Le monde tel qu’on le connaît n’a pas toujours été si obscur. Lorsque le Feu est apparu, il a entraîné avec lui le chaud et le froid, la vie et la mort, la lumière et les ténèbres. A peine sortis de l’ombre, les seigneurs des âmes s’en prirent aux dragons qui régnaient sur le monde. Nito le premier des morts, la sorcière d’Izalith et ses filles du chaos, Gwen le seigneur de lumière et ses fidèles chevaliers et un être de petite taille souvent oublié, déclenchèrent une guerre sans merci. L’âge du Feu débuta lors du déclin des dragons. Mais le Feu finit par se tarir, ses flammes diminuèrent pour redevenir braises. Et alors que l’obscurité recouvrait le monde, de plus en plus d’hommes portaient la marque sombre…

Le royaume des morts

J’étais mort… et pourtant bien vivant. On m’avait enfermé dans une cellule exiguë et humide, infestée de rats et de parasites en tous genres. Mais cela n’avait plus d’importance. Je me morfondais dans mon cachot, résolu à attendre la fin des temps comme tous les morts-vivants. J’étais un aventurier jadis et les circonstances de ma propre mort m’étaient totalement inconnues. Je ne me souvenais que de deux choses : mon nom, Nergal, et cet anneau que je portais depuis ma plus tendre enfance, qui m’avait toujours apporté chaleur et réconfort.

Mais alors que j’étais parti pour attendre sans but durant une éternité, un bruit sourd me tira de ma torpeur. Un cadavre en putréfaction s’échoua au centre de ma cellule tandis qu’un rai de lumière me grillait la rétine. Une trappe donnant sur ma cellule avait été ouverte et un chevalier mystérieux était penché dans son encadrement. Je ne voyais rien de ses traits mais je devinais que derrière ce casque de fer se dissimulait un regard empli de compassion. Je me levai et j’entrepris de fouiller le malheureux qui partageait maintenant mon ultime demeure. Il ne possédait qu’un objet, qui avait bien plus de valeur que n’importe quel autre : la clé des oubliettes.

Je fis jouer la clé dans la serrure de la porte et je me retrouvais libre. Mais je déchantais rapidement. Le couloir qui faisait face à ma cellule était envahi de morts-vivants bien moins humains que moi. Je leur réglais leur compte et pour chaque mort que j’occasionnais, je me sentais ragaillardi, comme si j’absorbais l’âme de mes ennemis. Fort enthousiaste de cette découverte surprenante, j’entrepris de poursuivre mon chemin. Mais à ce moment, un bruit de pas retentit. Il était lourd et beaucoup trop fort pour appartenir à un humain, qu’il soit mort ou vivant. Mon regard se tourna vers la droite et à travers les barreaux sinistres de la prison, j’aperçus un être monstrueux. Il était plus imposant que tout ce que j’avais pu voir jusqu’alors et il portait un gourdin aussi grand que deux hommes. Je frémis en mon for intérieur, priant pour ne pas devoir croiser sa route. Je poursuivis et après avoir grimpé une échelle, je me retrouvais enfin à l’air libre. Loué soit le soleil ! Je me retournais, pour constater que des ossements humains surmontés d’une épée plantée dans le sol se trouvaient à quelques pas. Je m’en approchais et d’un geste de la main, j’y mis le feu. Je m’y reposais un instant, revigoré après avoir eu cette vision de cauchemar, ce monstre sorti d’un autre monde.

Des morts et des démons

Devant moi se trouvait une grande porte à double battant. N’ayant pas d’autre choix, je l’ouvris non sans effort. Je débouchais dans une haute salle. Des grandes colonnes soutenaient un étage ouvert en son centre et, pour la première fois, je fus muet d’admiration. Je fis quelques pas afin d’observer l’architecture des lieux. Mais mon observation fut de courte durée. Le démon que j’avais aperçu plus tôt sauta de je ne sais où pour atterrir de l’autre côté de la salle. Je n’avais qu’un bout d’épée brisée et cela faisait trop longtemps que je n’avais plus combattu. La porte s’était refermée derrière moi. Mon cœur commença à s’emballer alors que je voyais la mort s’approcher, une fois de plus. Le géant abattit son immense masse sur moi mais j’eus heureusement le réflexe d’esquiver. Je sentis le souffle de l’arme passer près de ma tête, en même temps qu’une sensation de liquide coulant le long de mon dos. Le démon avait en effet réussi à m’érafler, emportant un bout de chair avec lui. Je me mis à courir au hasard, le monstre étant relativement lent. C’est alors que je repérais une porte dérobée. Je m’y engouffrais sans l’ombre d’une hésitation. A peine ceci fut fait que la porte se referma. A travers ses barreaux, je pouvais voir l’horrible monstre qui arpentait la grande salle à ma recherche. Je repris mon souffle tout en exultant de joie. Un peu plus loin se trouvait un autre feu. Je m’y arrêtais et je sentis que ma blessure avait disparu.

