Appartenant à la vague de titres arcades portés sur Dreamcast après sa mort officielle, Border Down a débarqué sur le territoire japonais en 2003. Si l’éditeur était dans un premier temps opposé à cette conversion, les nombreuses pétitions signées et les centaines de lettres envoyées par des fans irréductibles auront fini par le convaincre. Il ne regrettera d’ailleurs pas sa décision puisque des milliers de copies du jeu se sont arrachées à travers le monde. Eh non, les joueurs ne s’y sont pas trompés, ce Border Down est une petite bombe qu’il ne faudrait surtout pas manquer.
Dans un monde pas si lointain que cela, les technologies toujours plus poussées ont permis à l'être humain d'explorer les confins les plus reculés de la galaxie. La planète bleue se faisant trop petite pour abriter ses dizaines de milliards d'habitants, l'homme est parti à la conquête de Mars pour construire des colonies. Tout se passait bien jusqu'au jour où, équipée d'armes dévastatrices, une flotte extraterrestre (baptisée First Approach) est passée à l'attaque sans crier gare. Devant cette terrible puissance de feu et ce comportement hostile, la Solar System Defense Force (c'est-à-dire les gentils) a mis au point une intelligence artificielle (R.A.I.N. pour Remote Artificial Intelligence Network) capable de piloter les trois meilleurs engins conçus par l'homme et de renvoyer les aliens dans leur lointaine galaxie. Ainsi, ces trois vaisseaux prennent d'assaut l'armada ennemie en l'attaquant chacun par un front différent …attention, ça va chauffer.
Chose assez rare pour être soulignée, ce scénario (aussi maigre et convenu soit-il) aura un réel impact sur le système de progression. En effet, les trois chemins empruntés par ces vaisseaux sont en fait appelés des « borders » : il y a le vert, le jaune et le rouge. Vous débutez ainsi la partie au contrôle du premier appareil dans le border green. En cas de mort, vous retournerez au checkpoint précédent, vous serez rétrogradé au border du dessous (d'où le titre « Border Down ») et changerez donc de vaisseau. Une fois dans le rouge, le moindre faux pas sera accompagné d'un magnifique game over. Cette petite astuce permet en fait d'aborder chaque stage sous trois angles distincts. Même si les différences pourront s'avérer minimes, les décors ainsi que les ennemis et leurs schémas d'attaque changeront parfois du tout au tout. Dans le niveau numéro trois par exemple, vous partirez à l'assaut de la flotte adverse à partir de plusieurs fronts : de face ou par le flanc (en traversant d'abord un champ d'astéroïdes). On ne peut pas vraiment dire qu'un border soit beaucoup plus difficile à parcourir qu'un autre, ils sont juste différents.
Côté gameplay et level design, Border Down est un gros mélange de plusieurs genres. Certaines phases s'apparentent à du manic shooting, tandis que d'autres demanderont tantôt des réflexes exacerbés, tantôt de la mémorisation, du moins si vous ne voulez pas finir en chair à pâté. Heureusement, il est possible de modifier à n'importe quel moment la vitesse du zinc pour s'adapter aux différentes situations. Ainsi, il vaut mieux ralentir la cadence quand de nombreuses boulettes se déplacent lentement à l'écran. A contrario, des tirs plus rapides et imprévisibles exigeront des esquives de dernière minute et donc un vaisseau plus véloce. En ce qui concerne vos attributs offensifs, vous pourrez déclencher le tir principal en laissant enfoncée la touche dédiée. Le tir est alors continu et exclusivement en ligne droite. En revanche si vous tapotez le bouton, des lasers jailliront de votre canon et chercheront automatiquement la cible la plus proche. Cela est évidemment indispensable quand un ennemi est hors de portée ou quand il se trouve dans votre dos.
La dernière arme est directement inspirée d'un autre shoot'em up : Metal Black. En détruisant des adversaires ou en récoltant des petits items sphériques, une jauge se remplira progressivement. Une fois un certain seuil atteint, il vous sera possible d'utiliser le « Break Laser ». Même si son nom ne le laisse pas spécialement deviner, son utilisation vous rendra invulnérable aux assauts adverses, occasionnera beaucoup de dommages et réduira à néant les boulettes qui croiseront votre route. Mais attention, il est vivement conseillé de l'utiliser uniquement quand la situation l'exige. En effet, la jauge qui lui est dédiée influe également sur la puissance de votre tir principal. Si elle tombe à zéro, votre arme de base sera faible et sa portée d'attaque s'en verra réduite. Nous noterons également que les boss possèdent eux aussi un break laser, ce qui peut donner lieu à des affrontements visuellement époustouflants. Si ces deux lasers s'entrechoquent, un énorme faisceau lumineux apparaîtra. C'est celui de vous deux qui résistera le plus longtemps qui parviendra à l'emporter.
Border Down est également connu pour son système de scoring extrêmement complexe que vous serez obligé de maîtriser sur le bout des doigts pour espérer progresser. En effet, ne possédant pas à proprement parlé de vie, le joueur descendra au border inférieur à chaque mort jusqu'à ce que défaite s'ensuive. En d'autres mots, vous n'avez droit qu'à trois tentatives pour finir un niveau. Fort heureusement, si vous parvenez à générer une certaine quantité de points, vous aurez la possibilité de remonter d'un border. Pour ce faire, différentes solutions sont à votre disposition et possèdent toutes la même particularité : elles récompensent les prises de risque. Il y a d'abord le scratching, une technique consistant à frôler les boulettes adverses. Vous disposez aussi, lors des affrontements face aux boss, d'un compteur qui s'affiche dans un coin de l'écran. L'idée est de terrasser l'ennemi juste avant que le compteur ne tombe à zéro, ce qui fera exploser votre score mais exigera de vous de faire durer le combat plus longtemps, au risque d'y laisser des plumes.
