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News culture Les autres terres du jeu vidéo : l'Australie d'hier et d'aujourd'hui - Interview d'un pionnier
Profil de Ayden_,  Jeuxvideo.com
Ayden_ - Journaliste jeuxvideo.com

Si certaines thématiques d’articles sont établies en avance, il arrive parfois que le hasard nous conduise vers des sentiers inattendus. Pour comprendre, il faut remonter à quelques semaines en arrière. Un soir, votre serviteur, empli de nostalgie, feuilletait un magazine du début des années 1990 et il est retombé sur un jeu de son enfance : Tom et Jerry sur Game Boy. Ce platformer, fruit du studio Beam Software, est né pendant la période émergente du jeu vidéo australien et le pays a donné naissance à des œuvres marquantes au cours des années suivantes. Malheureusement, son secteur vidéoludique, autrefois prolifique, s’est écroulé et tente, depuis quelques années, de retrouver sa grandeur d’antan. Que vient faire la cartouche Game Boy dans l’histoire, nous direz-vous ? C’est justement en remontant à l’équipe en charge de Tom & Jerry que nous avons pu entrer en contact avec l’un de ses développeurs, Simon Hart. Ce concepteur, natif d’Angleterre, a débuté sa carrière à la fin de la génération NES / Master System et a vécu de l’intérieur l’ascendance et l’effondrement de l’industrie australienne au début des années 2000. À travers son témoignage, vous allez découvrir l’envers du développement de jeu vidéo durant plusieurs générations de consoles en Océanie. Préparez-vous au combat à coup de pastèque et à un florilège de jeux qui devraient vous rappeler quelques souvenirs.

Les autres terres du jeu vidéo : l'Australie d'hier et d'aujourd'hui - Interview d'un pionnier
Les autres terres du jeu vidéo : l'Australie d'hier et d'aujourd'hui - Interview d'un pionnier
Simon Hart est l'un des pionniers de l'industrie du jeu vidéo en Australie.

Terre de beauté et de contrastes, l’Australie a longtemps été une place importante du jeu vidéo. On l’oublie souvent mais des productions majeures, comme la licence Bioshock (2K Boston a travaillé en duo avec 2K Australia), le thriller L.A. Noire ou le peinturluré de Blob , proviennent de ce territoire majestueux. Pour remonter à la genèse de l’histoire du jeu vidéo australien, il faut s’intéresser à un éditeur : Melbourne House. Fondée en 1978 par Alfred Milgrom et Naomi Besen, l’entreprise n’a pourtant pas débuté par la production et la vente de jeux vidéo. En effet, à l’origine, il s’agissait… d’un éditeur de livres.

À l’approche des eighties, le duo élargit sa gamme et commence à proposer des guides informatiques. Les ventes sont satisfaisantes et les deux compères décèlent, peu à peu, le potentiel de ce marché émergent. Afin de démarquer son activité littéraire de ses travaux vidéoludiques, Melbourne House ouvre une antenne dédiée appelée Beam Software. Absolument culte dans le pays, le studio est un peu à l’Australie ce qu’est Ultimate Play the Game (dont découle Rare) en Angleterre. À partir de 1981, Milgrom et Besen obtiennent les droits de l’œuvre de J.R.R Tolkien, The Hobbit, et produisent une adaptation éponyme sur ZX Spectrum. Il s’agit d’un jeu d’aventure textuel avec quelques images mais le succès traverse les frontières et rencontre un succès énorme, particulièrement en Europe. Beam Software se fait un nom et poursuit son activité en recrutant de nouveaux programmeurs. C’est ainsi que naissent la série Horace sur ZX Spectrum ou encore l’excellent The Way of Exploding Fist sur Commodore C64. Au milieu des années 1980, l’entreprise doit faire face à une nouvelle concurrence (Strategic Studies Group, Micro Forté…) mais parvient à garder la confiance des joueurs, notamment grâce à des franchises comme Le Seigneur des Anneaux, Astérix ou encore Retour ver le Futur. À cette période, Simon Hart est bien loin de se douter de sa future destination. Il raconte :

