L'ombre maléfique

Sous Lige-feu se déployait la ville morte. La nouvelle Londo, comme on l’appelait, était maintenant le fief des fantômes. Les râles des carcasses aux alentours me déstabilisaient. Même mortes, elles étaient en proie à une souffrance extrême. L’état de fantôme constituait un pas de plus vers la déchéance totale. Je déambulai parmi ces êtres dont l’âme n’existait plus. La mienne s’était d’ailleurs fortement dégradée durant les dernières heures. Mes nombreuses morts avaient emporté à chaque fois une partie de ma personne, qui ne reviendrait plus jamais. J’étais affaibli, non par la force mais par l'esprit.

Et l’aspect de la ville souterraine n’arrangeait rien à cela. Je descendis la courte pente qui menait au ponton et en chemin je me demandai à plusieurs reprises ce que je faisais là. Le souvenir fugitif d’un prince à tuer occupait mes souvenirs. Mais il était si flou que je n’étais sûr de rien. Une forme s’agita devant moi. Je reconnus le chevalier qui m’avait parlé des cloches. Et là encore, ce souvenir remontait à des années dans ma mémoire. C’était d’ailleurs peut-être le cas. Je n’en savais rien. L’homme recula à mon approche. Son visage se décomposa. Et il était soudainement triste. Il se faisait menaçant alors que j’étais presque à sa hauteur. Il leva son épée tandis que la mienne lui rentrait dans les entrailles. Il poussa un soupir. Le dernier avant de rencontrer le sol. Je n’avais fait que me protéger. Ou peut-être…

L'invincible forteresse

Les planches pourries craquaient sous mes pieds. J’atteignis la ville et je reconnus la disposition des lieux, comme si j’y venais tous les jours. Des fantômes vinrent à ma rencontre. Tout comme le volcan, j’étais déjà venu ici. Chaque créature vaincue redoublait ma fureur. Je combattais comme jamais, faisant des moulinets pour exécuter plusieurs fantômes d’un coup. Mais pour chaque ennemi qui tombait, je me demandais aussi s’il n’était pas plus facile de tout laisser tomber. Tous ceux qui avaient ne fut-ce qu’un peu de vaillance m’avaient trahi ou avaient fini par sombrer dans la folie. Même ce serpent dont j’ai oublié le nom, c’était sûr.

Je passai par une sorte d’aqueduc qui me mena à une autre partie des ruines. Les fantômes m’assaillaient de tous les côtés mais j’eus raison d’eux. Je grimpai une échelle. Sur le toit de l’ancienne bâtisse se tenait un homme. Je m’apprêtais à le couper en deux quand il prit la parole :

— Je sais qui vous êtes. Vous êtes là pour tuer les quatre rois. Je suis leur veilleur mais je peux vous aider.

L’évocation des quatre rois éveilla quelque chose en moi. Il s’agissait de mon objectif à court terme et de la raison de ma présence dans ce lieu. J’accomplissais tout ceci afin d’approcher Gwen pour lui succéder. Et alors il ne tenait qu’à moi de raviver le Feu et dissiper la malédiction des carcasses. Si cela pouvait m’éviter d’en devenir une moi-même… J’épargnai le veilleur. Il pouvait m’être utile.

— Pour atteindre les rois, vous devrez vous rendre plus loin dans les ruines. Je garde sur moi le sceau qui empêche quiconque de passer.

Il me remit une clé que j’examinai un moment. Puis je la rangeai distraitement. Il poursuivit :

— Vous devez savoir que les Abysses sont un lieu interdit aux mortels. Cependant le chevalier Artorias a réussi à s’y pénétrer il y a longtemps. Vous pourrez peut-être apprendre de lui comment s’y rendre.

Il m’examina plus attentivement. Il avait l’air anxieux.

— Vous avez une sale mine, dit-il. L’air de la nouvelle Londo est impur pour la plupart des gens. Je vous conseille de ne pas traîner trop longtemps.

Je ne trouvai rien à répondre et je n’en avais de toute façon pas envie. Je hochai la tête et je repartis d’où j’étais venu.

