Si la guerre des clones a déjà eu lieu, Ninety-Nine Nights nous ressort le coup des armées constituées de milliers de soldats ayant tous un léger lien de parenté. Fort de son expérience acquise après deux volets de Kingdom Under Fire, Phantagram Interactive révise une nouvelle fois ses classiques en citant aussi bien son propre jeu que son modèle, Dynasty Warriors. Cette fois, l'aire de jeu se situe du côté de la Xbox 360, ceci impliquant des batailles démesurées où des milliers de corps tomberont sous le poids de nos coups.
Ninety-Nine Nights serait un bon cas d'étude pour qui veut tenter de découvrir ce qui est le plus intéressant entre la surenchère technique et un jeu plus posé mais permettant du coup une meilleure implication du joueur. Phantagram a choisi sa voie et de toute cette cogitation est né un beat'em all de masse, mou du bulbe mais jouissif par bien des côtés. L'orientation première des développeurs est donc de confronter le joueur, et par extension son avatar de pixels, à une masse grouillante d'ennemis déferlant sur vous telles des vagues en furie. Pari réussi, enfin du moins en apparence, car une fois qu'on aura mis le pied à l'étrier, il sera difficile de ne pas pester contre divers problèmes de plus en plus visibles au fil de notre progression. Mais commençons par les aspects positifs qui, sans masquer quelques aberrations de programmation, sauront vous tenir éveillé avant que la moutarde ne vous monte au nez.
Tout d'abord, la possibilité qui nous est donnée de diriger 7 personnages n'est pas à sous-estimer dans le sens où chacun d'entre eux a une personnalité bien tranchée et des attaques qui vont avec. Si l'aventure débute avec une charmante amazone, vous pourrez ensuite admirer la belle chevelure d'un barbare, un chevalier propre sur lui, une magicienne toute mimi, etc. En plus de disposer d'une personnalité très typée, chaque combattant disposera de coups différents ainsi que de deux techniques dévastatrices. Pour ceux et celles qui n'auraient pas lu ma preview (garnements que vous êtes), je recentre le débat en vous lâchant quelques mots sur la façon dont s'articulent les niveaux et à fortiori le déroulement des batailles. Tout commence par le choix d'une mission sur une map. Une fois que vous l'aurez sélectionnée, viendra le moment d'opter pour deux armées qui vous épauleront, parmi quatre choix possibles : infanterie, infanterie lourde, lanciers et archers. Je signale à ce sujet que si le choix est restreint, certains héros n'auront droit qu'à un panel de trois types d'unités. Quoi qu'il en soit, la mission à proprement parler pourra ensuite débuter.
Le premier problème qui est à signaler vient de ces fameuses armées qui vous suivront bien docilement. Cet aspect représente en effet le seul élément stratégique du jeu, ceci conférant à N3 un intérêt bien moindre que Kingdom Under Fire, du moins si vous vous attendiez à quelque chose du même genre. Mais le plus embêtant dans l'histoire est qu'il n'est possible de donner que deux ordres à vos troupes, associées aux boutons LB et RB, : avancez / restez là. Etrange, même si vos hommes sont d'une stupidité à toute épreuve. Il est même plus simple d'avancer que les développeurs n'ont pas vraiment compris le sens du terme IA. Ainsi, si on ne s'offusquera pas trop du fait que les troupes ennemies restent plantées sur place en attendant qu'on vienne à leur rencontre, il est exaspérant de voir qu'une cinquantaine de vos soldats mettent trois plombes à trucider un gobelin, vous suivent sans se soucier des adversaires et soient aussi mous en toute circonstance. Heureusement que vos généraux (des personnages liés à l'histoire qui vous accompagnent également) s'en sortent mieux en mettant un peu plus d'ardeur au combat. Néanmoins, il faut tout de même noter que cette "idiotie attitude" sera la première cause de mortalité chez vos troufions. Il ne sera donc pas rare de terminer des missions en solo et de devoir se taper à la toute fin un boss accompagné d'une centaine de subalternes.
D'ailleurs, vous allez dire que je vois le mal partout mais comment ne pas fustiger une nouvelle fois le jeu pour sa difficulté fort mal réglée ?! Ceci se traduit par quelques types d'ennemis (généralement les sorciers) très puissants ou des boss pouvant vous enlever une barre de vie en un seul coup. Bien entendu, vous aurez toujours la possibilité de revenir en arrière pour essayer de dénicher des potions de soin mais ce n'est clairement pas une sinécure. Bref, ne vous étonnez donc pas de mourir au terme d'une mission de plus d'une heure à cause d'un affrontement un brin trop ardu. Ceci m'amène à vous parler de l'évolution de votre personnage qui pourra monter de niveau en gagnant de l'expérience. Cette évolution vous permettra d'obtenir de nouveaux combos, réalisables en alternant les coups Faible et Fort. En parallèle, de nombreux objets (bottes, armures, armes, artefacts) vous aideront à rendre votre combattant plus efficace. Malheureusement, tout préparé que vous êtes, vous devrez encore faire face à un gameplay antédiluvien qui n'a plus vraiment sa place de nos jours, surtout sur une Next Gen comme la Xbox 360.
