Le feu crépitait depuis plusieurs heures. Les flammes dansaient sans relâche devant mes yeux morts. Mon corps était réchauffé mais pas mon esprit. J’ignorais totalement ce que je faisais là. Ma vie — ou plutôt ma mort — n’avait plus aucun sens. Je tuais des morts-vivants qui revenaient inlassablement à la vie. Et pour quoi au final ? Pour rien. Je ne me raccrochais qu’aux paroles ténébreuses qu’on avait bien voulu me lâcher : faire sonner les cloches de l’Eveil. Et après ? Je n’en savais rien. De temps en temps, le dragon poussait un hurlement atroce qui oscillait entre un râle et un grognement de rage. Je me levai enfin, un dernier regard vers le foyer. L’ascension de l’échelle fut extrêmement pénible, le froid étant de retour pour ne plus me quitter. Le dragon s’était définitivement accaparé le pont. Lorsqu’il m’aperçut, une colonne de feu s’abattit encore, grillant toutes les carcasses qui se trouvaient près de moi. En un coup d’ailes il se posa sur le pont, prêt à me dévorer. Je n’osai pas l’affronter et je retournai d’où j’étais venu.

Un combat inégal

Par chance, le pont possédait un étage inférieur. Il était plus risqué de l’emprunter car aucun parapet ne protégeait d’une chute malvenue. Mais il avait surtout l’avantage de me soustraire à la vue du dragon. Tant qu’il était en vie, je n’avais d’autre choix que de passer par là. Le précipice qui m’entourait me donnait des frissons. Et l’humidité qui suintait des briques n’avait rien de rassurant. Au moindre faux pas je m’écrasais en contrebas. Je risquai d’ailleurs un coup d’œil pour me rendre compte de la hauteur vertigineuse. Je me cramponnai à mon arme afin de me rassurer.

Au bout du pont se trouvait une pièce extrêmement sombre dont le seul accès se faisait via une corniche à peine assez large pour me laisser passer. Je la franchis aussi vite que je le pus, mal à l’aise à l’idée d’être aussi exposé à un éventuel plongeon. J’atteignis enfin ma destination. Mais au fin fond de l’obscurité scintillaient à ras du sol deux petits éclats blancs. Un cri suivit et je compris immédiatement que des rats avaient envahi les lieux. Une autre paire d’yeux s’ajouta à la première et les deux rongeurs géants s’élancèrent vers moi. Je me précipitai en arrière et je repassai malgré moi par la corniche, toujours suivi par les rats. J’avais la place pour me battre et je les découpai tous les deux sans mal. Le dragon se trouvait à environ une dizaine de mètres au-dessus de moi et rugissait toujours. Un troisième rat était resté en arrière. A l’instant où je posai le pied dans la pièce sombre, il se jeta sur moi et me mordit à la jambe. J’abattis ma hache sur son crâne et sa cervelle se répandit sur le mur à côté de lui. La douleur était vive. Je ressentis des picotements pendant quelques secondes. Je me mordis la lèvre, espérant ne pas m’être fait empoisonner.