Je cherchai une porte à ouvrir. Tout en explorant les environs, le courage me revint. Il m’était indispensable de me focaliser sur mon objectif. C’était le seul moyen de ne pas perdre la tête. Les cadavres étaient légion. Mes bottes étaient recouvertes d’ossements mélangés à un liquide visqueux. Je fis une moue de dégoût. L’air était glacial, plus encore que dans le cristal d’Anor Londo. Et une clameur sourde montait dans le lointain, sans jamais s’interrompre.

J’arrivai dans une salle dont le centre était un ascenseur. Mais le mécanisme qui le commandait était bloqué. Je n’insistai pas. Tout près, je trouvai une grille. Elle était verrouillée et le sceau s’adaptait parfaitement à la serrure. Je m’étais attendu à tomber sur une immense porte. J’étais quelque peu déçu. Juste derrière se trouvait une roue horizontale. Un levier servait à la faire pivoter. Je scrutai les alentours afin de deviner ce qu’il allait actionner mais la pénombre étant trop importante, je ne vis rien. J’actionnai le mécanisme.

Un énorme grincement me fit sursauter. Juste à côté de moi, la grande porte que j’avais espéré voir s’ouvrit. Je ne pouvais pas l’atteindre depuis ma position. Mais ce n’était pas grave car elle ne servait qu’à réguler le niveau d’eau. Une immense cascade passa par la porte et en un clin d’œil l’étendue d’eau qui inondait les ruines disparut.

Une danse avec les dragons

Je revins en arrière afin de constater le changement. L’ascenseur était débloqué. Je le fis monter à l’aide de son mécanisme puis je descendis. En bas je trouvai un tas de cadavres. Et un grand nombre de crânes jonchaient le sol. Pendant un moment je repensai à Nito et ses innombrables crânes. Mais j’étais loin des catacombes. Du moins c’est ce que je croyais.

Soudain surgit de l’obscurité un chevalier d’argent. Il possédait, en plus de son attirail de métal, des pouvoirs de mage. Il invoqua un bouclier d’ombre qui parait efficacement mes coups. Je l’envoyai rejoindre les corps d’une attaque bien placée dans le dos. Je me retournai pour continuer. Deux petits dragons bleus me tournaient le dos. Ils protégeaient l’accès vers l’extérieur. J’hésitai pendant un moment avant de me lancer à l’assaut.

Je me jetai sur le plus proche. Mon épée ébrécha ses écailles. Trois d’entre eux décollèrent et me bombardèrent d’électricité. J’évitai la majeure partie des projectiles tandis que mon bouclier dissipa le reste. Je tailladais de tous les côtés. Quand j’abattis les trois premiers, je m’occupai des autres. Je passai un pont tout en me battant. Et lorsque je jetai dans le ravin le corps du dernier monstre, je reconnus l’endroit. Il s’agissait de la vallée que j’avais déjà arpentée après être sorti du hameau souterrain.

Je fouillai les environs et j’allumai un feu dès que je le pus. Là, je sacrifiai une humanité pour redevenir humain moi-même. Le mal qui m’avait saisi dans la nouvelle Londo s’estompa quelque peu. Mon esprit redevint plus clair mais je savais que la chose était temporaire. J’étais ici depuis trop longtemps et la mort pesait sur mon âme à tout instant. Soit je trouvais Gwen et je ravivais le Feu dans les plus brefs délais, soit j’étais condamné à devenir une carcasse.

En sortant, j’aperçus le dragon qui m’avait chassé quelques jours plus tôt. Il était toujours accroché à la paroi, attendant sans doute une nouvelle proie. Sa seule vue suffit à m’énerver. Je ne pouvais décemment laisser vivre une créature qui m’avait tué… Je savais que je ne devais pas perdre de temps mais la vengeance n’attendrait pas.

Je me déplaçai lentement le long de la corniche. Je ne voulais pas lui donner le moindre signe de ma présence tant que ma lame n’était pas rentrée dans son crâne. Mais il me repéra tout de même. Le dragon inclina la tête vers moi. Il était à bout de force car il n’avait probablement pas quitté son perchoir une seconde. Il ouvrit la gueule et il vomit. L’odeur était pestilentielle. Je fis ce que je pus pour éviter de me prendre les pieds dedans. Lorsque je fus au contact, je m’acharnai sur sa patte. Si je pouvais lui faire lâcher prise, il s’écraserait en bas et mourrait.