Si je vous ai déjà parlé des soucis d'IA, on signalera aussi une lisibilité très réduite synonyme d'énorme cafouillage durant les batailles. Il arrive donc très souvent de perdre votre personnage de vue et de se faire toucher par les adversaires. On a beau pouvoir bouger la caméra comme bon nous semble, ça ne change pas grand-chose au problème, ceci étant encore plus vrai lorsque des éléments (feuillages, murs, montagnes) nous entourent. De plus, le choix des deux angles de caméra est risible dans le sens où seuls quelques centimètres de distance les séparent. A cela, on peut rajouter quelques (rares) bugs de collision qui peuvent empêcher vos hommes de vous rejoindre ou l'impossibilité de gravir des petites buttes hautes de quelques mètres. Ceci est tout simplement aberrant à l'heure actuelle et dénote bien d'un manque de sérieux dans le développement ou de l'absence de bêta-test dont l'importance n'est pourtant plus à démontrer. Au final, on est souvent obligé de contourner des obstacles insignifiants pour aller chercher tel objet, parler à telle personne, ce qui fait peine à voir.
Ne soyons pas trop négatifs et terminons sur une note positive. Si je vous ai déjà dit que vous pouviez utiliser plusieurs armes ou divers combos, vous aurez aussi l'occasion de profiter d'une furie en récoltant des orbes rouges lâchés par vos ennemis. Une fois une jauge spécifique remplie, à vous de déclencher l'apocalypse afin de faire le ménage. Mais les réjouissances ne s'arrêtent pas là puisque lorsque vous utiliserez votre technique spéciale, vous récolterez des orbes bleues qui rempliront une autre jauge. Lorsqu'elle sera pleine, vous pourrez alors lancer une attaque ultime pour éliminer tous les monstres présents à l'écran. Le paradoxe dans tout ça est que le jeu manque parfois de vivacité et de pêche, le côté "sensationnel" provenant beaucoup plus du nombre d'opposants à l'écran que des effets visuels, jolis par ailleurs. Certes, les météorites pleuvent, les sorts magiques inondent (dans tous les sens du terme) la surface de combat, certaines fins d'enchaînements sont classieuses mais malgré toute cette esbroufe, on a l'impression d'assister à une répétition plutôt qu'au spectacle final. Cependant, je précise que cette dernière remarque est subjective et n'a donc pas influencé la note générale. Ce qui l'est moins en revanche tient aux quelques ralentissements entraperçus ici et là (notamment quand la console doit gérer des centaines de sprites et effets pyrotechniques) ou à la grande redondance des missions qui sont en général bien trop longues et lassantes au bout d'un moment. Pourtant Ninety-Nine Nights n'est pas exempt de saveurs, entre autres induites par son univers chamarré devant autant à la culture chinoise qu'au récit d'héroïc fantasy. Il est simplement dommage que Phantagram ait été obnubilé par l'aspect technique au point de laisser d'énormes problèmes de jouabilité qui, éradiqués, auraient pu modifier la donne.
- Graphismes13/20
Le design des personnages ne plaira pas à tout le monde et on pourra le trouver trop caricatural sous bien des angles. Cependant, les cinématiques en CG sont superbes, les effets visuels restent d'un bon niveau et seuls les décors (relativement éclectiques en terme d'ambiance) font peine à voir. Le syndrome Dynasty Warriors mais sans le fameux brouillard.
- Jouabilité11/20
Une IA à la ramasse, quelques bugs de collision, d'énormes soucis de lisibilité et une liberté d'action bridée par l'impossibilité d'évoluer comme bon nous semble en nous obligeant à contourner des faux obstacles comme des murets, des buttes de quelques centimètres, etc. L'aspect stratégique est également réduit à sa plus simple expression mais on appréciera la simplicité des combos, facilement réalisables et évoluant en fonction de votre montée de niveaux. La gestion de l'équipement reste aussi très limitée mais apporte un petit plus à l'ensemble.
- Durée de vie14/20
Bien que certaines missions soient communes à plusieurs personnages, on pourra prendre du plaisir à jouer avec les 7 acteurs virtuels qui disposent de techniques différentes et d'une histoire qui leur est propre. Par contre, les objectifs sont redondants et la difficulté mal gérée vous obligera parfois à recommencer des missions de plus d'une heure. N'oublions pas non plus les quelques bonus (principalement des artworks) à débloquer avec les points récoltés en fonction du rang obtenu à la fin de chaque niveau.
- Bande son14/20
Pas de doublage japonais (coréen ?) mais les voix US sont satisfaisantes. Les thèmes musicaux sont pour la plupart épiques (même si ils savent laisser la place à des morceaux plus doux), les cuivres se taillant souvent la part du lion, et leur orchestration est de qualité.
- Scénario10/20
Bien que les scenarii des héros se croisent et se recroisent, l'histoire de Ninety-Nine Nights laisse un peu à désirer. Trop conventionnel, pas assez enflammé, marchant parfois sur les plates-bandes de Star wars et du Seigneur des anneaux, le synopsis a au moins le mérite de nous faire voir du pays et d'assister à des batailles homériques.
Ninety-Nine Nigths était attendu comme un Dynasty Warriors boosté aux hormones. Le résultat est donc d'autant plus décevant surtout pour ceux qui espéraient trouver un aspect stratégique au moins aussi important que dans Kingdom Under Fire. Mal fini, émaillé de plusieurs problèmes bien réels, trop redondant, une difficulté mal gérée, N3 souffre de beaucoup de tares souvent contrebalancées par le plaisir ressenti lors de joutes gigantesques. Inutile de dire qu'on pourra s'amuser mais encore faudra t'il s'armer de patience et ne pas avoir peur de recommencer certaines missions s'étirant parfois sur d'interminables minutes.