Je n’ai jamais imaginé une seule seconde que je travaillerais dans l’industrie du jeu vidéo mais, bien sûr, j’étais obsédé par les jeux depuis la découverte d’une machine de type PONG, quelque part en 1978 ou 1979. Le premier ordinateur que j’ai vu, c’était un Vic 20 que le père d’un pote avait acheté. J’ai finalement eu un ZX Spectrum (modèle 48k). En Angleterre, d'où je viens, il y avait un certain écart social entre ceux qui détenaient un Speccy (les enfants de familles modestes) et les autres qui possédaient un Amstrad C64 (les gosses de familles riches !). Personnellement, je ne connaissais personne qui avait un C64 mais mes amis et moi copions frénétiquement des jeux ZX Spectrum sur nos magnétos. Comble de l’ironie, le premier jeu que j’ai lancé sur ma machine était « Horace Goes Skiing », un titre produit par… Beam Software. Je jouais beaucoup aux classiques de cet éditeur (Way of the Exploding Fist, The Hobbit, etc.) et je n’ai jamais pensé, qu’un jour, je travaillerais avec les créateurs de ces œuvres. Ça m'a scotché quand j’ai rencontré ces gars.

Au début des années 1990, le jeune garçon obtient son diplôme de design graphique à l’université et s’imagine galérer un peu pour trouver un poste. C’est pourtant tout le contraire qui se produit.

Cela faisait une semaine que j’étais au chômage quand j’ai vu une annonce dans un journal local. J’avais alors un Amiga 1000 et j’avais fait beaucoup de dessins, comme ça pour le plaisir, et je suis donc allé à l’entretien avec un assez bon portfolio. J’ai obtenu le poste facilement. J’étais l’un des plus jeunes employés à l’époque.

BEAM SOFTWARE

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Désormais employé chez Beam Software, Simon Hart débute en tant qu’artiste junior sur des jeux NES et Master System. Il n’intervient que subrepticement en dessinant quelques sprites et n’est même pas crédité sur ses premiers titres. Il détaille :

Je suis arrivé à Beam à la fin de la génération NES/Master System donc mes premiers jobs consistaient à terminer certaines parties de ces jeux. Le premier jeu auquel j’ai participé de bout en bout était Tom & Jerry sur Game Boy. C’était un jeu vraiment excellent à concevoir car je travaillais avec un programmeur très expérimenté appelé Bill McIntosh. Ce monsieur a ensuite créé le studio Torus Games et un autre jeune programmeur, qui s’appelle Dave Theodore, est arrivé peu de temps après. Il fait d’ailleurs toujours des jeux aujourd’hui. Nous étions une grande équipe et sommes devenus des amis très proches. Quelqu’un avant moi avait commencé Tom & Jerry mais j’ai supprimé tous ses croquis et j’ai recommencé. Je me souviens lorsque j’ai contrôlé Jerry, le premier sprite que j’ai dessiné, j’étais ravi ! Au début de ma carrière, lorsqu’on travaillait sur des franchises cinématographiques, ça allait car nous avions au moins le titre et un synopsis de base. Mais parfois, nous faisions le jeu à l'aveugle, sans aucun élément matériel. Cela a changé avec le temps.

Le premier jeu de Simon Hart
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C’est en nous intéressant aux crédits de Tom & Jerry que nous sommes parvenus à contacter l’interlocuteur de cet article. Sorti en 1992, Tom & Jerry est un jeu de plate-forme très sympathique paru sur Game Boy dans un premier temps et réadapté plus tard sur Game Boy Color. Bien que linéaire et très classique dans son genre, l’aventure offre des environnements variés et un gameplay qui ne manque pas de charme. Jerry doit retrouver son cousin et éviter Tom qui se cache derrière certains éléments du décor. Ville, parc, toits, maison, salle de bain, salon, garage… les pièges sont très nombreux et le rongeur, avec sa petite taille, peut exploiter son environnement. Il peut ainsi utiliser des monte-plats, entrer dans des gouttières, nager, glisser sur les rampes d’escalier… Il s’agit du premier jeu conçu par Simon Hart en tant qu’artiste.