Il éructa puis il lâcha une nouvelle fois son dernier repas. Sur moi cette fois. Je sentis un léger picotement, sans plus. Curieusement le vomi ne m’affecta pas beaucoup. C’était sûrement dû au fait que j’avais déjà subi largement pire à Lordran. Je me pris même à sourire lorsque je repensai au dragon béant qui lui aussi inondait de vomi la salle qu’il occupait. Tous les dragons du coin avaient des problèmes gastriques, quand ils ne me bombardaient pas de feu ou d’électricité.

Celui-ci balaya finalement l’air avec son autre patte. Le coup m’expédia contre la paroi derrière. Mon sourire me quitta aussitôt. Le dragon avait encore quelques ressources. Une attaque sautée mit fin au combat. Je lui sectionnai trois doigts et comme prévu il lâcha prise. Il s’écrasa au fond de la vallée. Je crachai, content d’en être débarrassé.

Le chaos

Je retournai dans la nouvelle Londo. Au niveau des cadavres, près des dragons, se trouvait une cabane ravagée. Une odeur de moisi s’en dégageait. La cabane donnait sur une construction de pierre adjacente, probablement un ancien château. Des chevaliers se trouvaient dans les environs mais je compris rapidement qu’ils étaient plus mages que chevaliers. Puis un cri rauque retentit et résonna. Une créature visqueuse se traînait sur le sol.

Elle déboucha sur le carrefour où je me trouvais. Elle était bien plus grande que les tas de boue qui se trouvaient dans les égouts du village. Il s’agissait ici d’une énorme masse gluante. Et tout comme Nito, elle était constituée de visages morts. Elle projeta un amas de matière, toute aussi gélatineuse qu’elle. Quelques coups d’épée en vinrent à bout.

Je fouillai les lieux. Des chevaliers se cachaient dans l’obscurité et en sortaient au dernier moment pour m’attaquer. Ils n’étaient heureusement pas très bons combattants. Des crânes volants me prirent en chasse. Je savais qu’ils mettaient quelques secondes pour exploser, aussi déjouai-je tous leurs pièges facilement.

Le donjon rouge

Je grimpai un escalier et je suivis un semblant de chemin qui devenait de plus en plus ténu jusqu’à se résumer à une fine corniche. De l’autre côté de la salle, un second escalier m’amena encore plus haut. Dans un coffre je trouvai une très grande braise. J’avais déjà confié à André les braises que j’avais trouvées mais aucune n’avait cette taille. Il serait content. J’hésitai même à la lui apporter tout de suite, car avec les braises précédentes il avait été capable d’améliorer sensiblement ma claymore.

Je décidai de retourner auprès du forgeron, dans l'espèce d'ancien donjon qu'il occupait. Je n’étais pas très loin de la forêt et il se trouvait lui-même au début de celle-ci. Lorsque je sortis la braise de ma besace, le visage du vieux forgeron s’illumina :

— Je n’avais jamais vu une telle braise. N’importe quel forgeron serait prêt à tuer pour en avoir une. Vous pourriez… Vous pourriez me la confier ? Vous ne le regretteriez pas.

Je lui donnai l’objet qu’il convoitait. Il l’examina sous tous les angles puis il le disposa parmi ses outils. Il m’arracha ma claymore des mains et me prit les quelques éclats de titanite que j’avais en ma possession. Il se mit au travail et après de longues minutes de martèlement assourdissant, il m’appela. La lame brillait de plus belle. Elle était entièrement nettoyée et redessinée. Je posai les doigts dessus et un froid mordant me saisit. André souriait en hochant la tête.

— Je peux faire encore mieux que ça. Mais il me faut une tablette de titanite. Si vous voulez que votre arme entre dans la légende, trouvez-en une et je vous forgerai la meilleure arme que j’aurai jamais faite. Il parait que vous pouvez trouver une tablette au Refuge. Bonne chance.

Il reprit son travail et m’ignora complètement. Retourner au Refuge… Je n’avais pas de temps à perdre mais d’un autre côté une arme fiable était aussi indispensable. Je retournai à Lige-feu. Le corbeau était toujours là et c’était le moyen de locomotion le plus rapide.

