Extrêmement populaire du côté de l'Archipel nippon, la saga des Tales of fête en 2005 son dixième anniversaire avec Tales of the Abyss, sur PS2. Complet, riche, proposant un système de combat aux petits oignons, le jeu a en plus le mérite d'être sorti un an plus tard, en 2006, aux Etats-Unis, contrairement à beaucoup d'autres jeux de la série qui sont restés cantonnés au Japon. L'Europe, en revanche, reste la cinquième roue du carrosse, injustement privée d'un jeu que les amateurs de Tales considèrent aisément comme un des meilleurs, si ce n'est le meilleur, opus de la série de Namco. Petit tour du propriétaire pour voir ce qu'il en est.
Tales of the Abyss, huitième jeu estampillé "Tales of", et jeu anniversaire pour commémorer les 10 ans de la série. En ce sens, on retrouve des vieilles connaissances, des petites références cachées ici et là, et même de multiples hommages à d'autres jeux de Namco. Mais malgré son étiquette de jeu anniversaire, Tales of the Abyss parvient à construire seul, sans l'appui de ses prédécesseurs, un univers riche et fouillé, une mythologie et une culture complexes et bien en place. Et on sent les efforts qui ont été fournis dans la réalisation de ce titre qui réussit à entraîner le joueur dans une quête de longue haleine, dont il ne décroche pas avant le dénouement final, le coeur serré d'abandonner si tôt Luke et ses compagnons.
En effet, le joueur incarne Luke Fon Fabre, tête à claques pourri-gâté, accessoirement fils d'un duc du Royaume de Kimlasca-Lanvaldear, fiancé à la princesse et héritier direct du trône, qui vit des jours paisibles et monotones dans son manoir... Jusqu'à ce qu'un assassin, Tear, s'infiltre dans la demeure, et, qu'au contact l'un de l'autre, les deux soient téléportés à l'autre bout du monde. Perdu dans un monde dont il ne connaît rien, accompagné d'une jeune fille froide et silencieuse, Luke fera donc tout pour... rentrer chez lui. Car c'est là le but de Tales of the Abyss, rentrer au domaine familial en un seul morceau. Assez ridicule au premier abord, on se prend finalement au jeu, d'autant que l'histoire se complexifiera et aura au final pour enjeu le sempiternel sauvetage de l'espèce humaine. L'aventure sera ponctuée de multiples rencontres, qui feront grandir et mûrir le protagoniste, pour le plus grand plaisir du joueur, qui verra chaque membre de son petit groupe évoluer au contact des uns et des autres.
Au niveau des combats, on retrouve le très dynamique LMBS, pour Linear Motion Battle System, employé dans chaque Tales of jusque-là. Mais Abyss vient ajouter son grain de sel, un grain de la taille d'une maison, qui, en apparence anodin, change en fait toute la donne. Il s'agit du Free Run, une capacité apprise très tôt qui permet, en restant appuyé sur L1, de bouger librement dans tout l'espace de combat. Auparavant, les combats se déroulaient sur une seule ligne droite. Désormais, le joueur peut se balader quand il veut dans tout l'espace. Cette petite technique se révèle vite capitale et essentielle, ne serait-ce que pour l'esquive, et on se demande pourquoi Namco n'y a pas pensé avant. L'autre gros ajout de Tales of the Abyss qui ne sera malheureusement pas repris dans les opus suivants, c'est les Field of Fonons (FoF, c'est plus court). Les FoF sont des cercles qui apparaissent sur le terrain après une attaque élémentaire de feu, de vent, d'eau ou de terre. Si le bon personnage exécute la bonne technique dans le bon cercle, alors la technique sera "améliorée", devenant dévastatrice pour les ennemis et sublime pour les yeux. Un système très riche et original, forçant le joueur à choisir intelligemment ses techniques et à observer les actions de ses équipiers s'il veut tirer complètement profit des FoF.
Enfin, cerise sur le gâteau, Abyss est beau. Alors certes, la carte du monde n'est pas spécialement réussie, certes, le jeu est bien aliasé... Mais c'est tout et on ne peut qu'être émerveillé devant la grandeur de Baticul, la tranquillité de Grand Chokmah ou les paysages d'hiver de Keterburg. Les environnements sont toujours très divers et variés, de la vallée fleurie au volcan au bord de l'éruption, on passe par tous les décors, tous aussi réussis les uns que les autres. Musicalement parlant également, le jeu s'en tire admirablement bien (pour un jeu qui gravite autour de la musique, ce serait dommage qu'il en soit autrement !) et Sakuraba propose des musiques tantôt calmes et sereines, tantôt nerveuses et motivantes, pour finir dans des tonalités épiques et des musiques frappantes de beauté. Au final, c'est comme ça que l'on peut définir Tales of the Abyss : Un jeu grand, beau, qui frappe par son humanité et qui émeut par des personnages touchants plongés dans un monde cruel. Une véritable réussite.
- Graphismes15/20
L'ensemble est très joli et détaillé, dans un beau style manga. Les animations des personnages sont au poil et leurs mimiques sont à mourir de rire. Les différents décors sont sublimes, et seule la carte du monde fait tache. Un peu d'aliasing traîne, mais ce n'est pas vraiment gênant.
- Jouabilité18/20
Parfaite, tout simplement. Le système de combat est de loin le plus riche de la série, et le Free Run qui fait son apparition pour la première fois y est pour beaucoup ! Grâce à un système aussi jouissif, on apprécie chaque joute, et on en redemande !
- Durée de vie16/20
La durée de vie est plus qu'honorable, une bonne quarantaine, voire cinquantaine, d'heures en ligne droite, renforcées par de très nombreuses quêtes annexes toutes plus intéressantes les unes que les autres. Le New Game + apporte également des bonus appréciables qui incitent le joueur à se plonger dans une deuxième partie.
- Bande son17/20
Peut-être le meilleur travail de Sakuraba sur un Tales of. L'OST de Tales of the Abyss propose des pistes souvent sublimes. Le doublage anglais est très réussi et la musique d'intro, Karma, est peut-être meilleure dans la version américaine que japonaise.
- Scénario17/20
De loin le plus mature de la série, Tales of the Abyss nous entraîne dans une réflexion sur le but de l'existence et sur la fatalité. Malheureusement, le jeu a un univers tellement recherché que certains termes sont pour le joueur peu concentré un véritable charabia. Un peu moins de lourdeurs techniques n'aurait pas été de refus.
Beau, long, jouissif, passionnant, le jeu plonge le joueur dans une quête de longue haleine qui lui fera aller des rires aux larmes, de la colère à l'apaisement, accompagné par des personnages atypiques et plus attachants que jamais. Le meilleur des Tales of ? Peut-être bien oui, et si ce n'est le meilleur, ce Tales of the Abyss est indubitablement au-dessus de la moyenne, et ne fera jamais regretter au joueur de s'être lancé dans une telle aventure.