Après nous avoir mis dans la peau d'un gangster afro-américain dans une Californie fantastiquement pixellisée, après nous avoir fait revivre la guerre des gangs new-yorkais dans les années 80, que pouvait nous sortir Rockstar comme environnement pour nous permettre d'être politiquement incorrect ? L'école, bien sûr. Tout malfrat qui se respecte a commencé à jouer les caïds dans les cours de recré en faisant du trafic de billes. Canis Canem Edit, nouveau bébé de la gamme des GTA-like, vous permettra de jouer un gros dur des cours de collège dans une institution britannique moderne.
Vous êtes James "Jimmy" Hopkins. Un sale gosse de la pire espèce et un futur truand en puissance. Votre beau-père, un bonhomme plein aux as, décide de vous pourrir la vie et de vous envoyer en pension. Vous arrivez donc devant la Bullworth Academy, institution de renom à la discipline britannique qui aura pour mission de vous inculquer les véritables valeurs d'un gentleman. Sachant que l'établissement cache bien son jeu puisque du collège sortent les pires hommes et femmes de la société allant du parrain de la mafia jusqu'aux avocats d'affaires véreux, Jimmy n'est pas prêt à se transformer en citoyen modèle. Au contraire, en tant que roi des 400 coups, il compte bien démontrer à son proviseur qu'il n'arrivera pas à le mater. Une fois l'uniforme endossé et quelques camarades sympathiques rencontrés, vous êtes lâché dans l'académie à la recherche de votre premier méfait.
La principale valeur ajoutée dans un GTA-like, c'est la liberté de mouvements et d'action sur une carte immense, sur ce point Canis Canem Edit ne déroge pas à la règle. Comme à son habitude, Rockstar ouvre aux joueurs uniquement une petite partie de la carte. Cet endroit de jeu vous donnera l'occasion de vous familiariser avec les commandes et d'augmenter vos compétences pour vous permettre de surmonter les défis des chapitres suivants. Ainsi, pour débuter l'aventure, vous aurez à parcourir l'académie avec votre premier ami Gary. Vous commencerez par découvrir le dortoir des garçons et votre chambre où vous pourrez dormir pour panser vos blessures, vous changer lorsque vous aurez volé, gagné ou acheté de nouveaux vêtements et jouer les apprentis chimistes pour concocter des produits irritants (boules puantes, poil à gratter, pétards...). Ensuite, vous vous rendrez au sein même du collège. Gary vous apprendra à dévaliser les casiers pour trouver des objets précieux, à barratiner les plus costauds que vous et à vous cacher dans les poubelles pour échapper aux pions. Ceci vous familiarisera avec la carte et le radar vous permettant de vous répérer aisément et de filer vers vos objectifs. Direction la cafét' où vous attend la présentation des bandes régnant sur certains secteurs du collège et de la ville de Bullworth. Les Fayots (Nerds), les intellos de base qui sont des vrais rats de bibliothèque, fans d'échecs et qui seront utiles pour la préparation des boules puantes. Les Sportifs (Jocks), ce sont les caïds de la cour d'école, ils squattent le terrain de sport et pour se faire respecter, ils jouent plus de leurs muscles que de leurs cerveaux. Les Bourges (Preppies), insupportables, niaiseux, prétentieux mais surtout riches, ils vous apporteront des talents de boxeur et vous permettront d'entrer dans des endroits élitistes. Enfin, les Blousons Noirs (Greasers), d'un look anachronique plutôt cool, sont les stars de la mécanique et des cours de techno.
Une fois la présentation faite, vous vous dirigerez vers votre première mission. Mais nous vous laisserons le plaisir de la découvrir. Comme tout élève modèle, vous aurez l'obligation de suivre les cours proposés par la Bullworth Academy. Allant du cours d'anglais à la chimie en passant par le sport et les arts plastiques, tous viseront à augmenter vos compétences. Par l'intermédiaire de mini-jeux, vous devrez soit appuyer sur les bonnes touches dans un rythm-game pour acquérir la bonne formule chimique soit jouer au pendu avec le prof anglophone. Comme dans la réalité, vous aurez des cours le matin et l'après-midi. A 16 heures, la cloche de la liberté sonnera et vous permettra d'entreprendre les missions. Ces dernières se déclineront sous des phases de poursuites et de bagarres tout en échappant aux regards des surveillants. Certaines vous permettront aussi de draguer les filles du dortoir d'en face pour recevoir vos premiers baisers et augmenter vos points de vie, tandis que d'autres exigeront d'aider certains de vos professeurs, comme le prof d'anglais goulu de liqueurs écossaises. Ces missions principales seront symbolisées par des croix jaunes sur votre radar tandis que les secondaires apparaîtront en bleu au fil de vos pérégrinations. Ces dernières se limiteront à une discussion avec des étudiants qui vous demanderont par exemple de prendre des avertissements sur votre carnet scolaire à leur place en effectuant des tâches réprimées. Toutes ces actions auront un impact sur votre popularité avec les bandes du collège et vous éviteront ainsi de vous faire castagner dans les toilettes. A la fin de chaque chapitre, un boss apparaît qui bloque l'accès à la suite de l'aventure. C'est en les battant qu'on ouvre les différentes parties de la map, dont l'extérieur de l'academie et la vieille ville de Bullsworth.