Un festin pour les corbeaux

Le corbeau était connu dans les environs et l’un des hommes de Lige-feu m’apprit comment arriver jusqu’à son nid. A l’aide des ascenseurs menant à la paroisse, j’atteignis une corniche en surplomb. A partir de là, je sautai sur une arche qui soutenait le temple de Frampt. Enfin, un escalier en partie éboulé conduisait tout en haut. Là se trouvait le nid. Je m’y roulai en boule. Intrigué, le corbeau s’éleva et quand il m’aperçut, il me prit dans ses serres. Le paysage défila à toute allure sous moi.

Après quelques heures, l’oiseau me lâcha là où il m’avait pris au Refuge.

Je pénétrai dans la salle où j’avais affronté mon premier démon. Ca faisait à peu près une semaine que j’étais mort et presque autant de temps que j’avais quitté le Refuge. Néanmoins une pointe de nostalgie emplit mon cœur. Le cours du temps à Lordran était altéré et ce n’était jamais aussi vrai qu’en ce moment. Quelque chose me faisait d’ailleurs penser que le Refuge avait changé entre temps. Des carcasses s’y promenaient librement. Peut-être était-ce dû au fait que j’avais tué le démon et donc le maître des lieux ?

Effectivement, quelque chose avait changé. Le sol se déroba sous mes pieds. Je me ramassai tant bien que mal quelques mètres plus bas. Le démon du Refuge était de nouveau là. Ou alors il s’agissait d’un autre, qui lui ressemblait en tous points. Il était coriace et sa manière de combattre était la même que celle du démon de feu que j’avais tué dans le volcan, près d’Izalith. Mon bouclier se révéla très efficace contre son immense masse. Mais les quelques explosions qu’il provoqua me brûlèrent la peau et m’arrachèrent chacune un cri de douleur.

Le monstre s’affala enfin. Le combat fut plus difficile que prévu. C’était lui qui possédait la tablette de titanite et c’est avec un soupir de soulagement que je la lui pris. Puis je regardai autour de moi. Des barreaux ressemblaient fortement à ceux qui jouxtaient le couloir de ma cellule. Ce démon était donc celui que j’avais aperçu lors de ma libération. Et le démon du Refuge que j’avais tué alors n’était pas le même. Bien. Savoir cela ne présentait finalement aucun intérêt.

Je passai par des barreaux cassés. La vue du couloir me remplit de tristesse. C’était là que j’étais censé reposer pour toujours… Je m’approchai de la cellule. Un chevalier noir me barrait la route. Je levai un sourcil car je ne m’attendais pas à en voir ici. Je le déchiquetai puis je pénétrai par la porte ouverte. Il y avait un cadavre, bien mort. Pendant une demi seconde je me pris à croire qu’il s’agissait de moi. Sans l’intervention du mystérieux chevalier, c’est le sort qui m’aurait été réservé. Sur le corps je trouvai une poupée. Plutôt bizarre de trouver un objet du genre ici…

Avant de m’en aller, j’explorai les environs. J’étais curieux de savoir ce qui avait changé depuis mon départ. Le chevalier qui m’avait aidé était de nouveau en vie. Mais il était devenu une carcasse. Il m’attaqua à vue et je le renvoyai à la mort. Le piège de la pierre dans l’escalier avait été remis en place. Je la pris de plein fouet. Ce n’était peut-être pas une si bonne idée de m’attarder ici finalement. Je retournai là où le corbeau m’avait largué. Il était temps de revenir à Lordran et d’en finir.

L'épée de feu

Je retournai chez André et je lui remis la tablette. Ses yeux étincelèrent. Il tint sa promesse et se remit à travailler sur mon arme. Il me la rendit, fier de son travail. La lame était encore chaude, imprégnée du feu de la braise. En clignant les yeux, je devinais des flammes qui virevoltaient autour. Le forgeron hocha la tête en guise de remerciement. Je m’en allai. Mais je me trompai de chemin. J’aboutis sur une petite plaine où résidaient des golems de cristal. Je reconnus l’endroit. C’était là que des trombes d’eau venaient de nulle part. Cette fois j’identifiai leur source : une immense hydre à plusieurs têtes se dressait dans un petit lac. Chaque tête buvait une énorme quantité d’eau qu’elle me projetait ensuite.

