Fort d'une réputation qui perdure au Japon et aux Etats-Unis, le mystérieux Animal Crossing se dévoile aux joueurs européens après des années d'attente. Qu'on l'appelle Dôbutsu no Mori, Animal Forest ou Animal Crossing, le titre de Nintendo porte bien son nom puisqu'il s'agit avant tout de venir s'installer au carrefour des animaux et de trouver sa place en forgeant de précieuses amitiés virtuelles. Tout un concept.
Vous en avez assez des tracas quotidiens qui s'accumulent proportionnellement au nombre des années ? Vous rêvez de mener une vie parallèle dans un univers bucolique auprès de sympathiques petits personnages en peluche ? Alors déclinez votre nom, votre date de naissance et embarquez à bord du train de Lazare. Nous arrivons dans la ville de vos rêves.
Mais n'allons pas trop vite en besogne. N'oubliez pas que vous n'êtes qu'un étranger en terre inconnue et que les autochtones ont des comportements diablement humains. Ainsi, ce n'est pas en vous comportant comme un goujat que vous vous ferez des amis. Ce serait dommage de faire de votre village une terre hostile où les habitants ne rêvent que de vous bannir. Gentillesse, dévotion, altruisme sont donc les trois règles d'or d'Animal Crossing, n'en déplaise aux habitants de ce monde qui vous traitent parfois avec mépris et familiarité. A vous de gagner leur respect en démontrant vos qualités. Malgré tout, les premières heures de jeu dans Animal Crossing ne sont pas les plus passionnantes, le soft voyant en revanche son intérêt croître au fil du temps. On commence par acheter une jolie petite maison bien située au beau milieu de la place principale, et l'on s'apprête à s'envoler libre comme l'air lorsque Nook nous apprend qu'il va falloir immédiatement rembourser l'argent qu'il nous a prêté pour notre nouvelle demeure. Il est possible de créer jusqu'à quatre personnages différents mais il n'y en a qu'un seul de jouable à la fois. Moyennant deux cartes mémoires, on peut également prendre le train pour naviguer entre deux villes. Bref, vous voilà devenu pour un temps le livreur attitré d'un raton laveur nommé Nook, et ce ne sont pas les tâches qui manquent. Entre les commandes spéciales et les objets perdus à ramener à leur propriétaire, on se croirait propulsé dans le film d'animation Kiki's Delivery Service. Heureusement, on retrouve assez rapidement sa liberté pour devenir un citoyen à part entière d'Animal Crossing.
Comment définir un concept aussi atypique que celui du titre de Nintendo ? Si vous l'ignorez encore, le soft ne comporte strictement aucune trame scénaristique, aucun but à atteindre, aucun objectif à compléter, seulement des quêtes simples qui permettent de lier davantage connaissance avec les habitants et de personnaliser encore plus son village. Dans le fond, tout ça évoque un peu le même principe que Les Sims, à chacun de voir s'il adhère ou pas. On a beau ne pas avoir de véritable but, il y a toujours quelque chose à faire : discuter, rendre service, ignorer quelqu'un, embellir son lieu de vie, pêcher, faire des fouilles pour dénicher des fossiles à mettre dans le musée, collectionner des jeux NES (réellement jouables), capturer des insectes, écrire des lettres, passer des annonces, faire des achats, récolter des fruits, planter des fleurs, aménager son intérieur, etc. D'ailleurs, en parlant de ça, le jeu prend carrément en compte l'art du Feng Shui hérité des chinois qui consiste à aménager parfaitement son intérieur pour bénéficier d'ondes positives, ce qui se traduit par davantage de facilité pour trouver des objets et recevoir de l'argent (évidemment il faut tout de même avoir quelques notions en la matière).
La notion de temps réel étant la base d'Animal Crossing, les possibilités diffèrent selon le moment de la journée et l'on est souvent obligé de se plier aux contraintes des horaires, de se lever tôt pour assister à un événement précis ou de jouer de nuit pour faire telle ou telle chose. Surtout qu'on ne peut pas tricher en modifiant l'horloge de la console sans avoir affaire au terrible Resetti. Le jeu gère bien sûr le cycle des saisons, il neige donc en hiver et les feuilles tombent en automne, modelant ainsi la face de votre village. Si vous avez quelques affinités avec certains personnages, vos amis vous offriront des cadeaux le jour de votre anniversaire. Des fêtes ont également lieu à des moments précis, comme la veillée de Noël au soir du 24 décembre. Il faut bien garder à l'esprit que le monde d'Animal Crossing continue d'exister même lorsqu'on ne joue pas, à l'image d'un MMO situé dans un univers persistant. Tout cela renforce l'aspect addictif du jeu, et l'on a bien le sentiment de devoir être présent autant que possible pour ne pas voir son lieu de vie se dégrader ou ses amis partir pour les avoir délaissés.
Animal Crossing n'est clairement pas à prendre comme n'importe quel jeu. Il faudrait plutôt le définir comme une autre façon de vivre. Plus on joue, plus on voit son univers évoluer et plus on prend conscience de l'importance de sa présence dans le jeu. Les personnages deviennent des amis à part entière, on guette leur courrier dans sa boîte aux lettres et on est sans cesse en quête de nouvelles découvertes plus rares pour créer la ville parfaite. Après des mois passés à jouer, les parties deviennent de plus en plus personnalisées et uniques, ce qui donne d'autant plus envie de faire découvrir son monde à ses amis dans la réalité. Après, il est évident que tout le monde n'adhérera pas à ce concept si particulier. Mais, par respect envers ceux qui se sont battus pour que le jeu sorte enfin en Europe, la moindre des choses est de tenter l'expérience.
- Graphismes15/20
Même au niveau de sa réalisation, Animal Crossing se fait remarquer. Le design naïf et rondouillard des personnages cache toutefois des tempéraments très humains, tantôt méprisants, tantôt joueurs, tantôt reconnaissants. Les graphismes sont colorés à souhait et le village est remodelé régulièrement au rythme des saisons.
- Jouabilité15/20
La maniabilité est extrêmement simple et l'interface se révèle on ne peut plus intuitive. Tout est fait pour que le joueur oublie qu'il a une manette dans la main afin de l'immerger complètement dans sa seconde vie.
- Durée de vie16/20
Si certains n'accrocheront pas au concept et lâcheront le jeu au bout de quelques heures, les autres verront leur intérêt croître avec le temps. On ne peut jamais se permettre de s'absenter trop longtemps et de délaisser ses amis virtuels tandis que la maison prend la poussière. Attention, la dépendance vous guette.
- Bande son15/20
Les jolis thèmes musicaux sont accompagnés de bruitages géniaux qui traduisent littéralement les voix des personnages. En prêtant l'oreille et avec beaucoup d'habitude, on pourrait presque les comprendre sans lire les textes. Il est également possible de personnaliser le jingle qui correspond au thème de sa ville pour reprendre un air connu.
- Scénario/
Qui dit aucun objectif dit pas de scénario. L'histoire, c'est vous qui la construisez au gré de vos rencontres. La traduction française respecte le ton à la fois drôle et familier du jeu pour un résultat qui ne manque pas d'humour.
Difficile de donner une note à Animal Crossing. D'un côté, il est clair que le concept particulier du jeu laissera de marbre la plupart d'entre vous. De l'autre, celui-ci comblera tellement de joueurs réceptifs à l'esprit du titre qu'il serait une erreur de sous-estimer son potentiel. Animal Crossing, c'est avant tout une seconde vie qui vous est offerte et dont vous risquez de ne plus pouvoir vous passer.