Trois mois après le PC, c'est au tour de la 360 d'accueillir La Fureur de Kane, la suite de Command & Conquer 3. Ou plutôt le prélude, puisque les événements de ce nouveau volet se déroulent avant ceux des Guerres du Tibérium. On y retrouve Kane, le charismatique chauve mégalo dirigeant la Confrérie du Nod, fortement courroucé par sa défaite et bien décidé à assouvir ses envies de vengeance.
Il convient tout d'abord de replacer l'histoire dans son contexte, car il s'est fortement enrichi au fil des nombreux épisodes de la série. Chronologiquement, La Fureur de Kane se place avant Les Guerres du Tiberium, entre le second et le troisième conflit pour le précieux minerai vert. Il s'agit donc en fait d'une suite de Missions Hydre (Firestorm en VO), l'extension de Soleil de Tiberium sortie sur PC en 2000. Il faut suivre, c'est comme Lost : si vous ratez un épisode, c'est foutu ! Le scénario commence en 2034, alors que Kane, défait par le GDI, est présumé mort. Mais le bougre est résistant, on ne se débarrasse pas de lui comme ça. Certes, il est bien amoché, un masque recouvrant partiellement son visage au début de la campagne. Terré bien au chaud dans son bunker tel un dictateur irakien, il va repartir, avec notre aide, à la conquête du monde.
Disons-le tout de suite, cette histoire est une demi-déception. Pas qu'elle soit mauvaise, mais on aurait préféré une vraie suite de C&C 3. Là, les événements finissent par rattraper ceux du jeu original pour se dérouler en parallèle, mais sans jamais vraiment les dépasser. On aurait aimé aller plus loin, là on sent qu'Electronic Arts en garde un peu sous le coude pour une prochaine fois... Autre point gênant au niveau de la narration : le doublage français est assez inégal. Celui de Kane est heureusement réussi, mais on ne peut pas en dire autant de celui de frère Marcion, absolument pas convaincant. Ce personnage inédit, incarné par Carl Lumbly (vu dans Alias), est le fondateur de la nouvelle Main Noire. Il va d'abord falloir le persuader par la force de revenir dans le droit chemin, avant de pouvoir passer aux choses sérieuses avec la destruction de la station spatiale Philadelphia. Oui, ça sent parfois un peu le réchauffé, mais cette nouvelle campagne solo reste plaisante à parcourir pour peu qu'on soit fan de Kane et du Nod. Ses treize missions sont peu originales dans leurs objectifs (anéantissement, capture, protection... les classiques des STR) mais proposent un challenge corsé. Et on y croisera une nouvelle tête en la personne de Natasha Henstridge (La Mutante), ce qui est toujours agréable, vous en conviendrez.
Cette campagne est surtout l'occasion de découvrir les ajouts apportés par cet opus. Pas de nouvelle faction en vue, l'introduction des Scrins dans C&C 3 ayant déjà été largement suffisante... En revanche, six sous-factions font leur apparition : la Main Noire donc, mais aussi les Marqués de Kane côté Nod ; les Griffes d'acier et le ZOCOM pour le GDI ; Vengeance-17 et Domination-59 (sic) chez les Scrins. Chacune arrive avec son lot d'unités toutes belles toutes neuves, enfin si on veut puisqu'on retrouve quelques vieilles têtes connues des aficionados de la saga, comme le Wolverine qui fait un retour remarqué. L'arsenal s'enrichit pas mal, du terrible Purificateur équipé d'un lance-flammes au Juge, un véhicule défensif très pratique. Tous ne sont pas franchement indispensables, et manquent parfois un peu d'équilibrage, notamment les unités épiques. Ca insuffle tout de même un peu de renouveau à une recette qui n'a par ailleurs pas bougé d'un iota.
Car niveau gameplay, force est de constater que rien n'a bougé. C'était d'ailleurs déjà un reproche fait à C&C 3, qui n'apportait aucune innovation à la série et encore moins au genre. Eh bien ce n'est pas La Fureur de Kane qui va révolutionner cet état des choses. De ce point de vue, cette version 360 est encore la pire puisqu'elle ne propose pas le mode conquête globale, qui était la principale nouveauté sur PC. A la place, on trouve bien un mode de jeu exclusif à la console intitulé Défi de Kane, mais il s'agit finalement de bêtes escarmouches à ceci près que la carte et les factions sont imposées. L'autre différence par rapport à la version PC, c'est évidemment la maniabilité à la manette. En tant qu'intégriste PC indécrottable, je n'ai pas vraiment été convaincu par la jouabilité proposée. Certaines fonctionnalités sont carrément pénibles à faire, comme l'assignation de plusieurs unités à un groupe. Il faut ouvrir un premier menu radial, sélectionner l'option groupe, on arrive alors dans un second menu où on peut enfin choisir un numéro... On perd facilement plusieurs secondes pour faire une action aussi simple, ce qui plombe sérieusement le rythme des parties, habituellement assez furieux dans la série. Personnellement, j'ai préféré de loin la maniabilité de Universe at War : Earth Assault, qui proposait plein de bonnes idées pour manipuler efficacement les unités, via la mini-carte notamment. Le seul avantage de cette version 360, c'est qu'elle est indépendante (console oblige) et ne nécessite donc pas l'achat du jeu original pour fonctionner, c'est toujours bon à prendre. Et malgré son manque d'originalité, elle propose quand même du contenu de qualité, bien fignolé. Mais on espérait peut-être un peu plus.
- Graphismes14/20
Malgré l'année écoulée depuis Les Guerres du Tiberium, le moteur graphique reste assez agréable à admirer en action.
- Jouabilité11/20
Rien de neuf sous le soleil de Tiberium, ou presque. Les nouvelles unités et capacités n'apportent guère de changement, le gameplay est resté identique à celui de l'original, déjà lui-même très (trop ?) classique. Niveau maniabilité, cette version 360 souffre de certaines lourdeurs, l'utilisation du pad rendant pénibles des actions d'ordinaire enfantines, ce qui nuit au rythme. La concurrence a pourtant récemment démontré qu'il était possible de faire beaucoup mieux en la matière.
- Durée de vie13/20
La nouvelle campagne est composée d'une douzaine de missions, pas de quoi s'occuper bien longtemps, malgré les objectifs secondaires, les médailles et la difficulté conséquente. Quant au mode Défi de Kane, censé remplacer la conquête globale, il se révèle finalement bien trop proche des escarmouches pour présenter un réel intérêt. Heureusement que le multijoueur est là pour prolonger le plaisir.
- Bande son11/20
Si les musiques sont toujours au top, la version française pâtit de la piètre prestation du doubleur de frère Marcion. Les voix de certaines unités sont également ratées.
- Scénario12/20
On se réjouit de retrouver Kane et le Nod en mauvaise posture dans cette histoire qui fait le pont entre Command & Conquer 2 et 3, mais on aurait préféré une vraie suite aux Guerres du Tiberium, plutôt que ces événements dont certains ont un arrière-goût de déjà-vu.
Il serait exagéré de dire que La Fureur de Kane est une déception. Le travail réalisé est de bonne facture, mais il manque un je-ne-sais-quoi, un éclair de génie, un zeste de passion, une âme, quelque chose d'intangible mais dont l'absence est pourtant perceptible. Reste un jeu correct, en attendant mieux.