Première chose que l'on remarque, c'est la petitesse de la carte par rapport au dernier GTA en date. Toutefois, la taille est compensé par l'obligation de se déplacer à pieds, en skate ou en vélo et par un nombre vraiment impressionnant de missions assurant de nombreuses heures de jeu en perspective. La ville se découpe en cinq secteurs : une zone industrielle avec son asile de fous, le centre ville renfermant des magasins, la quartier huppé avec sa fête foraine, le nouveau Bullworth avec son Skate Park et bien évidemment l'Académie Bullworth. L'ouverture de la ville vous permettra de découvir des missions plus riches et plus diversifiées. Par exemple, à la fête foraine, vous pourrez lancer des balles dans un jeu de massacre afin de remporter des billets pour acheter des gros ours en peluche et décorer votre chambre. Vous pourrez également suivre des cours de boxe façon Knock Out et gagner des coupes dans des courses de vélos éffrénées. En ville, les surveillants sont logiquement remplacés par des flics, Rockstar oblige. Ceux-ci n'hésiteront pas à faire respecter la loi et ne se priveront pas de vous mettre en prison afin de vous rafraîchir les idées. D'un point de vue maniabilité, le tout reste dans la veine de GTA San Andreas avec une prise en main intuitive et expliquée tant dans les phases de baston que dans les phases de sociabilisation. Pour rentrer dans le détail, vous aurez des combos par défaut et que vous débloquerez au fil de l'aventure pour mettre à mal vos adversaires. Vous pourrez aussi les projeter dans les poubelles une fois agrippés. Et petit plus assez drôle, vous aurez la possibilité de les ridiculiser avec un mouvement de finish him. Pour les phases de discussion, la manipulation se limitera à la pression de deux boutons pour soit insulter, soit démarrer un petit dialogue ou une mission secondaire, soit draguer et embrasser les filles.
Graphiquement, un véritable travail a été apporté tant pour les personnages que pour les environnements. Durant les cut-scenes, le moteur est repris et nous remarquons immédiatemment le soin pris sur la modélisation caricaturale des protagonistes renforçant les clichés et le burlesque de l'ensemble. Les décors nous rappellent étrangement ceux des institutions privées britanniques. Des constructions en briques rouges, des quartiers de maisons mitoyennes et prolétariennes, des manoirs de style victorien, ajoutez une pointe de brouillard et tous les ingrédients de la vie anglaise sont présents. En parlant d'effets climatiques, les développeurs ne se sont plus limités à faire tomber de la pluie. Votre aventure se déroulera au fil des saisons. Les feuilles mortes tapisseront le sol d'automne et la neige recouvrira les toits décorés de mille feux. Vive les batailles de boules de neige, d'ailleurs. Aucun temps de chargement entre les différentes zones ne sera à noter et le tout est vraiment très fluide. On prend plus de plaisir à flâner dans les rues que dans un GTA au vue de la grande qualité esthétique apportée. Cependant, la liberté est moins importante du fait de la plus petite superficie créée. Autre point négatif, les passants ou voitures apparaissent par moments comme par enchantement et un léger brouillard floute pour cacher la misère. Côté bande-son, Rockstar nous habituait à gâter nos cages à miel avec des musiques provenant de grands albums de groupes connus. Ce n'est pas le cas pour Canis Canem Edit. La bande originale l'est réellement pour coller parfaitement avec l'ambiance. Des sons de pop anglaise, de funk et de brits rock nous ravissent totalement durant l'aventure. Pour les dialogues, pas de voix françaises mais un bon sous-titrage et des acteurs anglophones ayant fournit un réel effort pour nous retransmettre l'accent Cockney des prolétaires anglais et celui So British pour les élites. En définitive, Rockstar réussi haut la main son pari d'adapter le gameplay GTA à la sauce scolaire. Qui en doutait ?
- Graphismes16/20
Le studio Rockstar Vancouver a su créer un véritable univers en mettant bout à bout tous les clichés burlesques de la vie scolaire. De la cafét poisseuse en passant par une académie So British, Canis Canem Edit est un véritable plaisir pour les yeux. Sans aucun temps de chargement, le titre reste fluide mais il en pâtit avec des objets apparaissant de nulle part et des cut-scenes longues à démarrer.
- Jouabilité17/20
Gardant leur savoir-faire dans ce style de jeu, Canis Canem Edit est un régal dans sa maniabilité. Ajoutez un gameplay très varié avec une multitude de missions, de cours et de compétences à débloquer et vous obtiendrez une parfaite chimie vidéoludique. Face à un GTA, la liberté de mouvements est tout de même amoindrie, mais rien de très grave.
- Durée de vie16/20
Le jeu vous tiendra en haleine pendant une trentaine d'heures seulement si vous souhaitez réaliser toutes les missions et si vous souhaitez débloquer toutes les compétences.
- Bande son17/20
Contrairement à ses aieuls, Canis Canem Edit ne jouit pas d'une bande originale avec des morceaux connus. Le tout sort de la tête des créatifs de chez Rockstar et colle parfaitement avec l'univers choisi. Côté doublage, le titre est entièrement en anglais sous-titré et profite d'un excellent jeu d'acteurs.
- Scénario16/20
Rempli de clichés scolaires et de situations burlesques, le scénario n'a pas de véritable intéret littéraire mais il aura toute de même l'occasion de vous faire sourire et également de vous tenir en haleine à chaque chapitre.
Mettez un soupçon de mini-jeux, une pointe de missions libres, un bouquet de graphismes travaillés, une pincée de scénario collègien et vous obtiendrez Canis Canem Edit, un petit GTA-like nouvellement créé et pouvant obtenir son certificat dans quelques années. Pour l'heure, le jeu n'arrive pas encore à la cheville de ses aînées mais avec quelques cours supplémentaires, le retard sera vite rattrapé. Véritable ôde aux 400 coups de notre enfance, vous vivrez une longue aventure dans un univers réel semblable à celui du célébre sorcier britannique et balafré. Remettez-vous à travailler vos anciens cours et installez-vous sans sourciller sur les bancs de la Bullworth Academy.