Le break laser permet aussi d'absorber les tirs ennemis et ainsi de réaliser des combos. Finalement, plus vous descendez dans les borders, plus les ennemis rapporteront de points. Autrement dit, plus la situation sera désespérée, plus le game over vous pendra au nez, et plus il sera en réalité facile de vous refaire une santé. Il est donc absolument primordial de garder en permanence espoir, de redoubler de vigilance à chaque instant et de ne pas perdre son sang-froid. Au final, derrière sa difficulté hors du commun et son système de scoring qui pourraient rebuter plus d'un néophyte, Border Down se révèle être un des meilleurs shoot'em up pour Dreamcast. Et pourtant, la concurrence est vraiment rude sur ce support. Alors certes, le challenge est fichtrement relevé, mais bon sang, le plaisir ressenti à chaque nouvelle victoire n'en est que plus grand. Quel bonheur de devenir meilleur à chaque partie et de se surpasser en permanence. Et puis, comme le dit le proverbe : « À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. »
- Graphismes18/20
Border Down est probablement le plus beau shoot’em up présent dans le catalogue de la Dreamcast. Réalisé exclusivement en 3D, le jeu vous en mettra plein les mirettes et vous transportera dans des environnements tous plus époustouflants les uns que les autres. Quel plaisir de partir à l’assaut d’une flotte adverse alors que la guerre fait rage tout autour de vous, que les vaisseaux virevoltent avec grâce pour éviter une pluie de lasers et que d’immenses explosions illuminent l’espace de leur chaleur dévastatrice. Les ennemis sont nombreux, les boulettes s’accumulent facilement à l’écran et le jeu n’accuse (pratiquement) aucun ralentissement. Le design de votre vaisseau n’est, par contre, peut-être pas des plus réussis mais cela reste une question de goût.
- Jouabilité17/20
On ne peut vraiment pas se plaindre de ce côté-là. Le vaisseau réagissant au pixel près et la boîte de collision étant très clairement définie, vous serez seul maître de votre destin et ne pourrez pas vous plaindre d’un quelconque manque de précision. Border Down est également un mélange des genres et il est impossible de le ranger dans une seule catégorie. Passages nerveux à la Thunder Force, zones à mémoriser par cœur dans la pure tradition R-typienne et déluges de boulettes à la sauce DonPachi, tout cela permet au gameplay d’évoluer constamment et d’étouffer dans l’œuf tout sentiment de lassitude éventuel. Le système de scoring est extrêmement sophistiqué (scratching, break laser, etc.) et vous serez obligé d’en tirer le meilleur parti si vous voulez progresser.
- Durée de vie15/20
Le jeu comprend six niveaux divisés chacun en trois checkpoints. Vous trouvez ça pauvre ? Très bien, finissez-le et on en reparle ! S’allongeant au fur et à mesure de votre progression et dotés d’une difficulté exponentielle, les stages risquent de rebuter les moins persévérants des joueurs. Il est d’ailleurs vivement conseillé de faire régulièrement un saut dans le mode entraînement afin que certains passages n’aient plus aucun secret pour vous. Le système de border absolument unique à Border Down fait aussi que chaque niveau existe dans trois versions différentes, les décors et ennemis changeant plus ou moins à chaque fois. Si vous êtes courageux (qui a dit inconscient ?), vous pouvez toujours augmenter la difficulté… mais ce sera à vos risques et périls.
- Bande son13/20
Véritable point noir du soft, sa bande-son est loin d’égaler le niveau de qualité de ses autres attributs. Non pas que les compositeurs manquent de talent, mais c’est plutôt les choix musicaux qui laissent perplexe. En effet, ce curieux mélange entre techno et jazz n’est pas franchement des plus réussis et ne parvient jamais à convaincre. On est très loin du bon vieux rock dégoulinant de Thunder Force V qui prend aux tripes et donne envie de se surpasser. La bande-son de Border Down n’est pas non plus une abomination de la nature, mais elle est un peu quelconque. Les bruitages sont quant à eux plutôt discrets et anecdotiques.
- Scénario/
Une flotte extraterrestre menace l’espèce humaine et dispose d’une technologie beaucoup plus évoluée. Aux commandes du seul vaisseau qui peut lui résister, vous prenez votre envol pour exterminer ces aliens jusqu’au dernier. C’est à peu de chose près le scénario de 90 % des shoot’em up, prouvant aux derniers sceptiques que l’intrigue n’a jamais été d’une importance capitale dans ce style de jeu.
Curieux mélange entre manic shooting et styles plus classiques, Border Down est au carrefour des genres et enrichit son gameplay grâce à son système de border unique qui permet d’aborder chaque niveau sous trois angles différents. Sa difficulté délirante et son système de scoring complexe sont aussi ses caractéristiques principales et seuls les plus chevronnés d’entre vous auront une chance de s’aventurer dans les derniers niveaux du jeu. S’il ne parvient pas à faire trembler les maîtres incontestés (Radiant Silvergun, Ikaruga, Thunder Force V, etc.), sa réalisation sans faille et son gameplay aux petits oignons en font actuellement le meilleur shoot’em up à scrolling horizontal pour Dreamcast. Un autre shoot, Sturmwind, devrait sortir sur la dame blanche de Sega dans le courant de l’année 2011, et les premières vidéos du jeu semblent vraiment prometteuses. Parviendra-t-il à détrôner Border Down ? Seul l’avenir nous le dira, mais soyez sûr que l’on vous tiendra au courant.