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Et il a quelques secrets à livrer :

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Le cartoon a clairement été une inspiration. Dans le dessin animé, vous pouvez retrouver chacun des thèmes du jeu : le salon, la ville, le parc, la salle de bain, etc. Beaucoup des idées amusantes proviennent des deux programmeurs, Bill ou Dave, qui se sont amusés avec le code. Par exemple, je me souviens que le programmeur principal a utilisé l’animation de Jerry, lorsque celui-ci glisse sur la rampe d’escalier, et qu’il l’a simplement codé dans le jeu. Pour notre plus grand plaisir. Certaines idées sont également venues de notre designer James qui avait, généralement, besoin de « quelque chose pour faire quelque chose » et nous avons trouvé un visuel pour camoufler la dynamique de gameplay. C’est le cas, par exemple, des couvercles de bouches d’égout dans la rue. Le designer avait besoin d’une méthode pour empêcher que le joueur ne triche, en poussant simplement son pad vers la droite. Nous avons trouvé cette technique pour résoudre le problème. Beaucoup de mécaniques ont ainsi été trouvées. À l’époque, nous voulions vraiment dissimuler nos noms dans le jeu. Dans Tom & Jerry, vous pouvez trouver un panneau « Home Sweet Home » qui tombe des murs. Si vous mettez le jeu en pause au moment où il touche le sol (ce qui correspond à une seule étape d’animation), il est écrit « Bill Simon David ». L’idée était de cacher ceci sans qu’ils s’en rendent compte, c’est ce que nous avons fait !

Les premières années de Simon Hart sont rythmées par la création de jeux sur différents supports. Outre Tom & Jerry et sa suite Frantic Antics , l’artiste participe à l’élaboration d’un grand nombre de softs : Shadowrun (Super Nintendo), Mickey's Safari in Letterland (NES), Blades of Vengeance (Mega Drive), 4-in-1 Funpack : Volume II (Game Boy) ou encore… Radical Rex et True Lies . Ces deux dernières cartouches, parues sur plusieurs supports, ne sont pas restées dans les mémoires. Ni dans celle de Simon Hart…

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Au bureau, nous détestions tous Radical Rex. C’était une idée originale de Fred Milgroms, le boss de l’époque, et nous avions l’impression qu’il nous dictait la marche à suivre. Il nous a fallu des PLOMBES pour développer ce titre car nous redessinions sans cesse les illustrations. Je me souviens surtout que c’est à ce moment-là que mon goût pour le développement s’est estompé et je commençais à détester l’industrie ou, tout du moins, Beam. Pour True Lies, les jeux devenaient plus grands et plus complexes à réaliser, nécessitant toujours plus de monde. Et l’industrie cinématographique dictait constamment les règles à suivre, etc. En d’autres termes, c’était l’époque (et c’en est un bon exemple) où les « costards-cravates », à la place des joueurs eux-mêmes, menaient la danse. Je pense que cette tendance s’est dissipée car nous sommes maintenant dans une bien meilleure situation avec les jeux mais, à l’époque, il s’agissait de faire un film et de repomper le tout sous la forme d’un jeu. Et ce, peu importe que le thème abordé soit difficile à commercialiser ou non. True Lies était une plaie à développer. C’est comme si nous étions passés du côté artistique à l’aspect purement productif.

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DE L’ARTISANAT À L’INDUSTRIALISATION

Comme toute industrie naissante, le jeu vidéo australien a subi une transition assez brutale. Et on cerne d’autant plus le contraste lorsque l’intéressé explique cette évolution. Lors de son arrivée à Beam Software, il était à mille lieux d’imaginer dans quel endroit il mettait les pieds. En puisant dans ses souvenirs, notre interlocuteur donne une image assez précise de ce qu’était le studio à ses débuts. Et ce n’est vraiment, mais alors vraiment pas triste…