Quand j’étais trop proche pour me faire canarder, l’hydre m’attaqua avec ses dents. Toutes les têtes convergèrent vers moi et j’avais mon bouclier pour seul rempart. Lors de chaque attaque, l’hydre perdait une tête. Ma claymore était tellement bien aiguisée qu'elle était capable d'en couper une au vol. Le monstre ne fit pas long feu.

Plus loin je tombai sur un golem isolé. Je le tuai et il disparut. A la place se tenait une femme. Son nom était Brunante d’Oolacile et elle appartenait à un âge qui précédait le mien. Elle disparut après m’avoir dit que je pouvais l’invoquer. Je ne répondis pas, n’étant pas tout à fait sûr de ne pas être en proie à une hallucination. Je retraversai le lac en sens inverse et je grimpai une très longue échelle.

J’en pris encore une. Et je me retrouvai encore dans la forêt. Des arbustes m’attaquèrent. Mais ils étaient faibles. Seul leur grand nombre pouvait poser un problème. Je tombai aussi sur un groupe d’hommes. Mais ils étaient translucides. Ce n’étaient pas des fantômes. Du moins pas du même type que ceux de la nouvelle Londo.

Je les tuai tous. Puis, après être passé par une tour en ruine, j’arrivai dans un nouveau pan de forêt. Là j’aperçus deux nains. Mais en réalité, c’était autre chose. Il s’agissait de champignons qui se déplaçaient. Je m’interrogeai pendant un moment. Mais vu qu’ils ne m’attaquaient pas à vue, je me contentai de les suivre de loin. Cependant leurs parents — si on peut appeler ça comme ça — étaient hostiles. Les découper en tranches fut relativement facile.

Par après je rencontrai une créature nettement plus dangereuse. De loin on aurait dit un rat géant. Mais c’était bien plus que ça. La bête avait la grâce d’un chat, la tête d’un chien et le corps d’un rat. Alors que je venais de démarrer le combat, une créature similaire nous rejoignit. Et quand je tuai la première, une troisième s’ajouta. Je m’éloignai mais les monstres me rattrapèrent en roulant sur le sol. L’un d’eux m’écrasa au passage. Et je dus les affronter en me cachant derrière des arbres. Là ils ne pouvaient m’atteindre. A l’abri je les abattis sans problème.

Le bûcher d'un roi

Je poussai l’exploration plus loin. Je découvris une porte de l’autre côté d’un pont. Je la passai et je me retrouvai dans une grande clairière. Des tombes recouvraient le sol et chacune avait une épée plantée dans le sol. Au centre de la zone se dressait une tombe et une épée bien plus grandes que les autres. Je reconnus la lame d’Artorias, le chevalier légendaire, presque considéré comme un roi. Je la touchai mais à ce moment-là un énorme loup sortit de nulle part. Il grimpa sur la tombe et hurla à la mort. Il s’agissait certainement du loup et ami d’Artorias, Sif. Il saisit l’épée dans sa mâchoire et il la déracina. La lame se dota d’une lueur bleue bizarre.

Le loup faisait des bonds prodigieux. Je me demandai pendant un moment s’il ne voulait pas jouer tant ses mouvements faisaient penser à un chiot. Mais il maniait son épée de telle sorte qu’il était clair qu’il voulait me couper en deux. Quand il passait à ma hauteur, je lui infligeais des blessures au niveau des pattes, son ventre étant trop haut. Il faillit me tuer à plusieurs reprises. La première fois, il effectua un mouvement de va-et-vient rapide qui me projeta au sol. Puis avec ses pattes avant il tenta de m’écraser. Je roulai pour m’écarter, au dernier moment.

La seconde fois, il sauta tellement loin qu’il atterrit sur moi. Je n’eux pas le réflexe de l’empaler. Il m’avait emprisonné avec son corps et ses babines retroussées dévoilaient une série de crocs mortels. De la bave coulait sur mon visage. Heureusement mon casque était solide. Le loup le mordit et je sentis une pression énorme et soudaine sur ma tête. Il avait presque arraché mon casque. Du bout des doigts je parvins à bouger mon épée. Je lui fis prendre un peu de recul et je piquai le corps de l’animal. Il se releva d’un bond, effrayé. Je me remis debout et je me massai les muscles endoloris, le temps que l’ennemi se remette de sa surprise.