De retour à la surface, un nouveau choix s’offrait à moi : monter un escalier à gauche ou poursuivre ma route, vraisemblablement vers les cloches de l’Eveil. L’escalier étant en colimaçon serré, je me doutais bien qu’il ne menait pas à une structure imposante. En le négligeant, je risquais de passer à côté d’un coffre ou de quelque arme qui pourrait m’être utile. Je choisis cette voie. Je grimpai les marches quatre à quatre, plus confiant que jamais. Je débouchai à l’air libre. Il s’agissait en réalité d’une tourelle. Soudain, un choc d’une violence rare me cloua au sol. Un chevalier noir gardait les lieux. Le coup d’épée qu’il venait de m’asséner me faisait déjà pisser le sang. Il bloqua ma retraite en se plaçant derrière moi, dans l’escalier. Je pris alors la place qu’il occupait précédemment, sur le sommet de la tourelle. J’attendis qu’il remonte pour sauter à mon tour dans l’escalier. J’hésitai pendant un moment : fuir ou l’affronter ? J’optai pour la seconde solution. Je ne m’étais encore jamais battu dans un escalier en colimaçon et c’était visiblement aussi le cas du chevalier. Son épée était trop grande et chacun de ses coups finissait sa course dans l’un des murs qui nous entouraient. Ma hache était plus petite et plus maniable mais son armure lui offrait une protection tellement importante que je ne lui causais aucun dégât réel. Malgré le fait que la plupart de ses coups se perdaient dans la pierre, sous l’impulsion de mon ennemi, je n’avais d’autre choix que de reculer. Il parvenait tout de même à m’occasionner des blessures importantes. Tant que nous nous battions dans l’escalier, je conservais l’avantage. Aussi quand mon pied se posa sur la terre ferme et qu’il ne trouva plus de marche, je sus que j’étais encore mort. Je résistai du mieux que je pouvais, bloquant l’épée de mon adversaire avec mon bouclier, éreintant le sien avec ma hache. Nous quittâmes la tourelle sans relâcher notre attention. Mais petit à petit mon ennemi me poussa contre une grande herse en bois. Plus je m’en approchais, plus je sentais la chaleur m’envahir. Je crus dans un premier temps que la panique était à l’origine de ce phénomène mais un coup d’œil rapide en arrière m’en indiqua la source : je me trouvais juste derrière le dragon. Le pont se terminait de l’autre côté de la herse. Le chevalier noir me tua d’un coup d’épée en pleine tête.

Le sanglier qui voulait mourir...

De retour sur place, je cherchai dans les environs mais je ne trouvai pas le mécanisme qui m’aurait permis de lever la herse. Quant à la découper à la hache, j’aurais pu le faire. Mais j’avais trop peur de réveiller la colère du dragon. De toute manière, tant qu’il restait là il ne représentait pas une menace. Je remontai la ruelle dans l’autre sens, ignorant le chevalier noir. Un peu plus loin se trouvait une créature insolite. De prime abord, je crus deviner un énorme rat, bien plus grand que ceux que j’avais affrontés plus tôt. Mais plus je m’en approchais et plus elle ressemblait à un sanglier en armure. C’était effectivement le cas. Il chargea, tête baissée, ses deux grandes cornes prêtes à m’embrocher. Sur le côté se trouvaient quelques colonnes en bois et en pierre. Je m’y réfugiai pour me protéger de la bête. Elle fourra son groin entre deux colonnes, à ma recherche. Elle ne pouvait heureusement pas m’atteindre mais elle s'échignait tout de même à le faire. Les sangliers ne brillaient pas par leur intelligence mais celui-ci était particulièrement débile. Tout comme le chevalier noir, mon arme ne passait pas à travers l’armure. Mais à force de marteler, une goutte de sang apparut sur la tête du monstre. Il hurla de douleur tout en donnant des coups de tête sur le poteau en bois qui me protégeait. Le combat dura une éternité. Je me demandai même si ma hache n’était pas émoussée tant elle se révélait inefficace. Mais comme pour me donner tort, le monstre maintenant ensanglanté s’éloigna en titubant. Il s’affala trois mètres plus loin, dans le feu qui léchait quelques planches de bois depuis mon arrivée. Sans la protection improvisée par les colonnes, je n’aurais jamais réussi à le tuer.