C’était principalement à cause des gens qui y travaillaient. C’était un panel d’excentriques, de nerds et de génies illuminés. Certains d’entre eux avaient le syndrome d’Asperger et ils avaient d’autres problèmes mais c’étaient souvent de véritables génies. Je peux vous dire, ça n’était pas politiquement correct, les gens s’envoyaient des obscénités à travers le bureau – c’était un endroit un peu macho à vrai dire. Quasiment que des hommes ! Le premier jour, ils m’ont montré mon bureau et m’ont expliqué que le gars qui était là auparavant avait été viré car il n’en glandait pas une. Une autre fois, l’un des programmeurs a eu une énorme dispute avec un manager. Après le déjeuner, il est revenu avec une pastèque (qu’il a probablement acheté durant la pause-déjeuner). Il est entré dans le bureau du personnel et il a commencé à frapper tout le monde avec sa pastèque ! Le fruit a explosé, il y en avait partout… et bien évidemment, le manager en était couvert. Il n’a pas été viré à cause de ça mais il y avait apparemment pas mal de vas-et-viens.

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L'équipe de Blades of Vengeance, Simon Hart en bas à droite.

Nous avions également un hobby qui consistait à frapper des balles de golf depuis le balcon pour les envoyer dans les tramways dans la rue, lorsque les portes s’ouvraient. Ce qui m’a le plus étonné, c’étaient les heures de travail. Quand j’ai commencé, on allait déjeuner au pub tous les jours, nous y restions des heures et, parfois, on ne revenait même pas au bureau ! J’ai commencé à prendre du poids car le plat de base, le midi, était un steak/frites. Ah oui, je me souviens aussi d’autre chose. Lorsqu’un nouveau jeu arrivait au bureau, on fermait les logiciels et on y jouait, tous les jours, pendant au moins une demi-journée ou alors on regardait quelqu’un terminer le jeu. Nous avions vraiment des champions du pad – l’un des programmeurs senior avait véritablement un don. Il pouvait battre n’importe qui, il était incroyable à regarder. Étrangement, ses mains tremblaient mais dès qu’il prenait la manette, il devenait solide comme un roc. Je me souviens, quand Wolfenstein est sorti, nous n’avons pratiquement pas bossé pendant deux semaines. Mais, malgré tout, on a réussi à créer de grands jeux malgré cette culture laxiste et ça allait aussi dans l’autre sens – parfois, je quittais le bureau très tard dans la nuit.

Si l’on se base sur ce témoignage, on comprend dès lors que Beam Software avait tout de l’endroit animé et même un brin foufou, un peu à l’image de ce qu’était le milieu du jeu vidéo à ses débuts. Et forcément, comme toute entreprise qui se respecte, il a fallu un moment que le tout soit plus encadré et plus professionnel. Le problème, c’est que la transition fut beaucoup trop brutale et Simon Hart en garde un mauvais souvenir. Il précise :

La culture d’entreprise a changé plusieurs fois, mais elle est toujours restée assez ouverte. En ce qui me concerne, les meilleurs moments ont été les premiers jours, où je n’avais pas du tout l’impression d’aller bosser. Et puis, à mesure de l’agrandissement du studio, l’ambiance « entreprise » s’est peu à peu installée jusqu’à arriver au schéma classique de l’emploi de bureau. Je rejette profondément l’arrivée du « Human Resource Dept », le service des ressources humaines, qui a totalement détruit la culture du fun et de la créativité pour transformer le tout en un job lambda. Beaucoup des anciens employés n’ont pu y couper et on s’est retrouvé à accepter des heures strictes, à obéir à des ordres débiles et ainsi de suite. C’étaient des gens dont le but était d’inventer des règles et rien de plus. Je me souviens de mon arrivée et de l’apparition du HR – c’est le jour et le nuit, tout a changé. Ce n’était plus amusant.

LE RETOUR DE LA LIBERTÉ

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Lassé par une culture d’entreprise qui impose trop de règles, Simon Hart choisit de quitter l’entreprise de ses débuts et rejoint, en 1997, une entreprise qui monte : Tantalus. L’homme, qui a gravit les échelons au fur et à mesure des années, se présente comme un lead artist (artiste principal) expérimenté. Un bagage qui va se traduire par des adaptations d’exception sur Saturn, Manx TT Superbike et surtout The House of the Dead .