Sif reprit son épée. Mais à partir de maintenant je me montrai plus prudent. Et à force de m’acharner sur ses pattes, il finit par s’affaiblir. Il ne sautait plus. Il ne faisait que trotter mollement. Enfin il tomba, la langue pendante. Ses pattes étaient couvertes de sang et des mares étaient visibles çà et là. Je soupirai. Le loup possédait un anneau que je reconnus. C’était celui du chevalier Artorias, réputé pour être capable de faire traverser les Abysses à son porteur…

La loi du régicide

Je retournai à la nouvelle Londo, à l’endroit où j’avais rebroussé chemin. Je descendis quelques marches. Je cherchai un chemin dans l’ombre. Les chevaliers étaient de plus en plus nombreux et des fantômes se joignaient à eux. J’entendais aussi des bruits menaçants. Plus j’avançais, moins j’étais rassuré. Je combattis un groupe d’ennemis. Et lorsqu’ils furent tous morts, un monstre gluant fit son apparition. Je l’abattis également.

Plus loin, je passai une porte. Un immense escalier en colimaçon se déployait à perte de vue. Je fis une pause à la moitié. Puis je repris la marche, me demandant quand l’escalier finirait. Soudain, l’ombre m’envahit complètement. Il faisait aussi noir que dans les catacombes. Je venais d’atteindre les Abysses, ça ne faisait aucun doute. Je glissai l’anneau d’Artorias à mon doigt et je fis un pas en avant.

Mon pied ne rencontra aucune marche. Je tombai simplement dans le vide. La chute me parut interminable et déjà je sentais qu’une partie de mon âme se faisait aspirer. Mais quand je rencontrai le sol, je ne mourus pas. J’étais dans l’obscurité la plus totale. Je ne voyais même pas sur quoi reposaient mes pieds. C’était comme si je flottais dans l’air tout en marchant sur un sol bien dur. Il n’y avait rien d’autre que l’ombre autour de moi. Du moins je ne pouvais rien discerner. Seul un message sur le sol témoignait du passage d’un étranger d’un autre monde.

Puis de l’ombre surgit une lueur. Elle était de couleur argent et tirait légèrement sur le bleu. Une silhouette se dessina. Elle portait des habits en haillons, de même qu’une épée ébréchée. Elle flottait également mais curieusement j’arrivais à sa taille tandis que ses jambes passaient sous le sol invisible. Elle s’approcha de moi et elle se mit à m’attaquer aussitôt. Elle effectuait des grands mouvements avec son épée, que je bloquais avec mon bouclier. Je lui rendis ses coups, ne sachant même pas s’ils lui faisaient le moindre dégât. Je m’interrogeai sur la nature de la créature quand une seconde la rejoignit. Puis une troisième. Lorsque j’éliminai la première créature, la quatrième se joignit à celles qui restaient. Sans le savoir j’étais en train de combattre les quatre rois.

Je les affrontai un à un. J’ignore s’ils avaient encore quelque reste de valeurs du temps où ils servaient Gwen, mais ils attendaient patiemment leur tour pour combattre. Celui qui me faisait face m’envoyait des boules d’énergie rose que je parais avec mon bouclier, quand j’étais trop essoufflé pour les éviter. Les rois étaient moins dangereux que je ne l’aurais cru. Je me demandai comment un chevalier si puissant qu’Artorias avait échoué à en tuer ne fut-ce qu’un seul. Ou alors il était venu chercher autre chose dans les Abysses ? Ils m’infligèrent tout de même quelques blessures. Mes réserves d’Estus fondirent comme neige au soleil. Je redoublai de prudence lorsque la précieuse fiole se vida complètement.

Le combat s’éternisa. Les rois déjà tués semblaient revenir à la vie après quelque temps. Je m’étais peut-être engagé dans un combat interminable, auquel seule ma propre fatigue mettrait un terme. Je sentis de la sueur sur mon front. Mais alors que j’achevais le quatrième roi, tous disparurent. Encore des hallucinations… Je capturai leurs âmes et j’allumai un feu. J’espérais chasser les ténèbres mais il n’en fut rien. J’utilisai le calice royal pour retourner à Lige-feu. Je possédais toutes les âmes requises. Le combat final était proche…