Durant le combat, deux carcasses n’avaient cessé de m’envoyer des carreaux d’arbalète. Leurs têtes ne tardèrent pas à voler en contrebas du petit pont que leurs propriétaires occupaient. Elles finirent leur course dans un escalier dérobé. La ruelle aboutissait sur une autre herse, dont le mécanisme se trouvait de l’autre côté. Je descendis donc par l’escalier que je venais de découvrir. Une odeur nauséabonde s’en dégageait. Dès qu’il me vit, un mort-vivant s’enfuit. Une course-poursuite s’engagea mais elle se termina aussitôt. Deux de ses comparses, cachés, me poignardèrent quand je passai à leur hauteur. Je massacrai tout ce petite monde très facilement puisqu’ils étaient dépourvus d’armures. Je me trouvais dans ce qui ressemblait à une auberge. Plusieurs tables et chaises occupaient la salle et des torches flambaient aux murs. Le plafond atteignait une hauteur bien plus importante que dans une maison traditionnelle. Des poutres le soutenaient et sans ça il se serait probablement écroulé depuis longtemps. Seule la présence d’échelles en place d’escaliers m’intrigua. Peut-être s’agissait-il davantage d’un mess ? Un objet brillant attira mon attention sur un cadavre. Il s’agissait d’une clé, sans inscription, sans fioriture, rien. Elle ressemblait à une clé de cachot mais quant à savoir où l’utiliser, c’était un mystère. La demeure possédait un second étage qui contenait également des tables, des chaises et des tonneaux.

Une vision d'espoir

Une porte donnait sur l’extérieur. Là une terrasse menait à une autre partie du village, par un couloir qui m’évoquait un cloître. Un chevalier se dressait à l’une de ses extrémités. Le souvenir douloureux des deux chevaliers noirs était encore bien présent dans ma tête. Mais celui-ci était différent. Plus petit, il portait une cape rouge et une épée moins impressionnante. Je m’approchai de lui avec la plus grande précaution. Mon bouclier levé était prêt à recevoir tous les coups que m’administrerait le scélérat. Il se retourna à mon approche. Et comme je m’y étais attendu, il me chargea. Mon écu dévia son épée. Ma hache se planta dans son armure comme dans du beurre. Il lâcha son dernier souffle aussitôt. Je me débarrassai du cadavre d’un coup de pied pour libérer le chemin. Je ramassai son épée qui ressemblait de près à une claymore. Etant adepte des épées à deux mains, je rangeai mon bouclier dans mon dos. Et, comble de malchance, le chevalier que je venais d’occire gardait un écu de bien meilleure qualité…

Plus loin, je vis enfin ce que j’étais venu chercher : un clocher. En toute logique, une des cloches de l’Eveil devait s’y trouver. J’étais soulagé. Au moins l’homme qui m’avait parlé à mon arrivée à Lordran ne m’avait pas menti. Bien que j’ignorais encore le sens de tout ceci, je savais que je n’errais pas sans but. Pas comme les carcasses qui ne cherchaient qu’à me tuer. L’église m’apparut comme un havre de paix au milieu d’une tempête. Mais j’avais aussi appris à me méfier des excès de confiance. Je n’avais pas encore atteint la cloche. Sur ma droite se trouvait une forêt. J’ignorais si elle était envahie de morts-vivants et si elle présentait un quelconque intérêt. Je me trouvais encore dans ce que je considérais comme un cloître. A l’embouchure du couloir, je choisis de me diriger vers la gauche. Vu la disposition de l’église, sa porte principale devait logiquement se trouver par là. Un perron sur ma gauche faisait face à l’église. Je pénétrai dans le bâtiment et la beauté des lieux m’envahit aussitôt, surtout la nef qui se trouvait après une première pièce. J’avais du mal à croire que l’édifice était en si bon état. Les colonnes et les statues étaient encore intactes. Même les bancs de bois n’étaient pas tous cassés. Cependant quelques fissures étaient visibles par endroits, de même que des cailloux qui jonchaient le sol, preuve que le temps altérait tout de même la bâtisse. L’autel était en parfait état. Et mon cœur s’arrêta de battre quand je découvris qui s’y tenait : un chevalier noir. Je ne pouvais espérer atteindre le clocher avec cet ennemi sur les talons. Je devais l’éliminer. Je m’avançai parmi les bancs quand une psalmodie couvrit le son du vent. Je crus que le chevalier m’invectivait, jusqu’à ce que une boule de lumière bleue me frappe dans le dos. Un spasme me parcourut violemment le corps. Je me retournai, le bouclier devant mon visage pour me protéger. Au-dessus de moi, un mage proférait des incantations. Une seconde boule me frôla alors que je faisais un bond sur la droite. Le chevalier n’avait pas bougé d’un pouce. Je revins en arrière, à l’abri. Hors de question d’affronter le chevalier tout en me faisant bombarder d’électricité.

