. La promesse n’est pas honorée, mais les cadeaux se multiplient pour les joueurs dont un documentaire, qui a été réalisé avec le supplément d’argent reçu. Ce dernier lève le voile sur le parcours chaotique du développement : l'équipe a beaucoup souffert d'être si exposée. Les critiques se montrent parfois acerbes de la part des internautes qui ne se gênent pas pour prendre à partie les créateurs sur les réseaux sociaux, comme l’explique Tim Schafer dans un article paru dans The Guardian : « Je pense que l’équipe ressent une certaine pression. (...) Vous êtes exposé à des gens sur Twitter, où il y a des personnes vraiment anti-financement participatif qui disent des choses méchantes sur les personnes de l’équipe. (...) Cela peut faire des ravages. » La première partie de Broken Age sort en 2014 et reçoit un bon accueil. Les joueurs devront cependant attendre plus d'un an pour obtenir la suite et conclusion.

Un peu (beaucoup) de mauvaise foi

Quand les personnalités du jeu vidéo se lancent dans Kickstarter

Si nous pouvons croire en la bonne foi des créateurs qui utilisent les plateformes de crowndfunding, certains se servent de ce type de financement comme d'un appât pour pêcher les gros éditeurs. En montrant à quel point l'aura d'un jeu peut être puissant chez le public, les développeurs tentent d'attirer leur attention. Nous avons eu un cas d’école que nous ne sommes pas prêts d’oublier : Shenmue III . Annoncé en grande pompe pendant la conférence pré E3 2015 de Sony, le Kickstarer demande aux joueurs de réaliser leur fantasme en passant à la caisse, aveuglément. Son créateur Yū Suzuki ainsi que Ys Net et Shibuya Productions remplissent leur objectif en récoltant 2 millions de dollars en moins de 24 heures, sans surprise. La campagne s’arrête le 18 juillet 2015 avec 6,33 millions de dollars lui décernant le prix du jeu vidéo le plus financé de l’histoire de Kickstarter. Cependant, Shenmue III reste encore à l’état de rêve un bon moment à cause de ses nombreux reports. Le temps du développement attire les foudres du public : nous nous souvenons de l’accueil très critique du premier trailer qui laisse entrevoir une réalisation très datée, pas digne de la génération actuelle et pas non plus à la hauteur de l’investissement des fans. La goutte d’eau qui fait déborder le vase arrive en 2017 : Deep Silver rejoint la production du jeu en renfort et en devient l’éditeur. Sans cela, il n’y aurait pas eu d’open world selon Yū Suzuki. Soyons honnêtes, il s’agissait avant tout pour Yū Suzuki de se faire remarquer par un éditeur assez fortuné pour réussir un projet trop ambitieux pour un simple financement participatif. Un développement donc houleux et des méthodes pour le moins discutables, qui laissent un goût amer chez les fans qui ont mis la main au portefeuille pour aider un projet aux allures d'indépendant. Le titre sort finalement en novembre 2019 et ne rencontre pas le succès critique escompté.

Des promesses ou des paroles en l'air ?

Quand les personnalités du jeu vidéo se lancent dans Kickstarter

Les promesses sur Kickstarter doivent être impactantes pour attirer les joueurs et les investisseurs afin de rassembler un maximum de fonds. Mettre des étoiles dans les yeux, c’est bien souvent le moyen de procéder pour faire la publicité de son projet. Peter Molyneux l’a vécu et le raconte dans une interview donnée à Techradar. Très déçu par son expérience avec Godus s’il devait revenir en arrière, il ne débuterait pas avec une campagne sur Kickstarter. Il le ferait dans un second temps, après avoir déjà bien avancé dans le développement de son titre. Ce serait un moyen pour s’assurer de garder le contrôle sur son projet et satisfaire rapidement les joueurs. Molyneux n'avait pas grand chose à montrer quand il a lancé sa campagne. Il n'avait que de belles promesses dont celle de réinventer Populus. Mais pendant le développement, les donneurs se sont insurgés de voir l'arrivée de gemmes payantes, ce qui n'était pas du tout prévu lors du pitch de départ. Le créateur a compris qu'il ne faut pas prendre de risques en promettant monts et merveilles sans être sûr d’atteindre ses objectifs. Une leçon dont aurait peut-être besoin un certain Chris Roberts et son jeu Star Citizen...