C’était avec Tantalus Entertainment. J’ai quitté Beam Software (en raison de tout ce que j’ai expliqué auparavant) et j’ai rejoint Tantalus. Il est bon de préciser que Tantalus a été fondée par des ex-employés de Beam qui en avaient ras le bol du marketing et voulaient revenir au plaisir de la création des jeux. Je n’ai pas fait grand-chose sur Manx TT (j’ai conçu l’interface du jeu) car ils terminaient le développement quand j’ai rejoint le studio. En revanche, The House of the Dead, c’était vraiment mon bébé. C’était un jeu génial à créer et nous avons vécus d’excellents moments. Nous avons imaginé une technologie vraiment incroyable pour adapter ce jeu d’arcade sur Saturn et cela a fait sensation chez SEGA au Japon. Je suis allé là-bas et j’ai rencontré l’équipe qui a réalisé le jeu original en arcade – l’un des moments forts de ma carrière. Je suis très fier de ce jeu car les gars de SEGA pensaient que c’était irréalisable sur une telle machine.

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Pour expliquer comment on a pu atteindre ce but, il faut se remettre dans le contexte. Oui, au début, The House of the Dead semblait être un défi de taille car il s’agissait d’un grand jeu. Mais nous l’avons abordé en nous concentrant sur l’importation des données originales du jeu d’arcade, par la suite passées à la moulinette de nos convertisseurs. L’une des premières choses que nous avons remarqués, c’est que la plupart des textures du jeu étaient strictement les mêmes, avec de simples changements de teintes pour créer différentes variations. Alors, on a créé un outil pour regarder toutes les textures sur une grille. À partir de là, nous avons déterminé la couleur de la texture à appliquer sur les polygones. Cela nous a permis de passer toutes les textures en noir et blanc et de les multiplier sur la couleur adéquate. Nous avons ainsi pu nous débarrasser de toutes ces centaines de textures dupliquées. L’équipe avait également d’autres outils pour convertir les données dans un format propriétaire du studio, etc. Nous étions arrivés au point où vous pouviez prendre un niveau de la machine d’arcade, le transposer sur notre outil-maison pour ensuite l’afficher, en quelques minutes, sur Saturn. Concrètement, cela a permis aux artistes du studio de se consacrer quasi exclusivement aux éléments qui ne fonctionnaient pas trop ou qui étaient trop complexes en polygones. Les têtes de chaque personnage, notamment, ont dû être remodelées manuellement car elles étaient trop denses (en polygones). En ce qui concerne la visite chez SEGA, c’était génial ! Il s’agissait de ma première fois à Tokyo. On a eu une visite guidée des locaux et j’ai été un peu surpris par la chaleur étouffante et la foule. Le toit était vraiment bas et il y avait des gens partout qui essayaient de se rafraîchir avec des ventilos. Si mes souvenirs sont bons, les bureaux étaient divisés en quatre zones principales et chaque section était assignée à une tâche. Nous avons également eu la chance de découvrir le département technique où étaient inventées les machines d’arcade. C’était également un privilège de rencontrer les développeurs des jeux de SEGA que j’aimais. Une fois notre visite terminée, nous sommes sortis pour une nuit festive en ville et avons profité d’un repas traditionnel japonais avec beaucoup de saké !

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Le retour de la liberté s’accompagne de moments agréables. Simon Hart profite de sa collaboration avec SEGA. Son aura auprès des entreprises ne passe pas inaperçue et il apprend, entre temps, que son ancien employeur, Beam Software, a changé de politique d’entreprise. En 1998, Simon Hart travaille sur l’un des tracés du jeu Dethkarz puis, un an après, Beam Software est racheté par Infogrames. Il se remémore :

J’étais de retour à Beam. C’était bien car il s’agissait d’une nouvelle vague de succès pour le studio. Nous étions à nouveau une équipe soudée avec une bonne mentalité et nous avons fait de très bons jeux. J’étais content qu’Infogrames nous ait achetés car je pense que nous aurions fait faillite. Ils ont crû en nous et nous ont donné un second souffle.