Les choses sérieuses commençaient. Un archer mort-vivant me barrait la route. Le couloir qu’il protégeait était mon unique accès vers un salut quelconque. En arrière se trouvait le démon et il était exclu d’y retourner. Fort heureusement je trouvais un bouclier pour me prémunir des flèches et, plus loin, un cimeterre qui allait remplacer ma vieille épée brisée. J’étais enfin paré pour affronter le danger. J’éliminais l’archer de deux coups de cimeterre bien placés. Mais un excès de confiance me précipita dans un piège grossier. Une boule de métal dévala l’escalier que j’empruntais et je me retrouvais écrasé comme le dernier des novices. Le mur derrière moi s’effondra sous le choc de la boule. Il révéla une petite pièce dans laquelle se mourait un chevalier. Il ressemblait beaucoup à celui qui m’avait donné la clé des oubliettes mais je n'eus pas le temps de lui poser la question. Il me mit en garde contre lui-même, sachant que sa mort corromprait son âme. Je compris rapidement que les morts-vivants que j’avais croisés jusqu’alors avaient déjà subi le même sort. Il me parla d’une quête et d’une cloche à sonner. Mais pour l’heure, je mis cette information dans un coin de ma tête, résolu à quitter les lieux au plus vite. Le souvenir du démon était encore trop frais dans ma tête. Enfin, le chevalier mourant me remit une clé et des fioles d’Estus, très prisées par les morts-vivants pour leur capacité à les régénérer.

Je vais bientôt mourir… Après quoi, mon âme perdra la raison…

L’usage de mon arme me revint à une vitesse fulgurante. Je défis les quelques ennemis qui se dressaient sur mon chemin. Deux coups de cimeterre suffisaient pour les occire. Je m’arrêtais un instant pour contempler le magnifique paysage qui encadrait le donjon sinistre dans lequel je me trouvais. Un peu plus loin j'affrontais un ennemi coriace, plus vif que les autres et aussi doté d’une armure. Après quelques passes rapides, je vins à bout du bougre, pour me retrouver bloqué par une porte verrouillée. Je revins sur mes pas et je me plantais devant cet étrange écran de fumée que je venais de croiser. J’entendais des râles qui montaient depuis l’autre côté et je savais ce qui s’y trouvait : le démon du Refuge, que j’avais fui un peu plus tôt. Je savais que je n’avais d’autre choix que de l’affronter. Mais j’étais maintenant paré. Je possédais une vraie épée, un bouclier et de quoi me soigner. Cependant je me doutais que le combat serait rude…

Un mort-vivant d'exception

J’apparus au-dessus du monstre. Je me jouais de lui pendant un moment puisque depuis ma position j’étais inatteignable. Mais par je ne sais quel prodige il s’éleva dans les airs à l’aide de ses deux ailes déchiquetées. Je me ruais en bas et je m’écartais de lui juste au moment où il fracassa le sol. Le combat commença. Sa taille impressionnante m’empêchait de l’approcher tant je redoutais de prendre un coup. Mais je n’avais pas le choix. Je testais à plusieurs reprises sa vivacité et je constatais immédiatement qu’il s’agissait de son point faible. Il était d’une lenteur morbide. Durant tout le combat je faisais en sorte qu’il écrase sa masse sur le sol pour m’approcher et lui porter deux ou trois coups avant de m’éloigner de nouveau. La technique porta ses fruits. Cependant une maladresse de ma part m’ôta presque la vie. L’arme du démon s’abattit à deux reprises sur moi. Mais mon armure, quoique légère, limita sérieusement les dégâts. Je me rappelais alors que le chevalier rencontré plus tôt me confia des fioles d’Estus. J’en bus une et je retrouvais aussitôt ma vitalité. Le monstre finit par rendre l’âme, que je m’empressais de capturer. Il disparut dans un brouillard maléfique et me laissa une clé en guise de souvenir. Je m’empressais de déverrouiller la porte afin de quitter ce lieu maudit.

Je gravis la colline attenante au donjon, en quête de salut. Les montagnes enneigées m’encerclaient et un vent glacial balayait mon corps décharné. Un corbeau géant surgit de nulle part. Il me prit dans ses griffes et m’emmena loin du Refuge des morts-vivants. J’avais réussi à m’échapper mais j’ignorais encore que ma destinée allait être parsemée d’embûches et d’obstacles quasiment insurmontables. J’étais loin de me douter que le démon du Refuge n’était qu’une petite créature inoffensive à côté des monstruosités que j’allais croiser par la suite. Mon pèlerinage commença dans une terre lointaine et sombre. Au pays de Lordran où s’étendent les ombres…

La suite... plus tard...