La chasse, vous dira-t-on, a la vie dure. Jamais autant qu'aujourd'hui la pratique de ce "sport" n'aura fait couler autant d'encre, s'attirant constamment les foudres des écologistes de tout poil. Cela dit, une fois que cela se passe de l'autre côté de votre écran, traquer un rhinocéros en voie d'extinction s'avère aussi banal que sauver un président des USA ou repousser une invasion d'aliens. Consciente de cette niche potentielle de joueurs fatigués de tirer sur leurs semblables tout en pixels, la série Cabela continue de donner naissance à de nombreux jeux de traque virtuelle. De cette singulière portée Cabela's Survival Shadows of Katmai est le dernier né.
Tranchant radicalement avec les fondamentaux de la série Cabela, Survival Shadow of Katmai est le résultat d'un mélange plus ou moins savant entre différents genres. En effet, cet épisode mêle aventure et jeu de tir à la troisième personne, là où les volets Dangerous Hunts et Big Game Hunter nous avaient habitués à des FPS "classiques". Un pari plutôt risqué dans la mesure où il s'agit des premiers pas de la série dans ce gameplay, ce qui risque de mécontenter ses fans. Ce bouleversement en valait-il finalement la chandelle ?
Prenant exemple sur son prédécesseur, Survival Shadows of Katmai présente un mode campagne suivant une fois encore un véritable scénario et non pas une simple succession de chasses à travers le globe. Le joueur se retrouve donc plongé dans la peau de Logan James, un pilote dont l'avion se voit contraint de subir un atterrissage forcé (traduisez par "se crashe") dans les montagnes d'Alaska. Seul, sans nourriture, livré aux éléments déchaînés et aux bêtes féroces, il ne devra compter que sur son instinct pour tenter de s'en sortir vivant. Alors certes, en soi, rien de franchement original. On retrouve l'ambiance de grands films de survie à l'image d'A Couteaux Tirés ou Le Territoire des Loups mais sans en atteindre la qualité certaine. Cependant, si Logan n'a pas la trempe d'un Anthony Hopkins ou la ténacité d'un Liam Neeson, l'histoire principale présente tout de même quelques bonnes idées savamment noyées au milieu d'autres, elles sans grand intérêt.
L'essentiel du jeu consistera donc à traverser les montagnes en alternant phases d'exploration et d'escalade, le tout dans des décors enneigés bien réalisés mais vite monotones. Car en effet, si la jouabilité s'avère correcte, de nombreux points noirs viennent assombrir ce tableau se voulant d'un blanc immaculé. Rappelant de loin les chapitres tibétains d'Uncharted 2 en moins jolis, les séquences de grimpette s'avèrent terriblement frustrantes, tant les chemins sont balisés à l'extrême. Mis à part quelques rares bifurcations alternatives, l'aventure se limite à avancer tout droit en éliminant les groupes d'animaux sauvages vous attaquant dès que vous pénétrez dans une nouvelle zone. Une restriction d'autant plus dommage que vue l'étendue des montagnes, on aurait aimé faire crapahuter Logan à droite à gauche avant qu'il ne meure une bonne fois pour toutes d'hypothermie.
Survival Shadows of Katmai n'ayant pas renié son ADN Cabela, la mise à mort de hordes d'animaux affamés est bien sûr toujours d'actualité. Loups, ours, couguars, corbeaux... toute la biomasse des montagnes semble mourir de faim et voir en vous un bon moyen de passer l'hiver le ventre plein. Plus réalistes que dans les jeux précédents, les combats contre les bêtes féroces vous forceront à affronter des petits groupes d'animaux bien coordonnés, là où d'autres jeux de la série vous noyaient sous des meutes entières de prédateurs. Niveau IA, on appréciera de voir certains animaux tenter de vous prendre à revers ou vous immobiliser partiellement, laissant le temps aux autres de finir le travail. La réalisation des créatures, très correcte, pâtit du faible bestiaire proposé par le jeu, vous forçant à affronter sans cesse les mêmes animaux. Ce qui, à la longue, s'avère particulièrement répétitif, voire ennuyeux.
