On attendait l'arrivée de Lara sur PS2, mais en voyant le résultat, on aura tôt fait de soupirer en pensant aux précédents épisodes. Disons-le tout net, Tomb Raider : L'Ange Des ténèbres est un piètre épisode, même si à première vue le fond et la forme semblent avoir bénéficié de beaucoup de soins. Il convient d'ailleurs de préciser qu'Eidos et Core Design avaient placés de grands espoirs dans cet opus qui devait initialement être le premier épisode d'une trilogie. Malheureusement, le résultat final ne convainquit ni les joueurs ni la firme éditrice qui décida de laisser le développement de l'épisode suivant à Crystal Dynamics à l'origine de l'excellente série des Soul Reaver. D'un côté, on ne peut s'empêcher d'être impatient de voir quel va être le résultat de ce choix tactique mais d'un autre on est désolé pour Core Design qui avait énormément travaillé sur certains points de L'Ange Des Ténèbres à commencer par le scénario.
Celui-ci se veut donc beaucoup plus mature, sombre et violent que ceux des précédents segments. Si on excepte l'ellipse qui consiste à éluder la fin de Tomb Raider IV où Lara était censée être morte, le seul lien avec cet événement tenant à une bribe de conversation entre Lara et Von Croy, l'histoire de L'Ange Des Ténèbres débute par l'assassinat de ce dernier, perpétré par un serial killer surnommé le Monstrum. Comme de coutume, Lara devra vagabonder dans divers endroits (Paris et Prague) pour découvrir le fin mot de l'histoire allant bien au delà d'une simple affaire de meurtre. Ainsi le Monstrum se prénomme Pieter Van Eckhardt et n'est autre que le chef d'une organisation secrète ayant pour but de réunir les peintures d'Obscura censées pouvoir ramener à la vie le Cumiculum Vitae, un être divinement évolué qui pourrait représenter l'espoir du genre humain. Si le synopsis est intéressant, la construction de l'intrigue, elle, l'est beaucoup moins. De ce fait, la progression peine à trouver son rythme de croisière et alterne lénifiantes pérégrinations dans les rues de Paris et passages plus convaincants (notamment dans la seconde partie du jeu) qui renvoient à ce qu'on pouvait trouver dans les premiers Tomb Raider. Une autre idée intéressante fut d'introduire un nouveau personnage en la personne de Kurtis Trent. Pendant masculin de Lara, disposant de pouvoirs psychiques et surtout enclin à gagner le coeur des foules pour permettre à la série de se trouver une nouvelle icône, ce personnage ne réussira en fait qu'à faire rire. Mal exploité, une psychologie quasi inexistante, des dons qui se résument à deux ou trois scènes contextuelles, Kurtis n'a vraiment rien pour lui si ce n'est l'espoir d'apparaître dans un second segment, comme le suggère le plan final. Dommage pour lui, ce ne sera certainement pas le cas, d'autant que le prochain Tomb Raider Legend ne devrait rien reprendre de L'Ange Des Ténèbres si ce n'est une natte, deux flingues et un short moulant.
Techniquement, le jeu oscille également entre le "très bon" et le "navrant". Si quelques décors sont d'une extrême beauté (ceci étant souvent dû à des éclairages très maîtrisés), le rendu visuel du jeu est souvent sujet à d'énormes bugs graphiques. Cependant, signalons sur ce point que la version PS2 est beaucoup mieux lotie que celle PC, complètement ratée. Ensuite, on ne peut que déplorer le fait que les développeurs aient eu les yeux plus gros que le ventre. Ceci se traduit par des barrières de chantier qui bloquent de nombreuses voies. Bien que ceci ne gêne pas vraiment lorsque qu'on visite des égouts, des rues piétonnes ou des chantiers, c'est beaucoup plus embêtant quand on est à l'intérieur d'une église. On regrette aussi la rigidité de Lara qui gagne en polygones ce qu'elle perd en souplesse et en grâce. Comment ne pas sourire en la voyant se trémousser à plat ventre telle une épileptique atteinte de la maladie d'Alzheimer ? A ce titre, on ne peut que déplorer le manque de mouvements inédits. De plus, une des trouvailles les plus étranges de cet opus consiste à effectuer des actions pour que Lara gagne de la force, ce qui lui permettra de progresser par la suite. Par exemple, si vous n'arrivez pas à atteindre un endroit trop lointain en vous suspendant à une corniche, vous devrez parfois pousser un simple baril ou ouvrir une armoire avec un pied de biche pour que la miss se sente plus sûre d'elle. D'ailleurs, la première chose à laquelle on songe quand on évoque L'Ange Des Ténèbres est la célèbre réplique de Lara quand elle effectue une de ses fameuses actions : "Ha je me sens plus forte". Risible et sans précédent.
Emaillé de plusieurs problèmes de gameplay (le contrôle analogique est peu pratique pour réaliser certains sauts), exempt de nouveautés dignes de noms (où sont les nouvelles armes et les véhicules ?) et d'une histoire prometteuse mais mal exploitée, L'Ange Des Ténèbres a bien du mal à se dépêtrer de ses tares. Néanmoins, on se laissera prendre au jeu lors de notre première excursion en ayant bien en tête que le potentiel de refaisabilité est quasiment nul.