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Avec l’apport d’Infogrames, Beam Software, malgré quelques productions remarquées sur PC, souhaite retrouver son lustre d’antan. L’année 2000 est ainsi marquée par deux jeux sur Dreamcast, deux jeux aux contours fort différents : 24 Heures du Mans , un superbe jeu de course arcade se déroulant sur le célèbre tracé de la Sarthe, et le cartoonesque Looney Tunes Space Race . À cette époque, nombreux sont les studios australiens à s’atteler à la réalisation d’adaptations sur consoles portables et les développements sont rarement ambitieux. Ce n’est donc pas rien de se retrouver à concevoir un épisode de la licence Test Drive (Test Drive Le Mans en dehors du continent européen) et un jeu mettant en scène les personnages des Looney Tunes. Simon Hart se souvient très bien de ces jeux :

J’étais artiste / directeur artistique sur Space Race et j’ai trouvé la tâche assez difficile. Ce n’est pas simple de diriger une équipe d’artistes aussi grande (je pense que nous étions environ une douzaine). La Dreamcast était une machine très agréable à exploiter – bien plus que la PlayStation 2. Mon amour des personnages de Looney Lunes a fait que je me suis passionné pour ce travail et j’ai tout fait pour leur rendre justice. Je pense que c’était un excellent jeu. En ce qui concerne les 24h du Mans, il a été développé par une autre équipe et je n’ai, peut-être, aidé que sur certaines parties. Fondamentalement, Beam (devenu Melbourne House) était divisé en deux équipes de développement (l’équipe A et l’équipe B, elles avaient d’autres noms mais je ne m’en souviens plus). L’équipe A était en quelque sorte l’équipe star (Le Mans) et l’équipe B était l’équipe annexe (Looney Tunes). Mais nous avons partagé nos technologies, fait des jeux intéressants et la compétition entre les deux staffs était très saine.

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Au mois de janvier 2001, SEGA annonce la fin de production de la Dreamcast. La machine va vivoter quelques mois avant de passer le flambeau aux PlayStation 2, Gamecube et Xbox. De 2002 à 2004, Simon Hart travaille sur Men in Black II : Alien Escape et Transformers .

Men in Black était un jeu amusant à créer. Je pense, qu’à ce moment de ma carrière, je m’intéressais davantage à créer des environnements en 3D plutôt qu’à réaliser le travail d’un lead artist, c’était un intérêt naturel pour moi. J’ai conçu des mondes pour Men in Black ou encore Transformers. Il s’agissait de grands jeux avec de grandes équipes, et nous avions une bonne culture d’entreprise. Nous avons eu beaucoup de fous rires, nous étions fiers de ce que nous faisions. Nous étions heureux.

UNE INDUSTRIE À BOUT DE SOUFFLE

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Prolifique dans les années 1990, le jeu vidéo australien a vu l’émergence de différents studios aux quatre coins du pays (Ratbag à Adélaïde, Torus Games et Auran à Brisbane, Tantalus et Blue Tongue à Melbourne, etc.). Dans la continuité, de grands groupes (Irrationnal Games, The Creative Assembly, THQ…) ont ouvert de nouveaux studios en Australie et rien ne présageait la chute vertigineuse qui allait se dessiner, doucement mais sûrement, vers 2005. Durant les premières années du nouveau millénaire, de nombreux changement sont intervenus dans l’industrie du jeu vidéo, la faute notamment à des coûts de production de plus en plus élevés. Cette période, teintée de banqueroutes, redressements judiciaires et rachats, n’a pas été simple à vivre pour les employés du secteur. En plus de cette instabilité, de très grands groupes, à la recherche d'actifs, s’apprêtaient à engloutir tous les petits studios (et pas seulement en Australie, Vivendi a fait la même approche avec No Cliché en France par exemple). Beam Software n’a pas échappé à tous ces changements. En 2000, l’entreprise entre dans le giron d’Infogrames et redevient, comme un clin d’œil au passé, Infogrames Melbourne House puis, en 2003, Atari Melbourne House (Infogrames ayant fusionnée avec Atari la même année). En 2006, c’est au tour de Krome Studios de s’emparer de l’entreprise, comme le rappelle Simon Hart :