Je courus vers le chevalier pour l’attirer plus loin, sur le parvis de l’église. Par chance, il maniait une masse d’arme et un énorme bouclier qui protégeait tout son corps. Il tenta une attaque mais le temps que son arme s’abatte, je l’avais déjà contourné. Je plongeai mon épée dans son dos, pour la ressortir couverte de sang. Il hurla et se retourna d’un bloc. Sa masse, qui avait suivi son mouvement, rencontra ma tête. Je tombai de tout mon long et je roulai au bas des escaliers. Sans casque, j’aurais été tué sur le coup. Je me relevai péniblement. Le chevalier était déjà sur moi. J’esquivai son prochain assaut mais pas celui d’après. La masse me coupa net dans ma course, à hauteur des côtes. Je mourus encore.

Le chemin me paraissait très long. Il était temps de trouver un autre feu, pour raviver mon âme. Non loin de l’église se trouvait un bâtiment en ruine. Il m’évoquait une ancienne chapelle à l’abandon. Un escalier conduisait à une cave. Là j’allumai un feu et je pus me reposer avant de repartir au combat. Mais un bruit attira mon attention. Encore plus bas, un forgeron du nom d’André d’Astoras était occupé à marteler une épée. Il offrait divers services comme la réparation d’armes et d’armures mais également le renforcement de celles-ci. Il se faisait payer en âmes, comme le marchand du village. Je lui achetai un kit de réparation afin d’entretenir mon matériel moi-même. Sa forge jouxtait une grande salle qui elle-même menait vers la forêt. Pour l’heure, il me fallait vaincre le chevalier noir et faire sonner la cloche de l’Eveil. La forêt pouvait attendre. Je remontai et j’aperçus par une ouverture une grande porte un peu plus loin. Intrigué, je m’y rendis. Un chevalier rondouillard était assis sur un muret. Quand je l’interrogeai, il m’affirma que la porte était verrouillée et qu’il essayait depuis un moment de l’ouvrir. J’ignorais ce qui se trouvait derrière le portail et je m’en moquais. Je laissai le chevalier.

Il était temps d’affronter et de tuer celui qui me barrait la route dans l’église. J’y retournai et je l’attirai une nouvelle fois dehors. Plus question de me laisser surprendre. Cette fois j’attendais que sa lourde masse touche le sol avant de plonger mon épée dans ses entrailles ou sur son bouclier, le cas échéant. A plusieurs reprises, son arme passa à ras de ma tête mais aucune fois elle ne m’atteignit. Le colosse finit par poser un genou au sol. Le second le rejoignit. Je vis une expression de peur mêlée de haine sur les traits du chevalier juste avant qu’il ne meurt. Il disparut dans un nuage de fumée. La voie était libre.

Près de l’autel, un escalier rejoignait l’étage. Le mage posa moins de problème. La seule véritable menace reposait sur son armée de morts-vivants. Ils m’attaquèrent ensemble et ils périrent tous d’un coup d’épée droit dans le cœur. Seul leur surnombre permit à quelques-uns de me blesser légèrement. Une fois sa troupe éliminée, le mage vint m’affronter en personne. Sa tunique noire avait quelque chose d’étrange, d’angoissant. Je n’osai pas approcher immédiatement. L’embranchement de couloirs dans lequel nous nous trouvions l’empêchait d’utiliser sa magie à bon escient. Il compta alors sur son trident pour m’embrocher mais il était malhabile et peu rompu aux techniques de combat. Eviter ses attaques était d’une facilité déconcertante. Je pris rapidement l’avantage et je lui fis tâter de mon épée.