Quand les personnalités du jeu vidéo se lancent dans Kickstarter

Connu pour la série Wing Commander , Chris Roberts créé son studio Cloud Imperium Games en 2011 et évoque pour la première fois son envie de réaliser Star Citizen . Pour lever des fonds, le projet se retrouve sur un site dédié et sur Kickstarter. Les promesses du jeu sont faramineuses : une campagne solo et un MMO de simulation spatiale et de science-fiction. De quoi laisser rêveur… de longues années. Cela fait maintenant huit ans que Star Citizen est en cours de développement et continue de ramasser de l’argent ici ou là. Aujourd’hui, il s’agit du budget le plus cher connu de l’histoire de l’industrie vidéoludique (338 millions de dollars au total, dont plus 2 000 000 sur Kickstarter) avec il y a peu un dernier investissement de trois investisseurs privés. A titre de comparaison, il dépasse les 278 millions de dollars de GTA V. Depuis 2013, ceux qui ont acheté le jeu peuvent jouer en early access sur Steam. La version alpha 3.8., disponible depuis décembre 2019, comporte beaucoup de problèmes comme des crashs, ainsi qu'un niveau de contenu encore très faible. En mai 2020, l’évènement Invictus Launch Week, proposait l’achat de vaisseaux limités et qui, à l’heure actuelle ne sont toujours pas terminés ! Et cela fonctionne, les joueurs continuent de dépenser pour un titre qui n’a aucune date de sortie et qui pourrait nous faire languir encore longtemps.

De plus, il existe une polémique au sujet du développement qui pourrait expliquer pourquoi nous pouvons rester méfiants quant à sa finalisation. Une enquête de Forbes a révélé que celui-ci était compliqué à cause du projet bien trop ambitieux et un budget très mal géré. L’argent fondrait rapidement alors qu’en l’état, il semblerait qu’il n’y ait pas eu de véritables grandes avancées sur le développement. Certains anciens employés ont évoqué ce problème de gestion financière, mais aussi de management des équipes. Chris Roberts serait très pointilleux sur tous les détails et ferait ralentir l’évolution du travail. C’est un risque à prendre en compte quand un projet émane d’une forte tête, venant de créer son propre studio : il porte le regard d’un père sur son enfant et paraît bloqué dans sa vision.

Des projets abandonnés ?

Quand les personnalités du jeu vidéo se lancent dans Kickstarter

D’autres jeux n’ont toujours pas vu le jour malgré les engagements pris. Sur Kickstarter, celles et ceux qui investissent ne peuvent se retourner contre les créateurs qui ne tiennent pas leurs promesses et délais. Et des projets tombés dans l’oubli, ce n’est pas ce qui manque. Prenons deux exemples. En 2013 «Project Phoenix » fait saliver les amoureux du J-RPG en réunissant du beau monde : Hiroaki Yura (Diablo III , Valkyria Chronicles ) en tant que créateur, réalisateur et producteur, accompagné du compositeur Nobuo Uematsu (Final Fantasy ), le game designer Vaughan Smith (L.A. Noire ), le directeur artistique Kiyoshi Arai (Final Fantasy III , XII et XIV ), pour n’en citer que quelques uns. Autant dire que l’annonce d’un tel jeu n’est pas restée inaperçue, récoltant ainsi plus d’un million de dollars. Ce que nous attendions comme le renouveau du J-RPG ne nous a cependant plus trop donné de nouvelles. Sur la page du Kickstarter, les dernières informations remontent à mars 2019, expliquant que la petite équipe travaillait sur des projets différents et que de nouvelles têtes allaient reprendre un peu les choses en main, dont Taluya Suzuki (Blizzard Entertainment) et Erasmus Brosdau (Crytek). L’envie de tout recommencer à zéro viendrait de l'idée de proposer des graphismes plus modernes.Mais mis à part cela, c’est le silence radio. Rien n’a été présenté pour nous rassurer sur l’avancée du développement si ce n’est un concept art très proche de ce que nous avions déjà vu.

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Dans d'autres cas, l’équipe vole en éclat. C’est ce qui est arrivé au projet du Tactical-RPG Unsung Story : Tales of The Guardians . En 2014, le Kickstarter du jeu explose et doit beaucoup au nom de Yasumi Matsuno (Final Fantasy Tactics , Vagrant Story , Final Fantasy XII). Le titre devait initialement sortir en 2015, mais la date se voit repoussée. Le studio Playdek fait face à une crise financière et doit se séparer d’une partie des employés en 2016. Le naufrage est rattrapé par Little Orbit l’année suivante. Les nouvelles se font rares même si la société se veut rassurante pour une sortie en 2021. Seuls quelques visuels nous ont été présentés. Affaire à suivre donc, en espérant que les équipes de Matsuno ne quitteront pas le navire.

Une chose est sûre : avoir un nom dans l’industrie du jeu vidéo fait rapidement lever des fonds sur les plateformes comme Kickstarter. Nous faisons confiance à des talents qui ont déjà fait leurs preuves par le passé, mais c’est également un risque de mettre plus ou moins à nu le travail des développeurs. Si certains réussissent à honorer leurs promesses, d’autres se montrent décevants. Compter sur le financement participatif quand on se lance dans le développement d’un titre trop ambitieux n’est parfois pas la meilleure des méthodes. Les erreurs doivent aussi servir de leçons pour tous ceux qui choisissent le crowdfunding : il vaut mieux avoir un projet solide, réalisable et déjà avancé avant de promettre la lune.

Commentaires
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G7K G7K
MP
Niveau 10
le 18 août 2020 à 14:26

Le Kickstarter est toujours un pari mais c'est aussi ça qui est excitant.

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