Pour autant que je sache, c’est simplement parce que quelque chose est arrivé à Infogrames. Je pense qu’ils ont fait faillite ou quelque chose du genre. Soudainement, nos emplois se sont retrouvés menacés et Krome est intervenu pour sauver nos fesses. Je leur en suis reconnaissant, même si la transition a été brutale pour nous. Il y a eu un choc culturel désagréable – à vrai dire, ils nous détestaient et nous les détestions. Ils utilisaient des outils, des méthodes complètement différentes et avaient une culture d’entreprise stricte, à l’opposé de ce que nous connaissions et nous obligeaient à tout faire de leur façon. Je sentais qu’ils étaient condescendants et arrogants. Beaucoup de gens de Beam ont démissionné mais j’ai décidé de rester puis, au fil du temps (c’est-à-dire deux ans), cette confrontation culturelle s’est lissée et est devenue correcte. Au moment où l’industrie s’est effondrée, nous allions vraiment bien.

Krome Studios

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Krome Studios est fondé en 1999 par Robert Walsh, Steve Stamatiadis et John Passfield. Cette compagnie est notamment connue pour sa série Ty : Le Tigre de Tasmanie et prépare actuellement un remake sur les consoles du moment (qui sera, très probablement, une adaptation améliorée du remaster PC sortie en 2016). Elle est aussi à l’œuvre sur un remaster de Wasteland .

À l’époque, Simon Hart travaille sur un certain Test Drive Unlimited . C’est en effet son équipe qui s’est chargée des adaptations PlayStation 2 et PSP du jeu d’Eden Games. En tant que senior artist, notre interlocuteur n’a pas chômé.

C’était un jeu qui était techniquement impressionnant car nous avions, je pense, une équipe de programmation incroyable. Il y avait également une équipe entière qui se consacrait uniquement aux améliorations technologiques et à la conception des moteurs. Mon travail sur Test Drive Unlimited était de concevoir l’intérieur des voitures et il me semble que j’en ai fait une soixantaine, c’est quelque chose de fou. C’était assez méditatif car il s’agissait d’un exercice purement technique, comme le fait de modéliser quelque chose pour qu’il soit le plus précis possible. Il s’agissait de moments amusants même si, le travail en lui-même, était fondamentalement peu créatif.

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Transformers : La Revanche sera son dernier jeu. Nous sommes alors en 2009 et l’industrie australienne du jeu vidéo, malgré la puissance de certaines œuvres (Bioshock), est à bout de souffle. En plus de ne pas profiter du soutien du gouvernement (qui ne se gêne pas, en plus, pour censurer voire interdire de nombreux jeux), elle a subi de plein fouet la crise financière de 2008, comme l’explique l’intéressé :

En fait, la seule raison d’une « industrie » du jeu vidéo en Australie (à part Beam Software qui a débuté par la vente de livres) vient de la valeur du dollar australien par rapport au dollar américain. 65 cents australiens correspondaient à un dollar américain donc c’était moins onéreux de faire de jeux ici. Et puis la combinaison de la crise financière mondiale et de la hausse du dollar australien (qui a retrouvé la parité avec le dollar américain) a fait que cet avantage s’est évaporé très rapidement. Il n’y avait tout simplement plus aucune raison de voyager jusqu’à l’autre bout du monde pour la conception des jeux.

L’Australie avait également un avantage dont profitait les éditeurs américains mais qui, aujourd’hui, ne suffit plus : son fuseau horaire. Dans un dossier de l'ACMI (Australian Centre of the Moving Image) s’intéressant à l’histoire du jeu vidéo australien, Kevin McIntosh de Torus Games dit ceci :

L’avantage pour les éditeurs américains, c’est qu’ils peuvent envoyer leurs requêtes à la fin de leur journée, juste avant de rentrer chez eux. Entre le moment où ils dorment et retournent au bureau, le travail qu’ils ont demandé est effectué et ils ont la journée devant eux pour l’examiner. Nous sommes comme des elfes du jeu qui travaillent tard dans la nuit.