Je me dirigeai vers le clocher. Le seul chevalier qui se trouvait dans les environs mordit la poussière en très peu de temps. Hélas, ma fiole d’Estus était à présent vide. J’avais bien combattu mais non sans mal. La porte du clocher était pourrie. Je la défonçai et j’empruntai l’escalier. Mais je m’étais trompé : je ne me trouvais pas dans le clocher. En haut de l’escalier, je découvris une cellule où était retenu prisonnier un chevalier. Je la déverrouillai avec la clé mystérieuse que j’avais trouvée peu après avoir affronté le sanglier géant. La porte s’ouvrit. Le chevalier me remercia et me promit de m’aider plus tard. Frustré de ne pas encore avoir atteint la cloche de l’Eveil, je fouillai l’édifice à la recherche d’une issue. Je la trouvai rapidement, près de l’endroit où se tenait le mage lors de ma première entrée dans l’église.

Le dernier obstacle

Je me rapprochais enfin de mon objectif ! Je passai par deux échelles. A leur sommet, je n’eus d’autre choix que de traverser un voile de fumée blanche. J’évoluais à présent sur le toit de l’église. La vue était magnifique. La forêt s’étalait en dessous de moi à perte de vue. La ruine occupée par le forgeron s’en détachait par endroits tandis que la montagne derrière s’élevait bien plus haut que l’église. Sa cime était occupée par une muraille. Près de moi se trouvait une gargouille prête à décoller. De la mousse l’avait envahie. Je me demandai depuis combien de temps toutes ces choses se trouvaient là : l’église, la forêt, le village des morts-vivants…

Mon attention retomba sur le clocher, mon objectif. Je fis quelques pas jusqu’à ce qu’un tremblement m’assaille. Je portai la main à mon cœur mais la cause de ce phénomène était ailleurs. Tout le toit tremblait. Des gargouilles décoraient le clocher mais l’une d’elles était en train de prendre vie. Elle sauta en bas et atterrit à l’autre bout du toit. Elle portait une longue hache et un petit bouclier. Sa queue était aussi munie de lames de hache. Son allonge était bien plus importante que la mienne mais je commençais à m’habituer aux esquives et roulades en tous genres. Pourtant je n’étais pas à l’aise à l’idée de faire des cabrioles sur un toit en pente, surtout vu la hauteur de l’église. Mais c’était ça ou me faire couper en deux par cette abomination. Je parai de justesse ses trois premières attaques. Puis je me décidai à répliquer. Je profitai du fait qu’elle venait d’abattre son arme pour plonger sur la gargouille, comme je l’avais fait avec le chevalier et sa masse. J’égratignai le monstre qui, lui, me déchiqueta en une seule frappe.

Mon armure était trop lourde. Je ne m’y sentais pas à l’aise et, contre des ennemis comme cette gargouille, je me devais de réagir promptement. Je remis mes habits d’aventurier, bien moins résistants mais tellement plus pratiques pour le combat. J’y retournai. Cette fois, je parai presque tous ses coups et je les lui rendis. Le combat était extrêmement éprouvant. Je passais presque tout mon temps à sauter, rouler, esquiver de toutes les manières possibles. De temps en temps mon épée s’enfonçait dans le corps de la gargouille, comme une aiguille dans du bois. Mais à force de m’acharner, je finis par lui trancher la queue et récupérer ce qui faisait office de hache. L’arme possédait une allonge tout à fait appréciable mais elle était difficile à manipuler. Tout à coup, une seconde gargouille se joignit à la première. Je poussai un hoquet de surprise et j’évitai de justesse son souffle de feu. La première, ivre de rage, en profita pour se jeter sur moi pour me tuer.