Ne voyez cependant pas dans le "Survival" du titre un jeu où gérer votre santé et vos munitions s'avérerait crucial. Vous ne parviendrez jamais totalement à vider vos chargeurs et en dehors de rares feux de camp à allumer et de chasses scriptées à compléter, rien ne viendra justifier cet aspect de "survie". Mises à votre disposition pour repousser les hordes velues, les cinq armes proposées s'avèrent plus ou moins similaires. Au point que vous préfèrerez conserver votre pistolet de départ ayant le mérite d'avoir une capacité plus importante que les autres fusils obtenus lors de l'aventure. D'autres objets viendront s'ajouter à votre inventaire (piolet, grappin, morceaux de carte, etc.), facilitant votre avancée ou débloquant d'autres modes de jeu. Hélas, les trouver s'avère désespérément facile tant ils ont été mal dissimulés. A dire vrai, la plupart gisent à vos pieds le long des corridors rectilignes que vous serez forcés de suivre. Une chance pour Logan, pas pour nous.
Grand classique de la série Cabela, les galeries de tir sont une fois encore de la partie, abandonnant la vue à la troisième personne de la campagne pour la traditionnelle vision FPS. Délimitées en trois modes, ces séquences de tir sur rails vous proposeront de survivre le plus longtemps possible, d'amasser un grand nombre de points ou de mélanger les deux dans des cartes étonnamment absentes du scénario solo. Le but reste le même : tirer sur tout ce qui bouge, tout en utilisant les différents bonus (ralenti / doubles points / vue thermique, etc.) lâchés par vos victimes. Menées tambour battant, ces phases s'avèrent distrayantes mais peinent à masquer un certain vide qui caractérise le jeu en général, à la manière d'un de ces gouffres sans fond dans lesquels vous n'aurez de cesse de tomber.
- Graphismes14/20
Bien loin d'un Uncharted auquel il emprunte pourtant certains éléments de gameplay, décors et même doubleurs, le jeu ne s'avère pas moins agréable à regarder. Les paysages sont plutôt beaux et les animaux bien modélisés. On aurait seulement aimé qu'on nous accorde un peu plus de liberté pour découvrir cette vision de l'Alaska, assez joliment réalisée.
- Jouabilité13/20
Souffrant de mouvements de caméras frustrants et de contrôles pour le moins étranges (l'exemple le plus flagrant reste d'une gâchette pour le saut), on souffre dans un premier temps d'une prise en main assez lourde, mais à laquelle on finit par s'habituer.
- Durée de vie10/20
Avec seulement huit niveaux, dont certains se finissent en dix minutes à peine, on terminera l'aventure solo en à peine six heures, auxquelles viendront s'ajouter deux ou trois heures de galeries tout au plus. On reste donc sur notre faim, et c'est d'autant plus dommage qu'il y avait moyen de nous faire courir les plaines enneigées pour quelques heures de plus.
- Bande son14/20
Les quelques thèmes récurrents collent bien à l'ambiance "perdu dans la neige" voulue par la trame scénaristique et s'avèrent agréables à l'oreille. Les doublages, en français, sont également très corrects. Les bruitages des animaux, quant à eux, sont toujours aussi convaincants et parviennent même parfois à vous faire frissonner.
- Scénario13/20
Reprenant certaines idées aux grands classiques du jeu, l'histoire principale se laisse suivre et l'on retiendra quelques bonnes idées ou situations. On regrettera cependant une fin bâclée et dont l'ultime conclusion s'avère malheureusement quelque peu décevante.
Partant d'une bonne idée (nous faire parcourir des terres méconnues), Cabela's Survival Shadows of Katmai paye très cher sa volonté de trancher radicalement avec ses aînés, s'aventurant sur un terrain de toute évidence non maîtrisé. Répétitif, frustrant par moments, les nombreux défauts parviennent presque à nous faire oublier les quelques bons points de cet opus qui laissera sans doute froids bon nombre de joueurs venus chercher un véritable jeu d'aventure.