Simon Hart gardera à jamais les souvenirs de ces années en tant que développeur de jeu vidéo et de l’ambiance déjantée et insouciante de ses débuts.

La plupart du temps, les choses drôles étaient dues à la variété des gens de Beam. Je me souviens de notre petite section artistique. Au début, nous étions environ six personnes installéss dans des cabines cubiques où il suffisait de se lever pour voir par-dessus – et inexorablement, les mecs s’harcelaient à longueur de journée. C’était ridicule et hilarant. Il y a également certains trucs auxquels nous jouions. Au début de ma carrière, c’était une pure culture de nerds – j’aimais quand nous restions tous tard le soir à jouer à des jeux au lieu de rentrer chez nous. Ensuite, nous sortions dîner ensemble. J’ai dépensé une fortune dans des restaurants et des pubs, ce n’était pas bon pour ma santé. J’ai commencé chez Beam, j’étais maigrichon et 18 mois plus tard, j’étais en surpoids ! Tous mes collègues étaient des gens hilarants, des individus absolument uniques.

ET MAINTENANT ?

Les autres terres du jeu vidéo : l'Australie d'hier et d'aujourd'hui - Interview d'un pionnier
Les développeurs australiens ont résisté aux tempêtes et continuent d’œuvrer pour redorer l’image d’une industrie mise à mal. Et indéniablement, les choses changent. Le 6 mars 2020, l’Interactive Games and Entertainment Association (IGEA), qui représente l’industrie du jeu vidéo et informatique en Australie et Nouvelle-Zélande, a acquis les actifs de la Game Developers Association of Australia (GDAA), un organisme apportant des solutions de différentes natures aux studios. En fusionnant de la sorte, les deux entités vont permettre au jeu vidéo australien d’avoir plus de poids et elles ont d’ores et déjà annoncé la tenue du GCAP 2020, une conférence dédiée aux développeurs australiens ainsi qu’un espace de travail commun, l’Arcade, qui sera basé à Melbourne et permettra aux créateurs de coordonner leurs activités.

C'est un fait, le jeu vidéo australien retrouve des couleurs. Dans un article signé Tiraxa et publié en novembre dernier, on découvre ainsi que l’industrie du développement australienne a généré 143,5 millions de dollars, soit une hausse de 21% par rapport à l’exercice précédent. Si celle-ci ne représente qu’une infime part du marché mondial, elle est toutefois sur la bonne voie puisque 71% des studios confirment une croissance. L’article de Tiraxa met également en exergue une réalité dont on parlait plus haut : l’absence de soutien gouvernementale. Il est difficile de développer des jeux vidéo en Australie mais les studios ne lâchent rien et les chiffres prometteurs sont une bonne réponse aux barrières politiques. Il faudra sans doute encore un peu de temps pour que le pays retrouve sa fougue créative de la décennie 90 mais les signaux sont au vert. On ne peut que leur souhaiter le meilleur pour la suite. Simon Hart est maintenant bien loin de tout ça et il attend d’ailleurs un petit jeu (trois fois rien) actuellement développé en Pologne. L’occasion, pour nous, de lui laisser le mot de la fin :

J’adore la qualité de certains des jeux qui sortent ces derniers temps. J’adore les séries Far Cry , Skyrim … et je n’en peux plus d’attendre Cyberpunk 2077 . Mais je suis RAVI de ne plus avoir à les faire. Le business de cette industrie est trop grand, trop corporatif et trop instable à mon goût. Un jour, vous pouvez avoir une carrière et vous retrouver au chômage le lendemain – voilà l’industrie du jeu telle qu’elle est aujourd’hui.

SOURCES :

  • Interview de Simon Hart
  • Dossier de l'ACMI sur le jeu vidéo australien
  • Merci à Thomas de l'émission CGM (les origines de l'image de synthèse au cinéma) pour la précision technique
  • Joypad n°19
  • Consoles + n°20
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Commentaires
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MartoTMM MartoTMM
MP
Niveau 4
le 06 avr. 2020 à 11:29

Dossier intéressant, très diversifiant! Et merci pour les sources en fin d'article!

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