En chair et en os

Il était clair que je ne réussirais pas seul. De retour au feu, je pestai contre mes échecs. Il me fallait une solution. Je méditai pour en chercher une. Puis j’eus l’illumination. Le chevalier solaire que j’avais rencontré près du dragon m’avait dit qu’il se tenait à ma disposition si j’avais besoin d’aide. Mais tous ceux qui m’avaient fait une telle promesse ne l’avaient toujours pas tenue. Peut-être se méfiaient-ils de moi, du fait que je pouvais basculer à tout moment à l’état de carcasse ? Je devais redevenir un homme et je disposais d’un moyen pour le faire. J’avais collecté quelques âmes d’hommes depuis le début de mon périple. Pas des simples âmes de morts-vivants mais bien quelque chose d’autre, de plus puissant. J’en consommai une et à l’aide de la chaleur du feu, je sentis mes chairs se régénérer, ma peau réapparaître et des couleurs vives me revenir. Le froid qui régnait dans mon cœur disparut peu à peu au profit d’une chaleur apaisante. J’étais revenu à la vie, pas en tant que mort-vivant mais bien en tant qu’homme. Je ravivai également le feu, lui octroyant des flammes plus belles et plus grandes. Ma fiole d’Estus gagna encore quelques mesures du précieux liquide. Peut-être des gens étaient-ils disposés à m’aider dans ma quête maintenant que j’étais redevenu un homme ? Je devais cependant garder à l’esprit que le moindre faux pas pouvait me rendre ma condition de mort-vivant.

Je grimpai les deux échelles. Là, la marque du chevalier solaire était visible sur le sol, entre autres choses. Je l’invoquai et son spectre apparut à mes côtés. Pour renforcer encore mes chances, j’appliquai sur mon arme la résine de pin dorée trouvée dans un coffre du village des morts-vivants. Des arcs électriques parcouraient maintenant la lame de ma hache. Le chevalier solaire et moi passâmes le voile de fumée. La première gargouille s’éleva dans les airs et atterrit sur le chevalier. J’en profitai pour attaquer son flanc. Je mis toutes mes forces dans mes attaques. Je fus rapidement essoufflé mais mon acharnement porta ses fruits. La bête fulmina et ne sut plus qui attaquer. Le chevalier tenait bon. Il encaissait les coups mieux que moi. Je m’éloignai pour le laisser subir les assauts de la seconde gargouille qui venait de rejoindre le combat. J’abattis la première et nous encerclâmes le dernier monstre. Il ne fit pas long feu. Ma hache imprégnée d’électricité ne faisait pas de cadeau. Les corps disparurent en même temps que le spectre du chevalier solaire. J’avais enfin vaincu les gargouilles. La cloche était à moi.

La cloche de l'Eveil

Je grimpai une longue échelle au sein même du clocher. L’extase d’avoir gagné n’était troublée que par le murmure du vent. Je repassai par l’extérieur, afin d’emprunter une dernière échelle jusqu’à la cloche. Loin en bas se pressait un océan de nuages. Je n’en voyais pas la fin et aucune trouée ne me permettait de discerner ce qui se trouvait en dessous. Je fis un bond en arrière car de part et d’autre se trouvaient des gargouilles, comparables à celles que je venais d’affronter. Mais celles-ci étaient bien en pierre. Je les tâtai tout de même du bout de mon arme pour vérifier. Au sommet du clocher, je trouvai la cloche tant recherchée. J’activai son mécanisme et elle se mit à sonner. Jamais le son d’une cloche ne m’avait paru si doux, même si je me tenais juste en dessous.

La mélodie retentit jusque dans le village. Il ne s’agissait peut-être que d’une impression, probablement due à mon allégresse récente, mais il me semblait que le soleil dardait à présent des rayons plus intenses, comme si la cloche l’avait réveillé. Je redescendis les échelles. En bas du clocher m’attendait un étrange personnage. Il se présenta comme un confesseur. Je n’avais aucun péché à absoudre. Je lui achetai une pierre de purge. Lordran était un pays rempli de créatures dangereuses et imprévisibles. Il était plus prudent d’avoir de quoi briser les malédictions… Je retournai au feu que j’avais allumé dans la ruine. L’homme qui m’avait parlé des cloches de l’Eveil m’avait dit qu’il en existait deux. J’avais fait sonner la première, il me fallait maintenant trouver la seconde. Mais pour l’heure, je profitai d’un repos bien mérité…